Éloge de la franchise

Québec 2007 - Parti libéral du Québec


Cette semaine, l'Institut économique de Montréal, un think tank que l'on peut qualifier de néolibéral sans abuser du terme, publiait un bilan peu flatteur de la performance fiscale du gouvernement Charest, surtout parce que les libéraux n'ont pas tenu leur promesse de baisser les impôts.
L'IEDM rappelle que le PLQ, en campagne électorale s'était engagé très clairement à réduire le fardeau fiscal d'un milliard par année. Après trois ans de présence au pouvoir, cela devrait donner trois milliards. L'Institut évalue plutôt les baisses à 626 millions.
Il n'y a rien là de bien révolutionnaire. C'est ce que vous avez pu lire dans cette chronique ou entendre de la bouche d'André Boisclair. Ce qui a surpris, c'est la réaction courroucée des porte-parole du gouvernement Charest, sans doute surpris d'être attaqués sur leur droite. " L'institut se discrédite avec un tel pamphlet ", a lancé le ministre des Finances, Michel Audet.
Ce qui a étonné encore plus, c'est que les libéraux persistent à affirmer qu'ils ont respecté leurs engagements fiscaux. " Les baisses d'impôts, pour nous, c'est 2,9 milliards ", a répondu la présidente du Conseil du trésor, Monique Jérôme-Forget. Ces 2,9 milliards sont une fiction, et je ne comprends pas pourquoi les libéraux s'y accrochent.
La différence entre les chiffres de l'IEDM et ceux du gouvernement tient à plusieurs éléments. Par exemple, s'il faut ou non définir l'indexation du régime fiscal comme une baisse d'impôt. L'IEDM affirme, avec raison, que non. Mais le gros du désaccord porte sur l'interprétation des mesures du premier vrai budget libéral, celui du ministre Yves Séguin.
En campagne électorale, le principal engagement libéral était limpide. " Le gouvernement du Parti libéral du Québec enclenchera, dès le dépôt de son premier budget, un plan de réduction de l'impôt des particuliers d'un milliard par année pendant cinq ans. " Cet objectif clair aurait permis de ramener le fardeau fiscal des Québécois à la moyenne canadienne.
Mais dès la prise du pouvoir, les libéraux ont " ouvert les livres " et " découvert " une situation financière difficile. Ils ont alors multiplié les messages pour préparer les esprits au fait qu'il ne serait pas possible de tenir promesse.
Cependant, malgré cette impasse, le premier budget, marqué par le populisme du ministre Séguin, contenait d'importantes mesures d'aide aux familles. C'est ce qui a permis au ministre de proclamer: " Avec ce budget, nous tenons notre promesse. J'annonce aujourd'hui que nous retournons un milliard de dollars dans les poches des contribuables. "
Il est vrai que le ministre Séguin retournait un milliard. Mais ce n'était pas, comme il le prétendait, " une réduction majeure du fardeau fiscal ". L'essentiel du cadeau était constitué d'un soutien aux enfants, sous forme de chèques trimestriels, un crédit d'impôt pour services de garde, lui aussi sous forme de chèques, une prime au travail. Ces mesures profitaient surtout aux familles à revenus faibles ou modestes qui, en général, ne paient pas d'impôt sur le revenu.
Quand le gouvernement envoie un chèque aux citoyens, ce n'est pas une baisse d'impôt, c'est une subvention. Et la distinction n'a rien de spécieux. La promesse libérale de baisser les impôts s'adressait clairement aux citoyens qui paient des impôts et qui pouvaient raisonnablement s'attendre à en payer moins. Elle ne signifiait certainement pas qu'un gouvernement libéral enverrait des chèques aux citoyens déjà exemptés d'impôt.
Le budget Séguin reposait sur son mensonge. Il a coûté cher au gouvernement Charest et certainement contribué à la chute de sa popularité. Ce sont les partisans des libéraux, déçus, qui sont alors allés rejoindre le rang des mécontents.
Ce qui est difficile à comprendre, c'est que le gouvernement Charest ait perpétué la fiction, longtemps après le salutaire départ de Yves Séguin. La vérité, c'est que le gouvernement n'avait pas la marge de manoeuvre pour baisser facilement les impôts, mais aussi qu'il n'a pas voulu sacrifier d'autres priorités, comme la réduction de la dette ou la santé, pour alléger le fardeau fiscal. Il n'a pas tenu promesse parce qu'il n'en avait pas les moyens, mais aussi par choix. Pourquoi ne pas le dire?
Il est certain que le fait de ne pas tenir une promesse importante n'est pas populaire, dans un contexte où les citoyens exigent bien plus de franchise de leurs élus. Mais un gouvernement qui n'a pas respecté ses engagements empirera sa situation s'il prétend le contraire. C'est, en quelque sorte, ajouter le mensonge à la trahison. Il serait beaucoup plus payant, pour les libéraux, de faire le pari de la candeur et de la transparence, de faire confiance à l'intelligence des gens et de dire les choses comme elles sont.


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