Du vent !

Vigile

Il y a de ces répliques usées auxquelles s’accrochent les chefs de partis, lorsqu’en difficulté durant une campagne électorale! Celles qu’a ressassées André Boisclair en Gaspésie pour commenter le dernier sondage de la maison CROP, entre dans ce lot infect.
Entendre le chef péquiste certifier que « le vent souffle en sa faveur », balayant ainsi du revers de la main l’enquête qui dévoile que son parti continue de perdre des appuis dans l’électorat, désole. Le leader du Parti québécois a ajouté être « dans la bonne direction, d’après ce qu’il voit sur le terrain. » Il a conclu « être très content de la façon dont les choses se déroulent en ce moment. » Toutes des répliques normalement servies aux médias par des chefs de parti en danger. Bref, la langue de bois consacrée en période de détresse politique…
Certes, le chef péquiste ne peut pas afficher publiquement son désarroi. Il porterait le coup de grâce à ses troupes déjà ébranlées. Le capitaine d’une équipe doit absolument exhiber sa foi inébranlable en ses moyens, contre vents et marées. Le commandant a intérêt à prouver qu’il n’a aucune crainte de « mourir » pour la cause, afin d’éviter la défection de ses effectifs. On ne peut donc reprocher à André Boisclair d’agir comme il le fait actuellement. Reste que le choix des formules auxquelles il a recours pour s’adresser aux médias n’a rien pour rassurer ses supporters.
André Boisclair a le nez dans le vent, lorsqu’il affirme qu’il sera à la tête d’un gouvernement majoritaire, le 27 mars prochain… Voilà une autre déclaration qui peut provoquer un effet tout à fait contraire à celui visé! C’est que personne n’est dupe au Québec : cette prédiction se base sur du vent! Si un gouvernement péquiste devait voir le jour au terme de la présente élection, il aura réussi ce tour de force grâce à une miraculeuse division des votes. Nombre de ses candidats auront alors été élus par des marges lilliputiennes. Le pourcentage total de suffrages qui aura permis au PQ de s’emparer du pouvoir sera anémique, si l’on se fie aux sondages qui s’accumulent depuis que les Québécois ont été conviés aux urnes. Surréaliste s’avère donc la prévision de monsieur Boisclair, comme en témoigne la tête que vous faites en lisant ces dernières lignes! Seul un gouvernement souverainiste minoritaire est présentement plausible, à moins d’un puissant bouleversement dans les intentions de votes. Le débat des chefs du 13 mars en est-il capable?
Au risque de me répéter, l’éventualité d’un gouvernement péquiste minoritaire ne serait pas une bonne nouvelle pour quiconque souhaite l’avènement rapide de la souveraineté. Défait par l’opposition suite à une tentative d’enclencher un processus référendaire, la fronde péquiste nuirait grandement à son article 1. Avec près de 60% des Québécois qui ne veulent pas de référendum en ce moment, selon le dernier coup de sonde de la firme CROP, une légère baisse des appuis à l’égard du projet indépendantiste a été enregistrée.
Le chef du Parti québécois a rappelé, lors de son passage au réseau de télévision TVA le 9 mars dernier, que Jacques Parizeau a organisé le référendum de 1995 malgré une forte opposition populaire et seulement 40% d’appui. On connaît la suite. André Boisclair estime pouvoir faire mieux puisque la souveraineté gravite actuellement à plus de 45%. Ce qu’il oublie néanmoins trop vite est qu’il s’agit d’un troisième référendum, pas d’un deuxième. L’homme a beau répéter que la prochaine consultation populaire s’avère la reprise du second, puisque victime de gestes frauduleux de la part du camp fédéraliste, les Québécois pensent malgré tout qu’ils en seront à leur troisième essai. Une tentative décisive, quoi qu’en pense le dirigeant du PQ. Visiblement, un gouvernement péquiste minoritaire doit écouter la sagesse populaire : il ne peut courir ce risque.
Ce n’est pas de gaîté de cœur que d’écrire ces lignes. C’est le réalisme qui m’y conduit. Loin de moi l’idée de vouloir chercher à diviser les troupes souverainistes ou de me réjouir de leurs tribulations. Il n’est pas question cependant de « serrer les rangs » en me fermant les yeux de manière à nier les écueils qui guettent un gouvernement péquiste minoritaire. Vaut mieux à ce compte voir le Parti libéral en former un. Son naufrage sera retentissant lorsqu’il sera défait par les deux partis d’opposition. Et c’est l’option fédéraliste qui en souffrira, pas la nôtre. Il sera cocasse de voir alors les milliards d’Ottawa attendre la formation d’un autre gouvernement à l’Assemblée nationale pour trouver preneur, et surtout d’assister au rejet du « fédéralisme d’ouverture » de Stephen Harper.
Le dernier sondage de la maison CROP a été mené avant que des députés adéquistes éclaboussent leur chef par leur déclaration douteuse. L’enquête n’a pu non plus jauger l’effet du passage d’André Boisclair à TVA. Elle a toutefois évalué celui qui provient de la prestation du chef péquiste à l’émission « Tout le monde en parle » de Radio-Canada, émission regardée par plus d’un million de personnes. Le dirigeant du Parti québécois y a relativement bien fait. Malgré tout, seulement 19% de Québécois juge qu’il est le plus apte à diriger le Québec, loin derrière ses deux principaux rivaux.
Le prochain coup de sonde montrera-t-il des résultats différents? L’ADQ aura-t-elle subi les contre-coups des frasques de certains de ses candidats? J’en doute. Mario Dumont jouit d’une brise favorable, celle qui ne semble pas vouloir s’essouffler, malgré tous les récifs qui se dressent sur son trajet. Le veinard est dans le vent: les Québécois veulent lui donner sa chance, fatigués de voir les deux autres partis sclérosés dans leur démarche constitutionnelle. Néanmoins, un grand nombre de Québécois ne croit pas que le projet autonomiste du chef adéquiste soit réalisable. La bourrasque qu’il soulèvera lors de son échec apportera cependant un vent de fraîcheur. Et c’est à ce moment que le camp souverainiste devra mettre toutes voiles dehors, ragaillardi d’une nouvelle démarche indépendantiste, un processus électoral qui invitera tous les partis progressistes à se liguer afin d’obtenir 50% + 1 des votes. Il sera alors possible, pour la première fois en plus de dix ans, d’avoir la chance de dire au gouvernement fédéral : du vent!
Patrice Boileau






