Aimer son corps pour être bien dans sa peau

À Verdun, pas de nus, c'est un péché

Appeler par leur nom le pénis, le vagin ou les fesses relevait du scandale.

Tribune libre

À Verdun Pas de nus dans les lieux publics
«Compte tenu qu'il y a une école attachée à notre centre communautaire et que les enfants passent tous les jours dans ce hall [...] vous comprendrez qu'il ne faut aucune perception ou allusion d'un sein [sic], d'une fesse ou d'une partie génitale dans les tableaux présentés en exposition. «Journal Le Devoir» le 22 janvier dernier.
Mépriser son corps a toujours fait partie de la doctrine du clergé catholique.
"Que de tabous créés par l’Église autour du corps et de la sexualité ! Tout acte d’amour accompli sexuellement demandait ensuite une purification par le jeûne et la pénitence. Toute formulation du terme juste pour désigner les parties « dites » intimes du corps devenait vulgaire. Appeler par leur nom le pénis, le vagin ou les fesses relevait du scandale. N’était-ce pas suffisant pour engendrer chez l’être humain l’obsession de l’interdit. Non seulement l’éducation sexuelle était-elle proscrite, mais on culpabilisait les gens d’être sexués." (extrait de mon livre : L'Essence de la vie (septentrion)
Pas étonnant que ces tabous aient conduit les assoiffés de perfection au désir angélique. La vie religieuse devenait le plus parfait exutoire pour renier son corps ou, encore, le protéger du mal, et que encore aujourd’hui la –pudibonderie- s’exprime à Verdun, par le rejet de tableaux de nudité qui sont pourtant d’une grande beauté)
Ma mère, aujourd’hui décédée, étendait mon frère bébé nu devant moi, pour le changer de couche, j’avais environ douze ans. Une copine dont la mère était scrupuleuse et assidue aux sermons des curés, était un jour chez moi et constata le portrait devant elle, ce qui l’a fit réagir et crier : "Oh ! Madame Richard, c’est un péché, voir les fesses !" Ma mère donna alors un petit baiser au pénis du bébé, avant de le poudrer et regarda la fillette droit dans les yeux en lui tenant affectueusement les mains, et lui dit : « Tu vois ma fillette, tu diras à ta mère que les foufounes c’est une partie du corps aussi belles que tes yeux et que tes mains, et qu’au lieu de les mépriser elle devrait t’apprendre a les respecter et a les aimer aussi bien que le reste de ton corps ! » Ma mère était une femme intelligente et pas du tout dévoyée.
Aimer son corps ne peut, en aucun cas, être un péché. Le corps n'est-il pas lui-même sacré ? On se prosterne devant le tabernacle qui abrite un morceau de pain et on traite la substance vivante et génératrice de vie qu'est le corps comme un objet du mal.
Si on cessait de se mépriser, si on s’aimait soi-même ! Reconnaissons la beauté qui nous habite ! C'est ainsi que l'amour pourra enfin s'exprimer. Si la sexualité avait été présentée de façon positive, combien de souffrances et des combats auraient été évités ! Combien de crimes n’auraient jamais eu lieu et combien d'abjections n'auraient jamais vu le jour ! Présentons la vie de façon positive, plutôt que par la négative.
L’Amour de soi et être bien dans sa peau, c’est important.
S’aimer soi-même, découvrir que l’on s’aime est le constat de la capacité d’aimer les autres.
Aimer son corps : lorsque j’animais des sessions à des groupes de jeunes sur le thème de l’Amour, j’étais étonnée de constater qu’un nombre incroyable de belles jeunes filles se trouvaient laides, qu’elles détestaient leur nez, leur menton ou la couleur de leurs yeux, qu’elles n’aimaient pas leurs fesses ou encore leur stature. Je les faisais alors s’allonger sur le dos et, au son d’une musique douce, je les faisais voyager dans leur corps, de la tête aux pieds. Je les invitais à toucher chaque partie de leur corps : front, lèvres, cou, épaules, etc. en soulignant la grande beauté de ce corps qu’elles habitaient. Je leur lisais un texte que j’avais composé pour les aider à conscientiser la merveille qu’était chacun de leurs membres. Je les amenais par l’imaginaire à apprécier, par exemple, un œil. Un œil, quelle richesse! Et tu en as deux! Imagine pendant quelques instants que tu es aveugle, que tu ne peux plus voir, regarder... Alors, qu’ils soient bleus, verts ou bruns, quelle importance? Toutes les couleurs sont belles. C’est ton droit de préférer une couleur à une autre, mais sois d’abord fière des yeux que, toi, tu as.
Ce sont tes yeux, ils font partie de ce que tu es, toi, et pas une autre.
Ces séances étaient toujours suivies d’une période d’échange et d’une évaluation de l’expérience. Au fil du temps, je voyais ces jeunes filles se transformer et j’en étais ravie. Le regard qu’elles portaient sur leur corps n’était plus le même. S’aimer soi-même, c’est accepter son corps, c’est reconnaître ses qualités, ses talents, ses dons, c’est voir ce qui est beau et grand en soi. Pour s’aimer jusqu’à se sentir bien dans sa peau, il faut aussi s’accepter avec ses limites et ses imperfections sans les dramatiser. S’aimer soi-même, c’est construire à partir de ce que la vie nous a donné, c’est vouloir son propre bien, c’est vivre dans la gratitude la vie humaine et spirituelle qui habite chacun. Il ne s’agit pas de s’idolâtrer, mais de se considérer comme un Bien qui mérite amour et respect. Il sera beaucoup plus facile d’aimer les autres si on s’aime soi-même, il faut donc commencer par cela, ceci fait partie de l’éducation a donner aux jeunes.
À Verdun, on aurait avantage a faire voir à ces jeunes qui passent dans le hall, la beauté de ces tableaux plutôt qu'un dédain ou une peur de les voir.
Je trouve déplorable et triste que tant de jeunes filles se livrent à la prostitution. Si le respect du corps faisait partie des valeurs qu’on leur inculque dès le jeune âge, peut-être verrait-on moins de ces victimes du commerce du sexe et du pouvoir de l’argent.
Rechercher le bonheur en soi, la joie, l’illumination. Se rendre compte que la joie est en chacun, qu’on peut tout transformer, même le poison en élixir. La vie a donné à chacun les outils pour tout accomplir, à partir de soi-même. On peut accomplir des tâches, des projets merveilleux, et ne jamais s’accomplir soi-même, ce qui serait pourtant la plus grande des richesses.

