Rassurez-vous, cette chronique ne sera pas la dix millionième à soutenir que Donald Trump est irresponsable, instable, incompétent, grossier, inculte et menteur.
Si vous ne l’avez pas encore compris, vous avez un sérieux problème.
Je veux plutôt examiner froidement la possibilité qu’il puisse être réélu.
Ça fait peur, hein ?
Pourtant, son niveau d’appui reste stable autour de 43-44 %. Ses partisans voteraient pour lui même si, comme il l’a déjà dit, il tirait sur quelqu’un avec un revolver en pleine rue.
Si son vote est bien réparti dans les États clés, si l’économie tient le coup, si un troisième candidat venait siphonner des votes aux démocrates, et si les démocrates font des niaiseries, Trump peut encore gagner.
Danger
Regardez la course entre les candidats démocrates pour remporter l’investiture.
Je comprends que les candidats doivent d’abord séduire les militants du parti, mais il est beaucoup, beaucoup, beaucoup question de diversité, de racisme et d’écologie.
On dirait un débat sur un campus universitaire pour séduire des étudiants.
On peut à bon droit trouver que Joe Biden est un vieux politicien centriste traditionnel, mais ses principaux challengers pour le moment – Warren, Sanders et Harris – sont très, très à gauche sur l’échiquier politique américain.
Leurs propos plaisent aux activistes, aux jeunes et à l’électorat urbain et éduqué des grandes villes des deux côtes.
Mais ailleurs ? C’est dans le Midwest et auprès des électeurs blancs qui s’estiment, à tort ou à raison, laissés pour compte que Trump a construit sa victoire.
Des candidats démocrates évoquent notamment la possibilité d’envisager des « réparations financières » pour les descendants des esclaves.
Barack Obama avait jadis vu dans cette question, avec raison, une immense distraction qui se heurterait à des écueils pratiquement insurmontables : comment établir qui serait admissible en cette ère de métissage ?
Mais même si cette idée ne va nulle part, et elle n’ira nulle part, imaginez comment Trump pourrait l’exploiter pour faire passer le parti démocrate pour un repaire de gauchistes déconnectés du « vrai monde ».
C’est comme si le populisme de droite de Trump stimulait, par effet de réaction, un populisme de gauche.
Je vous donne un autre exemple.
À la Chambre des représentants, les démocrates sont divisés sur le lancement ou non d’une procédure de destitution du président.
Ce serait cependant le Sénat qui serait le jury, et il faudrait que les deux tiers des sénateurs votent en faveur de la mesure.
Les chances que cela se produise sont nulles s’il n’y a pas de nouvelles révélations.
Mais on entend déjà Trump chauffer sa base en disant : « Après Mueller et les méchants médias, voici une autre chasse aux sorcières ».
Pragmatisme
La morale de cette histoire est simple.
Les militants démocrates doivent résister à la tentation de se faire plaisir et de choisir le candidat qui coche toutes les bonnes cases de la rectitude politique.
Ils doivent choisir, très froidement, le mieux placé pour battre Trump, même si ce n’est pas le plus excitant sur le plan idéologique.