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4 commentaires

  • Jean Pierre Bouchard Répondre

    12 mars 2007

    Un gouvernement péquiste minoritaire ne tiendrait pas de référendum, une évidence.
    D'autant que même avec un gouvernement majoritaire, l'équipe du PQ serait confronté à la difficulté même d'un troisième référendum perdant final pour très, très longtemps ou jamais plus. Il faut des années pour qu'un gouvernement PQ maj ou min (?) rétablisse une histoire québécoise véridique et non chloroformée dans les écoles, argumente sur des causes démographiques et culturelles déterminantes pas seulement économiques dans le but de faire du Québec un pays libre.
    Stratégiquement, il faudrait qu'un gouvernement du PQ fasse enfin de Télé Québec, l'équivalent de RDI afin de concurrencer cette boîte de propagande fédérale, cette chaîne autant informative que culturelle s'intéresserait essentiellement au Québec avec l'ajout d'un volet international qui serait strictement analytique. Les coûts de la chaîne seraient liés surtout à la production de téléjournaux couvrant toutes les régions mais disons particulièrement Montréal, Québec et aussi Gatineau qui colonisée par Ottawa a besoin de se "requébéciser" davantage.
    Tant que le PQ sera angélique en refusant d'investir et de transformer TQ en se foutant bien de la CONTROVERSE de nos médias existants hypocrites, les souverainistes vont se battre médiatiquement avec des fléchettes contre des tanks et des avions de chasse.
    Je suis conscient que prêt à voter PQ celui ci joue ces dernières parties de cartes s'il ne devient pas plus sérieux dans ses intentions.
    En attendant un gouvernement minoritaire péquiste pourrait donner une nouvelle chance à l'autonomie profitant de l'appui contraint adéquiste en espérant un échec rapide de pourparlers préliminaires avec les conservateurs mais la capacité de donner des "bonbons" d'Harper pourrait permettre à l'ADQ de se défiler devant ce qui devrait être une nouvelle crise du fédéralisme. Scénario parmi bien d'autres.
    En politique rien n'est sûr. L'inexpérience de Boisclair plongé dans le cadre minoritaire n'est probable pas la meilleure chose.
    Un gouvernement minoritaire PQ, une catastrophe? Si ce gouvernement à court terme fonctionne dans la gestion provinciale convaincante avec retenue en imitant Harper qui espère trouver un an plus tard sa majorité. Si le gouv PQ devient majoritaire après un an, il sera alors capable d'agir. Un gouvernement PQ minoritaire, ce n'est pas nécessairement l'apocalypse mais c'est vrai que cela peut être une expérience bien précaire.
    Ceci dit que ceux qui sont souverainistes votent pour le PQ. On ne créé pas un nouveau parti comme on construit une maison. QS électoralement surtout à Montréal fait le jeu des libéraux. Dans l'émission d'infoman, à la question posé à la candidate libérale dans mercier: que pensez vous de QS, la candidate à répondue; "oh je n'en pense rien". On comprend pourquoi! Puis si les nationalistes mous préfèrent l'ADQ c'est leur choix, ils sont assez nombreux (25-27%) pour faire mal aux libéraux et c'est pas si mal dans le contexte actuel.

