Martin Lettre – 20 février 2007
Le coup d’envoi de Israeli Apartheid Week 2007 ou Semaine de l’apartheid israélien 2007 a été donné pour la troisième année d’affilée lundi 12 février à l’Université Ryerson. L’événement a lieu simultanément à Montréal, Ottawa, Hamilton, Oxford, Cambridge, Londres et New York.
L’édition torontoise consiste en une série de conférences et projections de films qui font le lien entre trois formes de marginalisation de populations, soit le traitement fait par le Canada à ses Autochtones, le traitement fait par les Européens de l’Afrique du Sud de l’apartheid aux non-Européens et le traitement fait par les Israéliens aux non-Juifs.
L’événement met au jour la nature de populations accueillantes qui, dans un premier temps, ont facilité l’implantation des dominants européens en raison du manque de méfiance envers la mentalité européenne axée sur la possession du sol alors que les populations dominées ne possédaient pas de concept aussi marqué de territorialité.
Cette aide à l’établissement a été reconnue par Golda Meir, premier ministre d’Israël de 1969 à 1974, elle-même.
Le système de mise à l’écart canadien de populations jugées indésirables et isolées dans des réserves a été étudié par des Israéliens en Colombie-Britannique en 1966. Le principe consiste en l’appropriation de terres, suivi du déplacement des populations qui s’y trouvent dans des réserves destinées à cette fin au Canada, dans des bantoustans en Afrique du Sud, ou dans des zones encerclées et dissimulées du regard des Israéliens en Palestine.
D’aucuns considèrent que la guerre que le Canada mène contre les Premières Nations se poursuit en 2007 en dépit de l’entente de réconciliation et compensation. De nombreuses femmes autochtones, souvent prises dans l’engrenage de l’industrie du sexe et déconsidérées par les corps policiers et tribunaux en raison de ce double stigmate, sont assassinées sans qu’une enquête approfondie soit effectuée.
Les plaies morales laissées par les pensionnats pour Autochtones où l’on a humilié et tenté de «déculturer» des Autochtones ne sont pas près de se refermer. Aujourd’hui, les pourparlers portent sur la moisissure qui détruit les maisons et l’eau qu’il faut bouillir parce que le riche État canadien tolère des conditions dignes du tiers-monde sur son propre territoire.
Au début du XXe siècle on intente des procès pour participation à des cérémonies dansées au Canada. L’État canadien confisque les ossements dans les cimetières, voire tout objet à valeur sacrée pour l’autre que l’on méprise et souhaite faire disparaître. On destitue l’autre de son identité. Les autochtones du Canada souhaitent exprimer leur reconnaissance envers les ONG palestiniennes canadiennes qui sont les seules à les inviter à prendre la parole à leurs événements.
Pour Israël, les travaux actuels destinés à explorer le sous-sol de l’Esplanade des Mosquées pour y trouver les restes d’un temple juif qui légitimeraient aux yeux des Israéliens une annexion de cet espace considéré territoire occupé sont de toute première importance. Israël a pourtant, selon l’ONU, l’obligation de protéger les lieux saints.
De la même manière que le Canada a créé les Conseils de bande pour avoir un interlocuteur valable lors des négociations avec les autochtones, Israël a son Abou Masen soutenu par la CIA et le Mossad, et cherche à marginaliser par tous les moyens le Hamas, parti qui serait réélu si des élections avaient lieu aujourd’hui, en dépit des sanctions qui affament les Palestiniens, dont les habitants de Gaza qui sont réduits à un repas par jour.
Le Canada a été le premier pays, avant Israël, à couper les vivres aux Palestiniens. La vieille recette qui consiste à diviser pour régner fonctionne toujours. Le régime sud-africain de l’apartheid n’a-t-il pas institutionnalisé le système à trois vitesses: blanc, de couleur, noir, pour donner des miettes de privilèges aux Asiatiques à la peau moins pigmentée que les Africains afin de dresser l’un contre l’autre?
C’est ce type de déchirement interne que les Israéliens observent avec satisfaction entre le Fatah corrompu et le Hamas populaire.
Idem au Canada avec le capharnaüm des Indiens à statut, des Indiens sans statut, des Indiens en réserve, des Indiens hors réserve, des Métis et tutti quanti. Le plan directeur des bantoustans sud-africains de l’apartheid a pris pour modèle le système canadien des réserves indiennes.
Les dirigeants de l’Afrique du Sud de l’apartheid n’ont jamais caché leur admiration pour le traitement israélien de ses populations non juives et Israël ne protestait pas de l’amalgame que ceux-ci faisaient entre le régime de l’apartheid et le leur. L’État d’Israël et l’apartheid d’Afrique du Sud ont tous deux été fondés en mai 1948.
Aujourd’hui, la thèse des deux États domine en Palestine. Cependant, une nouvelle thèse se fait jour depuis peu qui préconise le maintien de l’État unique actuel avec un statut égal pour tous, l’abolition des murs et barbelés de séparation, une citoyenneté identique pour tous sans égard à la religion, et le retour des exilés de 1948, ou la compensation financière pour ceux qui ne souhaiteraient pas se prévaloir de ce privilège.
Israël, qui cherche désespérément à attirer des Juifs de partout dans le monde, est parfaitement en mesure de les recevoir une fois aboli le système de l’apartheid israélien.
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