Pendant des siècles, le mépris de la chair et du sexe a empoisonné la vie de la majorité des couples catholiques. L’expression physique de la sexualité était régie par des règlements absurdes dont le code était dicté aux couples dans le détail. Les rapports sexuels, normalement empreints de plaisir, provoquaient une extrême culpabilisation qui, à son tour, conduisait souvent à des déséquilibres psychologiques graves. Le rejet de la sexualité venait en nette contradiction avec l'obligation – but ultime et seule excuse à la sexualité – de « faire des enfants ». Dans son livre Des eunuques pour le royaume des cieux, l'Église catholique et la sexualité, la théologienne Uta Ranke Heinemann nous relate plusieurs de ces aberrations : « Le plaisir n’est jamais sans péché, la sensation de plaisir sexuel est coupable, quelle qu’en soient les raisons ou les circonstances, même pour les éjaculations nocturnes involontaires. »
Cette obscure conception de saint Augustin fut développée jusqu’à ses plus extrêmes conséquences. Ce problème spécifique aux religieux et aux prêtres – les écoulements de semence nocturnes et le degré de culpabilité qu'ils engendraient – préoccupait considérablement les théologiens. Les écrits des spécialistes sur ce sujet remplissent des bibliothèques entières. Elle ajoute : « Depuis toujours, les plus graves péchés de l’humanité sont réputés se commettre dans les chambres à coucher et non sur les champs de bataille par exemple. » « Saint Augustin (+ 430), un des Pères de l'Église, réussit à opérer une synthèse systématique entre le christianisme et l’hostilité au plaisir ou à la sexualité. Son influence sur la morale sexuelle chrétienne est incontestée : elle fut décisive pour les encycliques de Paul V1 (1968 et de Jean-Paul II (1981) condamnant la pilule. Il est celui qui ouvrit la voie, non seulement pour les siècles, mais pour les millénaires qui suivirent. L’histoire de l’éthique sexuelle chrétienne a été façonnée par lui. »
Je souhaite que le regard que l'on porte sur des nudités toutes naturelles, soit celui d'un regard sain et non celui d'un regard peureux, obsédé ou dédaigneux!
Époux de ma vie,

ma communion avec toi

en esprit et en chair

est

messe de dimanche

plus sublime

que cérémonie

d’Église.
Andréa Richard, auteure de l'Essence de la Vie (Septentrion)

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Andréa Richard29 articles

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Andréa Richard, auteure de "Au-delà de la religion", Septentrion.

