Avant de sauter aux conclusions...

Quebecor - Le Journal de Montréal - un conflit qui s'étire en "modèle d'affaire"...


Yves-Thomas Dorval - Président du Conseil du patronat du Québec
Monsieur Michel David, je crois important de [réagir à votre article du 3 février ->34703] qui faisait référence à mon intervention lors des audiences de la Commission de l'économie et du travail portant sur les dispositions anti-briseurs de grève. Vous n'êtes pas sans savoir que, depuis mon entrée en fonction il y a deux ans à la présidence du Conseil du patronat, j'ai toujours cherché à baser mes interventions sur une argumentation solide, rationnelle et pragmatique, tout comme j'ai constamment tenté de participer de façon constructive et posée au débat public.
Si j'ai fait preuve de plus de vigueur que d'habitude lors de cette dernière intervention — et non de hargne, comme vous le dites —, c'était pour réagir de façon marquée à la foule de préjugés qui sont présentement véhiculés autour de cet enjeu très important que représentent pour le Québec les dispositions portant sur les travailleurs de remplacement.
Dans ce dossier, comme dans tous les autres, les décisions doivent être prises sur la base de faits incontestables. Comme en fait foi le mémoire très élaboré que le Conseil du patronat a déposé à la Commission, il ne manque pas de faits pour étayer notre argumentation voulant que les dispositions anti-travailleurs de remplacement aient atteint un de leurs objectifs initiaux de contrer la violence sur piquets de grève. Nous démontrons toutefois, études à l'appui, qu'elles s'avèrent aujourd'hui néfastes pour l'économie du Québec — autant le Québec des employeurs que celui des travailleurs — en réduisant les investissements et en empêchant la création de dizaines de milliers d'emplois.
Contrairement aux prétentions de certains, ces dispositions, pratiquement uniques en Amérique du Nord, n'améliorent pas les relations du travail, mais contribuent plutôt à les aggraver en augmentant la probabilité des arrêts de travail ainsi que leur durée. Une des six études auxquelles nous faisons référence à ce sujet dans notre mémoire est un document produit en 2006 par le Programme du travail de Ressources humaines et Développement social Canada.
Ce rapport démontre clairement qu'en dépit des dispositions anti-travailleurs de remplacement, le ratio des arrêts de travail par rapport au nombre total de travailleurs est nettement plus élevé au Québec (0,25 arrêt de travail/10 000 travailleurs) qu'en Ontario (0,12 arrêt de travail/10 000 travailleurs) ou que dans la juridiction fédérale (0,05 arrêt de travail/10 000 travailleurs). Les auteurs du document concluent qu'il n'y a donc pas de preuve indiquant que la législation sur les travailleurs de remplacement réduise le nombre d'arrêts de travail.
Qu'en est-il par ailleurs de l'urgence de renforcer ces dispositions? Comme l'a précisé lors des audiences la présidente de la CSN, Mme Claudette Carbonneau — contribution marquante à laquelle vous ne faites d'ailleurs pas référence dans votre article —, plus de 98 % des négociations répertoriées par son syndicat se règlent présentement sans conflit de travail. Jamais en 40 ans le Québec n'a connu une telle paix dans le domaine des relations de travail! Pourquoi tenterions-nous de réparer ce qui fonctionne déjà alors que nous avons tous tant à faire pour assurer une meilleure prospérité au Québec?
Le sujet des travailleurs de remplacement vous tient à coeur et vous avez droit à votre opinion. Avant de conclure toutefois que l'argumentation du Conseil du patronat repose sur un sophisme, je vous invite à prendre connaissance de tous les éléments qui la composent et à réagir objectivement aux nombreux faits sur la base desquels elle est élaborée.
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Yves-Thomas Dorval - Président du Conseil du patronat du Québec


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