  • Archives de Vigile Répondre

    12 mars 2007

    Le PQ nous avait promis un programme axé sur l'indépendance. On est pris encore une fois avec un programme axé sur la bonne gouvernance d'une province. Le PQ nous avait promis un projet de constitution. On nous sert un futur hypothétique référendum, sans nous donner la question.
    Vous ne trouvez pas qu'on a assez ri de nous autres et qu'on devrait penser à autre chose. Quelque chose comme un «Mouvement Indépendantiste québécois (MIQ), libre de tous les partis politiques, avec un chef qui a de l'allure. Pas seulement une façade. Si c'est ça, j'embarque.
    Sinon, je débarque. Nous sommes déjà des centaines de milliers à le faire. Désolé...André Boisclair!
    Nestor Turcotte
    Matane

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2007

    Effectivement un gouvernement PQ minoritaire n'est pas à souhaiter compte tenu de 4 facteurs importants qui auront un impact majeur sur ce gouvernement: 1.- Un chef incapable, non convaincu et désorienté ( Présumant l'élection de M. Boisclair )
    2.- Un nombre important d'ADQ dans l'opposition 3.- Un contexte politique où les coups bas du fédéral et ses alliés continueront et s'emplifieront 4.- Un référendum suicide.
    Ce qui serait idéal serait par contre un gouvernement minoritaire ADQ ( ce n'est plus hors de question )
    Mais stratégie mise de côté, ya en effet un vent déprimant qui souffle depuis la dernière course ( ça courrait pas vite )à la direction du PQ et on pourrait même dire depuis la démission de M. Landry. Ya en effet un besoin de se recentrer sur une autre stratégie que référendaire...l'important ce n'est pas de gagner des élections mais de faire l'indépendance...espérons que l'électrochoc d'une défaite amère du PQ fera passer le courant et nous redonnera des leaders digne de notre peuple et une stratégie intelligente s'il n'est pas trop tard.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2007

    La vision du PQ:
    "Notre projet de souveraineté, c’est aussi un pays à préparer. Nous avons identifié sept grands chantiers prioritaires : l’éducation, l’environnement, le développement économique, la santé, le développement des régions, la solidarité sociale et la saine gestion gouvernementale."
    Est-ce que je fais partie d'une minorité en pensant que la culture est le coeur de ma vision du projet de souveraineté?
    Comment puis-je me convaincre que la vision du projet de souveraineté du PQ est compatible avec la mienne lorsque le coeur n'y est pas?
    Pourquoi diable des citoyens d'une province souhaiteraient former un pays indépendant si ceux-ci n'ont pas une culture commune qui fait d'eux un peuple?
    Pourquoi le PQ est incappable de nommer, parler, mentionner, célébrer, défendre, éduquer, promouvoir, cette culture dans sa vision?