Le diagnostic du docteur Barrette, basé sur des fondements biaisés, est sans équivoque en statuant que les CLSC sont un échec. Il n’a pas tout à fait tort, mais il omet de dire que les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas voulu en faire un véritable succès, car ils refusaient d’affronter les puissants médecins sur le front de leur rémunération.
Ce n’est un secret pour personne, le ministre, alors qu’il était médecin, se décrivait comme un entrepreneur privé qui n’avait pas à être soumis aux obligations des salariés du monde de la santé. Il fallait l’entendre dans la saga entourant la charte sur la laïcité où il courrouçait le gouvernement péquiste d’avoir pensé étendre les dispositions de sa loi à ce médecin entrepreneur, leur rappelant qu’il n’était pas un simple salarié.
Il était prévisible que les CLSC peineraient à attirer des médecins avec un régime apparenté au salariat. Il était tout aussi prévisible que ces CLSC s’accommoderaient difficilement du régime de rémunération à l’acte qui ne cadre pas avec l’approche holistique de la santé privilégiée par leurs créateurs.
Nous avons un système de santé où nos médecins sont parmi les mieux payés au monde. En fait le troisième après les États-Unis et la Suisse. Malgré ces rémunérations faramineuses, nous souffrons d’une piètre performance dans l’accès aux soins et plusieurs vont jusqu’à interroger la qualité.
En France, dans l’heure qui suit un appel à un médecin, il en débarque un à domicile. Au Royaume-Uni, en moins de 24 heures vous pouvez avoir un rendez-vous dans une clinique médicale avec un médecin. Chez nous, il subsiste une majorité de populations qui n’a pas de médecin de famille et qui devra attendre des mois pour obtenir un rendez-vous.
Un régime par capitation comme l’Angleterre ou la Norvège, où les médecins de famille verraient leur rémunération fondée sur un segment de population pris en charge et suivi adéquatement, aurait favorisé la migration de ceux-ci vers les CLSC. Malheureusement en politique, il faut ménager le chou et la chèvre et l’on conserve les vestiges précédents, créant du coup ses soucis pour l’avenir.
Le ministre actuel ne remettra jamais en cause le mode de rémunération à l’acte car il est entrepreneur avant d’être médecin. Le «cash» est trop important pour qu’il ose penser à un mode qui risquerait de lui en mettre moins dans les poches, même si cela devait être plus efficient pour le citoyen. Il préfère imposer une mort lente aux CLSC en les saignant graduellement de leurs ressources médicales et professionnelles vers ses fameux groupes de médecine familiale.
Ainsi, la vache sacrée s’éteindra sans trop s’en rendre compte pendant que le ministre installe une pratique de plus en plus privée des soins de santé profitables aux médecins. Ils pourront effectivement facturer des frais accessoires et des frais administratifs pour gérer les ressources professionnelles fournies par l’État, ces frais s’ajoutant à une rémunération que plusieurs citoyens qualifient déjà d’exagérée.
Il en coûtera plus cher aux citoyens pour nourrir cette nouvelle bête, alors que la prévention passe par-dessus bord et que le curatif devient roi.
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