Boisclair

Des démissionnaires répliquent

Actualité québécoise - vers une « insurrection électorale »?



Certains des démissionnaires péquistes de juin n’ont pas du tout apprécié les propos tenus par l’ex-chef André Boisclair, dénonçant en particulier les “égos” de ceux qui critiquent Pauline Marois. Il a fait ces déclarations lors d’une entrevue avec Jean-Luc Mongrain passée inaperçue mais relayée sur ce blogue.


Le député démissionnaire Pierre Curzi a été en particulier pris à partie par M. Boisclair, qui lui a reproché de n’avoir “en tête” que la direction du PQ et a dit de l’ancien acteur qu’il “est heureux sur scène lorsqu’il est tout seul”.
Pierre Curzi a répondu ce qui suit:
Le combat est inévitable en politique mais le mépris et la réduction sont démobilisants. Pour ma part, j’ai tenté de ne pas personaliser mon départ du caucus parce que je crois que les structures conditionnent les comportements et qu’il est nécessaire de les critiquer pour espérer les transformer.
Par ailleurs, toutes les actrices et tous les acteurs savent que le succès dépend du travail de la troupe et que,sans cet effort collectif, aucun “ego” n’est satisfait.

L’ex-député Camil Bouchard, qui n’était pas visé par M. Boisclair mais qui s’est solidarisé avec les démissionnaires de juin, nous a transmis ce petit texte, auquel souscrit aussi Louise Beaudoin:

Cher Jean-François

Le propos d’André Boisclair concernant Pierre Curzi me laissent pantois. Au baromètre des gros égos dont il affuble Curzi, Boisclair a-t-il pris soin de mesurer le sien? Il m’apparaît bien cocasse que cette accusation vienne de lui. On vit tous dans une maison de verre.Ce qui me laisse perplexe, c’est aussi le fait que tu prennes le soin de signaler cette intervention de Boisclair sans aucune analyse critique de ta part. Curzi a clairement exprimé les raisons de son départ: il ne pouvait tolérer l’attaque fait par le PQ qui bafouait par son projet de loi 204 le droit fondamental de citoyens à contester un contrat municipal devant la Cour.
Il aurait été plus intéressant, il me semble, de rappeler cela et de faire une analyse critique de cette prise de position de Curzi que de relayer sans mot dire une opinion méprisante à l’égard de ce dernier. Cela laisse un goût suspect.
Camil, Louise

Vous le savez, chers internautes, le blogueur adore le courrier, donc il se fait fort de répondre:
Chers Camil et Louise,
J’ai longuement exprimé, dans ce blogue, mon opinion sur les démissionnaires de juin, (Voir Chères Louise et Lisette, cher Pierre). Je sympathise avec plusieurs des arguments qu’ils avancent, mais je juge qu’ils auraient dû mener leurs combats en restant au PQ plutôt qu’en le quittant avec fracas.
Vous avez raison d’indiquer que je n’ai fait aucune analyse critique de l’intervention d’André. Je n’ai ni critiqué, ni endossé ses propos. Comme je le fais occasionnellement, j’ai relayé sur ce blogue une information qui avait échappé aux autres médias et que je considérais intéressante: la première sortie partisane d’André Boisclair. Mon réflexe a été strictement journalistique.
Mais je suis toujours heureux de donner mon opinion et la voici sur les deux sujets que vous soulevez: la sortie d’André, la démission de Pierre.
Sur le fond, je juge qu’André a raison de dire que le capital accumulé dans le Parti québécois — l’institution, l’histoire, les gens — a été traité cavalièrement ces derniers mois par plusieurs élus et militants démissionnaires qui ont ainsi mis à mal le principal véhicule de progrès économique, social et national québécois. Des gestes lourds de conséquence et ayant peut-être causé – il est trop tôt pour le dire – un tort irréparable. Je juge comme André que les démissionnaire (pas toi, Camil) n’ont pas correctement mis en balance, d’une part, leurs très légitimes griefs et, d’autre part, l’impact du moyen utilisé pour les exprimer sur le capital collectif que représente le PQ.
Pour parler spécifiquement de la décision de Pierre de quitter le PQ au lendemain d’un congrès où ses thèses linguistiques avaient triomphé, il a effectivement invoqué l’incapacité qu’il avait de voter pour le projet de loi 204. Il a repris cette raison, entre toutes, dans une récente entrevue aux Francs-Tireurs.
Le problème avec cet argument est que, une heure avant sa démission, Pierre recevait de Mme Marois un appel l’informant qu’il n’avait pas à voter pour ce projet de loi. Elle avait cédé à sa demande d’exercer sa dissidence. Pierre était parfaitement libre de rester dans le caucus et de ne pas voter, ou de pousser encore plus loin en exprimant publiquement sa dissidence et en votant contre le projet le jour où il serait soumis au vote… trois mois plus tard. Il a donc démissionné pour ne pas être obligé de voter pour un projet qu’il n’avait plus l’obligation d’appuyer.
J’en viens maintenant aux autres aspects de l’entrevue d’André. Ses propos sur les égos, sur les nobodies sont certes divertissants, mais ils sont excessifs et ne sont pas au niveau que devrait rechercher un ancien chef du PQ. Ils sont surtout contreproductifs et ne permettent aucunement d’imaginer ou de préparer, pour demain ou après demain, un point de rassemblement pour tous les souverainistes, y compris les démissionnaires, ou une relance de l’outil que nous a légués René Lévesque et dont le Québec, j’en suis convaincu, ne peut simplement pas se passer.
Bien amicalement,
Jean-François

Squared

Jean-François Lisée297 articles

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Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.

Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.





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