Trois-Rivières, Qc.

Andréa Richard finaliste pour le gala Arts Excellence de Trois-Rivières Nous avons le plaisir de vous informer que le dernier titre d’Andréa Richard, Au-delà de la religion, se retrouve finaliste pour la 11e édition de l’événement Arts Excellence de Trois-Rivières dans la catégorie "Littérature". Sous la présidence de monsieur Michel Kozlovsky, le jury a choisi, parmi les 64 dossiers reçus, les artistes et organismes culturels qui se sont démarqués par une réalisation ayant eu lieu au cours de la dernière année. "Ce choix du jury tout en soulignant mon humble apport à la vie culturelle de Trois-Rivières, contribue à l’atteinte de mon principal objectif : faire connaître à un public encore plus large l’existence d’une spiritualité laïque et libératrice, bien ancrée dans le présent, par opposition à la spiritualité du passé axée sur la mort. C’est l’éclosion d’une contre-culture que je préconise en révélant une spiritualité d’avant-garde, positive et incarnée dans la vie de tous les jours, une spiritualité favorisant les grandes valeurs humaines et universelles, une spiritualité englobant l’amour, l’amitié et la sexualité assumée, une spiritualité de la vie !" Mon livre Femme après le cloître : est l’objet d’un film en préparation. et un film documentaire sur ma vie et mes oeuvres, réalisé par Michel Nussbaumer, de Suisse, paraîtra en 2010.





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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mars 2010

    Tartuffe n'est pas mort! Il est bien vivant et particulièrement à Verdun. «Cachez ce sein que je ne saurais voir!»
    Que de générations opprimées produisant des individus refoulés autant qu'ignorants grâce aux enseignements dits religieux... Le corps est péché, transcendons la chair afin de devenir des anges? Plutôt des démons. Et dire que cet interdit créé par des fausses pudeurs autant qu'une basse moralité (ne pas confondre avec morale) est encore vivant de nos jours! L'évolution humaine n'est pas une ligne droite mais un chemin sinueux parsemé d'impasses.
    Dernièrement, j'ai lu un article concernant une reproduction de la Vénus de Milo en neige dans un petit village de l'état de New-York. Un voisin offusqué par ce genre de représentation a fait intervenir la police afin que cette vision qu'il ne pouvait supporter soit détruite ou revêtue. Les propriétaires ont revêtu la demoiselle d'un soutien-gorge et d'un paréo. Ceci laisse rêveur...
    Ce genre d'enfantillage devient lassant et je comprend la réaction de Mme Richard en ce qui concerne l'attitude puritaine de certaines personnes de Verdun. Le corps n'est pas un objet méprisable. Il fut, il est et il sera toujours l'inspiration d'oeuvres d'art qui traversent le temps sans prendre en compte les Tartuffe!
    Merci Madame Richard pour vos considérations autant intelligentes qu'humaines.
    Paul Bonneau, Montréal

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2010

    Excellent article qui m'a fait penser aux accommodements raisonnables que le gouvernement Charest et les multiculturalistes à la Bouchard tentent par tous les moyens possibles de nous rentrer quasiment de force dans la tête. J'espère que les Québécois résisteront à ce retour programmé de l'âge de pierre et qu'ils continueront à réclamer la laïcité sinon nous nous réservons des lendemains assez cahoteux. Toutes ces tentatives de multiculturalisme et d'ouvertures aux autres n'ont qu'un but: soit celui de vouloir briser et fragmenter notre identité nationale pour nous empêcher d'avoir notre pays. Les fédéralistes pressentent pour bientôt l'arrivée du pays du Québec et tenteront par tous les moyens inimaginables de nous mettre des bâtons dans les roues jusqu'à son accomplissement.
    André Gignac le 25 janvier 2010

