Philippe Couillard nie avoir sacrifié son ex-ministre de l’Économie, Jacques Daoust, dans la foulée de la vente des actions de RONA, comme ce dernier le laisse entendre dans un document rédigé avant son décès.
Dans des écrits révélés par notre Bureau d’enquête qui s’apparentent à un testament politique, M. Daoust laisse entendre qu’il a été trahi et piégé par son propre directeur de cabinet, Pierre Ouellet, et par le chef de cabinet de Philippe Couillard à l’époque, Jean-Louis Dufresne.
Talonné par les partis d’opposition à la période des questions, le premier ministre a répété que les démarches menées par la vérificatrice générale dans la foulée de la vente des actions de RONA au géant américain Lowes ont, selon lui, déjà permis d’établir les faits.
Couillard contredit Daoust
Au Salon bleu, M. Couillard a soutenu que, contrairement à ce qu’affirme M. Daoust dans le document, «personne à [son] cabinet n’était au courant de cette transaction-là».
Le premier ministre a rappelé qu’au plus fort de l’affaire RONA, les partis d’opposition «ont sali la réputation du regretté Jacques Daoust».
«Je n’aurais pas assez de cinq minutes pour faire la liste des insultes [que les partis d’opposition ont lancées contre M. Daoust]», a dit M. Couillard, en observant que ses rivaux avaient soudainement changé leur fusil d’épaule.
À l’instar de sa ministre de l’Économie Dominique Anglade, le chef libéral a souligné que la transaction entre Lowes et RONA s’était faite avec le consentement du conseil d’administration des deux entreprises.
Couillard doit reconnaître sa responsabilité, selon le PQ
Les partis d’opposition n’ont pas manqué, mercredi, d'exprimer leur indignation devant les révélations faites par Jacques Daoust dans le document obtenu par notre Bureau d’enquête.
«Ce qu'il faut retenir, c'est que le premier ministre du Québec ne croyait pas qu'une entreprise stratégique comme RONA devait avoir son siège social détenu par des Québécois», a déploré en point de presse le chef péquiste Jean-François Lisée.
«Ce que j'apprends, moi, ce matin, dans le testament, c'est qu'il [M. Daoust] était opposé à la vente des actions d'Investissement Québec dans RONA, a encore dit M. Lisée. [...] Alors, qu'il [M. Couillard] prenne la responsabilité de la perte d'un siège social important.»
«Odieux», «manque de courage», «lâcheté»: le leader parlementaire caquiste François Bonnardel n’a pas mâché ses mots pour qualifier le comportement du premier ministre et de son entourage, à la lumière du récit de M. Daoust.
«Le cabinet du premier ministre a demandé à un ministre de mentir à la population, a dit M. Bonnardel. Lui-même [M. Daoust] le disait: “Je ne veux pas mentir.” [...] Il a été sacrifié. [...] Si ce n’est pas un manque de courage, c’est quoi?»
Khadir peu surpris
«Je me demande combien d’autres mensonges le bureau du premier ministre a fait avaler à d’autres ministres, a indiqué à son tour le député de Québec solidaire Amir Khadir. C’est un terrible désaveu, ça, et ça montre tous les problèmes d’un gouvernement où les décisions sont concentrées dans le bureau de Philippe Couillard.»
M. Khadir s’est dit attristé, mais peu surpris des révélations de notre Bureau d’enquête, puisqu’elles correspondent à ce que M. Daoust lui avait raconté en privé, après son départ de la vie politique.
«Il continuait à maintenir qu’il n’avait pas menti, qu’on l’avait fait paraître pour un pas bon, parce que lui était opposé à cette vente. Il le disait à qui mieux mieux, à tout le monde», a dit M. Khadir.