Le gouvernement Couillard justifie les hausses de rémunération consenties aux médecins spécialistes en disant qu’il est lié par sa signature de 2007.
Indéniablement, s’il reniait sa signature, il serait poursuivi en cour et perdrait sans doute.
La vraie erreur a été commise il y a 11 ans, quand le gouvernement Charest a consenti à une opération de rattrapage dont la société québécoise avait difficilement les moyens.
Philippe Couillard était ministre de la Santé et Gaétan Barrette était le chef syndical des spécialistes.
Les imaginez-vous disant aujourd’hui que ce qu’ils trouvaient justifié à l’époque est soudainement devenu injustifié ? Franchement...
Pouvoir
Le vrai fond de l’affaire, c’est que le rapport de force favorise outrageusement les spécialistes.
D’abord, on peut bien claironner que les Québécois sont fâchés contre eux.
Mais quel Québécois n’est pas fier de dire que son fils a été admis en médecine ou que sa fille est cardiologue ? Tout le voisinage finira par le savoir.
Quoi que l’on dise, la profession médicale, surtout les spécialistes, jouit d’un immense prestige, même s’il n’est plus ce qu’il était, à un moment où les politiciens n’ont jamais été aussi méprisés.
La deuxième source du pouvoir médical tient au fait que le médecin contrôle les deux étapes clés du processus thérapeutique.
C’est lui seul qui accepte un rendez-vous et pose le diagnostic. Tout part de là et aucun autre professionnel n’a un mot à dire.
Ensuite, c’est lui seul qui décide comment on va vous soigner. Et tout le système va se mettre à sa remorque.
Imaginez les moyens de pression à leur disposition s’ils se fâchent.
La troisième source du pouvoir médical tient au paiement à l’acte.
Dans un système entièrement privé, il y aurait des gens qui voudraient négocier le prix, il y aurait occasionnellement de mauvais payeurs, des comptes en souffrance à relancer, etc.
Dans un système entièrement public, le médecin serait un fonctionnaire : son salaire serait fixe et versé par l’État.
Au Québec, le spécialiste payé à l’acte combine le meilleur des deux systèmes.
S’il veut faire plus d’argent, il n’a qu’à multiplier les actes, dont beaucoup sont d’une utilité douteuse.
Mais il n’a pas à pourchasser le patient avec sa facture. C’est l’État qui garantit le paiement.
Il combine la liberté de l’entrepreneur et la sécurité du fonctionnaire.
Ayoye !
Le vrai débat de fond que le Québec n’a jamais fait, c’est celui des effets pervers du paiement à l’acte.
Depuis 1970, que le gouvernement ait été libéral ou péquiste, il n’a jamais remporté une épreuve de force face aux médecins. Jamais...
C’est simple : le gouvernement a les bijoux de famille dans une pince et devinez qui tient la pince...