Contre le paternalisme

Gouvernement Charest minoritaire



Il y a toutes sortes de façons d'encourager l'avancement des femmes en politique: il y a le paternalisme, dont le chef libéral fédéral Stéphane Dion vient de nous fournir un bon exemple, et il y a la voie droite et franche qui repose non pas sur la complaisance, mais sur la simple reconnaissance du mérite - c'est la voie qu'a choisie le premier ministre Charest.
Que le nouveau cabinet Charest soit composé à parité de femmes - et surtout que ces dernières héritent de très grandes responsabilités - représente plus qu'un bon coup de stratégie politique. C'est l'affirmation tranquille du fait que les femmes sont aussi compétentes que les hommes. Pas plus, mais pas moins non plus.
"Cela devra être un précédent, le critère selon lequel les gouvernements devront maintenant être jugés", clament déjà les féministes officielles. Pas du tout. Il se pourrait fort bien, dans l'avenir, que les prochains cabinets soient majoritairement masculins, ou, pourquoi pas, majoritairement féminins. L'important, c'est que les élus soient compétents. Le sexe est un élément absolument secondaire et ne devrait jamais constituer le critère premier des nominations.
J'ai toujours été portée à penser que de tous les premiers ministres qui se sont succédé à Québec, Jean Charest est de loin le moins sexiste, le plus spontanément ouvert aux femmes. Il vient de le prouver éloquemment. Ses prédécesseurs devaient faire un effort pour voir les femmes sur le même pied que les hommes. Chez M. Charest, c'est un réflexe naturel. Question de génération peut-être.
Tout autre est la démarche de Stéphane Dion. Il veut - question de principe - que le tiers de ses futurs candidats soient des femmes. C'est une attitude beaucoup trop rigide, qui sort en droite ligne du petit catéchisme des années 80. L'important est la qualité des individus, ce qu'ils apportent à la vie publique.
Le mois dernier, le chef du PLC a imposé d'autorité la candidature de Martha Hall-Findlay dans la circonscription de Willowdale, permettant à cette dernière d'échapper à la lutte pour l'investiture à laquelle d'autres candidats défaits au leadership du PLC devront se plier. Mme Hall-Findlay aurait-elle plus d'envergure que MM. Rae ou Kennedy, qui ont recueilli beaucoup plus de votes qu'elle au leadership mais qui, eux, devront jouer des coudes pour se faire élire par des militants souvent peu enclins à accueillir des personnalités "parachutées"?
Pourquoi ce traitement de faveur? Il n'y a que deux hypothèses: soit M. Dion considère que les femmes ne peuvent pas faire leur chemin toutes seules, soit il a tout simplement voulu, dans la bonne vieille tradition partisane, faire une fleur à celle qui avait été la première à se rallier à son camp lors du congrès de leadership
Bienvenue dans le XXIe siècle. L'"homme fort" du gouvernement Charest sera une femme, Monique Jérôme-Forget. Une nomination bien méritée, due à son indomptable énergie et à ses capacités intellectuelles.
Cela dit, le nouveau cabinet Charest compte plus que sa part d'incongruités. Le pire est certainement d'avoir jeté la grenade explosive des "accommodements raisonnables" dans les bras d'une jeune députée de peu d'expérience, et issue de l'immigration. Yolande James devait entrer au cabinet, mais pourquoi lui confier un dossier où elle se trouvera injustement exposée? Pourquoi la ghettoïser en la renvoyant à ses origines, comme si seule une personne provenant des communautés culturelles pouvait s'occuper des communautés culturelles? C'est à un "pure laine" qu'il fallait confier la tâche de mener le Québec sur la voie d'une plus grande tolérance.
Autre anomalie: pourquoi la Famille à Michelle Courchesne, déjà lestée de l'énorme ministère de l'Éducation? Et pourquoi réserver tout un ministère aux "aînés", dont la responsabilité aurait très bien pu s'allier avec la Famille?
Pour ne parler que des nominations féminines, on se demande aussi pourquoi Fatima Houda-Pepin, une parlementaire d'expérience dont les positions ont toujours été fort équilibrées, reste exclue du cabinet. N'était-il pas temps que le Québec ait une ministre d'origine maghrébine et de foi musulmane?
Mais il faut dire que si l'on parle d'incongruités, c'est l'Action démocratique du Québec qui remporte le championnat! Mario Dumont a 41 députés et il confie des postes à tout son monde! Trente-neuf députés seront critiques parlementaires, le 40e étant leader parlementaire (le 41e, c'est Mario Dumont). Cette pléthore loufoque de nominations présage-t-elle un conseil des ministres adéquiste de 41 membres?


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