Le cas Michaud

Des excuses s.v.p.

Est-il exagéré de demander aux députés compromis par le vote nominal unanime moins un de l'époque et qui siègent encore à l'Assemblée nationale de s'excuser auprès d'Yves Michaud?

Affaire Michaud 2000-2011

Peut-être ai-je été distrait! Il me semble que personne de BV, 10 ans après l'évènement, n'est revenu sur le cas Michaud. Je présidais la Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec devant laquelle, prétendument, Yves Michaud avait émis des "propos inacceptables à l'égard des communautés ethniques et , en particulier, à l'égard de la communauté juive" pour reprendre le mot à mot de la résolution le condamnant. J'étais donc un acteur. Je déclare, ici, mon intérêt.
Comme bien du monde, y compris Yves Michaud je crois, c'est en regardant les informations en soirée que j'apprends que pour des propos dont je n'avais absolument aucun souvenir l'Assemblée nationale avait condamné un des témoins qui s'était présenté devant nous dans la journée. Je passe un appel au secrétaire de la Commission à qui j'apprenais la nouvelle. Il en était tout aussi surpris. D'autant plus que nous nous souvenions d'avoir entendu le témoin en question professer des propos très exactement à l'opposé de ceux qu'on lui reprochait. Textuellement il avait cité le Chanoine Groulx "qui nous invitait à posséder, comme les Juifs, leur âpre volonté de survivance, leur invincible esprit de solidarité, leur impérissable armature morale".
C'est le lendemain que nous avons découvert qu'il y avait eu invention pure et simple d'une situation qui ne s'était jamais produite devant nous et qui, à l'initiative de Jean Charest, alors chef de l'opposition, entérinée par Lucien Bouchard, chef du gouvernement, avait conduit l'Assemblée nationale à poser le geste totalement inédit de condamner un citoyen pour délit d'opinion.
10 ans après le fait, l'historien Gaston Deschênes, qui à l'époque était chef du Service de recherche et directeur des Études documentaires de l'Assemblée nationale, publie aux Éditions Septentrion, L'affaire Michaud. Chronique d'une exécution parlementaire. Fulgurant de clarté. Une injustice colossale a été commise à l'endroit du citoyen Michaud.
Premièrement les propos qu'on lui prête n'ont jamais existé. On n'en retrouve aucune trace dans les verbatims de la Commission, ni dans ses écrits, ni ailleurs.
Deuxièmement, aucune législature en 215 ans de parlementarisme britannique et en 210 ans de parlementarisme québécois (après Londres c'est au Québec que fut créé le deuxième parlement au monde), n'a condamné un citoyen pour délit d'opinion. C'est la responsabilité des tribunaux de le faire quand il y a matière. Il est arrivé que des législatures aient sévi contre des citoyens qui avaient remis en cause les prérogatives, l'intégrité ou le fonctionnement des parlementaires ou de l'institution.
Troisièment, la condamnation est venue en contravention aux règles minimales d'audition et de défense: aucune enquête ni vérification des faits, aucune convocation ni audition de l'intimé et dans une précipitation que seuls les tribunaux chinois de l'époque de la Bande des Quatre ont peut-être battue.
À la lumière des faits fabuleusement exposés par l'historien Gaston Deschênes il faut constater que l'Assemblée nationale s'est payé une magistrale bavure qu'elle n'a jamais voulu réparer. Yves Michaud y a renoncé. En lieu et place il exige qu'au moins l'Assemblée nationale se mette à l'abri de la récidive en ajoutant à son code de fonctionnement la provision qui interdirait explicitement la pratique fautive.
Est-il exagéré de demander aux députés compromis par le vote nominal unanime moins un de l'époque et qui siègent encore à l'Assemblée nationale de s'excuser auprès d'Yves Michaud? Simplement. Comme l'ont fait leurs ex-collègues Charbonneau, Landry et Facal. Louise Beaudoin qui siège encore l'a fait également. Ce faisant l'Assemblée nationale regagnerait quelque peu en dignité. Denrée qui sous la gouvernance de Jean Charest s'est singulièrement raréfiée ces dernières années.
par Gérald Larose


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