Alors qu’un groupe américain et un groupe chinois achètent le Cirque du Soleil, une autre transaction est passée relativement inaperçue dans les nouvelles : la compagnie chinoise Ninebot a acheté Segway, basée au New Hamshire.
Segway, c’est cette plateforme mobile en forme de vieille tondeuse à gazon qui sert à se déplacer debout. La nouvelle ne serait pas très originale si ce n’était d’un détail important : Ninebot est une compagnie qui fabrique des Segway contrefaits.
En d’autres termes, un tricheur vient de vaincre un honnête entrepreneur.
Quel lien entre les deux transactions ? Aucune en apparence. Les acheteurs du Cirque du Soleil ne sont en aucune façon des tricheurs, sauf preuve du contraire.
Un problème mondial
Plus profondément cependant, Segway et le Cirque du Soleil sont victimes d’un vaste mouvement mondial de concentration de la propriété dans tous les domaines. Cette concentration est très inquiétante.
Premièrement, elle accentue l’inégalité de la répartition des richesses. Les dividendes de ces entreprises seront désormais versés aux nouveaux propriétaires. C’est autant d’argent qui quittera les endroits où les anciens propriétaires de ces entreprises étaient implantées.
Deuxièmement, la logique de maximisation des profits exigée par les fonds d’investissements va souvent à l’encontre de la logique de croissance des entreprises dont ils sont propriétaires. Les rationalisations peuvent facilement éteindre le dynamisme des entreprises, notamment en surchargeant de travail les employés qui demeureront à leur emploi.
Troisièmement, les petites économies, comme celles du Québec ou même du Canada, ne peuvent pas résister à long terme à ce mouvement de concentration. Sauf si elles adoptent des mesures pour se protéger.
Du protectionnisme ?
S’agit-il de mesures protectionnistes ? Mais oui, il faut lâcher le mot. Il faut surtout se souvenir que des pays comme les États-Unis et l’Allemagne ont été très protectionnistes jusqu’au début du 2Oième siècle. Il faut comprendre que la plupart des pays d’Asie pratiquent un protectionnisme très puissant, à travers diverses mesures non-tarifaires.
Ni le protectionnisme, ni le libre-échange ne doivent être conçus comme des religions. La question qui se pose consiste à savoir si notre économie retire autant d’avantages qu’auparavant des politiques libre-échangistes. Peut-être que non.
Quelles solutions ?
La fuite des sièges sociaux de nos entreprises devrait nous inciter à réfléchir à la question. Il est peut-être temps de revenir à un peu de protectionnisme. Ce protectionnisme pourrait cependant prendre des formes plus modernes qu’autrefois. Par-exemple, en exigeant que les acheteurs aient des politiques d’actionnariat socialement responsables (fondées sur le développement des entreprises à long terme, sur le respect de l’environnement, etc.)
Il n’est pas normal que des étrangers puissent acheter aussi facilement des entreprises d’ici. Il n’est pas normal qu’un tricheur achète Segway. Il n’est pas normal que nos dirigeants baissent les bras et invoquent avec résignation la nature privée de telles transactions.
Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans les règles commerciales internationales actuelles. Il est grand temps d’y réfléchir et de trouver des solutions constructives.
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