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Faudrait alors mettre des draps sur les sculptures au Vatican et sur les fresques de la chapelle Sixtine et tant d'autres oeuvres religieuses aux corps nus, avant d'y faire entrer les enfants en visite.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Je ne peux m'empêcher, même si en anglais, de citer une suggestion du jour relative à la santé lue cette semaine :
    To heal yourself, you first need to love yourself. Only when you have self-love can you fully embrace the healing foods, emotions and healthy habits that will keep you healthy and happy for a lifetime. If you're struggling with self-love, ponder the miracle that you are at every level: biological, chemical, spiritual and consciousness...

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010


    J'aurais aimé que ma propre mère pense comme vous. C'était à Verdun précisément, pendant l'été 1938. Mon voisin Roger Leclerc et moi-même, âgés tous deux de sept ans, nous étions examiné l'anatomie, lorsque nous fûmes "pognés en flagrant délit" et menacés de toutes les misères. Ma mère a fait une crise épouvantable et j'ai attrapé une magistrale raclée.
    Le puritanisme n'a pas débuté chez les catholiques mais chez les protestants puritains. Il origine de réformateurs tels que Calvin et Zwingli et s'en répandu chez les catholiques par les jansénistes de Port Royal, en mal de "pureté".
    Je vous envie d'avoir été éduquée à aimer votre corps, qui après tout est le temple de l'Esprit Saint. Le mien a été bafoué et si je suis parti jeune pour l'armée et la guerre, c'était pour y trouver une paix que je n'avais pas dans mon miilieu. Heureusement que je me suis marié avec une femme qui pense comme vous.
    Salutations
    JRMS

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Comment détourner grossièrement une anecdote... Bravo.
    Vous n'avez pas le droit de vous promener nue, dans ce centre communautaire, ou dans la rue, quant à ça. Sans doute est-ce de la faute de l'Église, là encore.
    Étrangement, en URSS, le nu était mal vu. Trop bourgeois. Idem pour la Chine, révolutionnaire plus encore que capitaliste. Pays non religieux, pourtant.
    Serait-ce que la pudeur soit une chose universelle, qui n'a rien à voir avec le péché ?
    Quand on demande à un centre communautaire de nous exposer, il faut accepter de se plier au goût de la communauté en question. C'est naturel. Accuser un atavisme catholique pour mieux calomnier l'Église, n’aura pas d’autres résultats que de vous discréditer.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2010

    Mme. Richard,
    Ce texte que je viens de lire est un véritable hymne à la nature. C’est la première fois que j’ai connaissance d’un écrit aussi clair, respectueux quasi poétique sur ce corps humain que nous habitons. Quand j’ai lu dernièrement que certains esprits étroits et vinaigrés de Verdun voulaient interdire des nus artistiques sous des prétextes venus d’un autre âge, mon étonnement n’a eu d’égal que mon incrédulité. On se retrouvait subitement dans les années ’50 à l’époque de la grande noirceur, pas celle de Duplessis mais celle de notre « sainte mère l’Église » qui à l’époque, cachait sous le manteau de la pudibonderie verdunnesque tous ceux de ses membres qui s’adonnaient aux activités de Sodome. Ces pudibonds de Verdun ne devraient pas aller à Rome et surtout pas à la chapelle Sixtine car là, particulièrement sur les plafonds, se prélassent tous les nus que l’on pourrait imaginer.
    Hélas, je me souviens où, préadolescent, en pleine montée des hormones, nous, de ma génération, avions une crainte morbide de s’endormir le soir car nous craignions que si nous mourrions pendant notre sommeil, le diable nous entraînerait avec lui dans les flammes de l’enfer pour s’être permis de petits solos de guitare en empesant honteusement les draps de lit.
    J’espère qu’une certaine intelligentsia de Verdun ne va pas laisser passer ça. Si les beautés du corps humain étaient moins estampillées de déni et de satanisation, les sociétés dites modernes auraient peut-être beaucoup moins de détraqués sexuels et moins de violences à ce sujet. Les statistiques disent entre autre que les clubs naturistes sont les endroits où les déviances sont les plus rares.
    Mme. Andréa Richard a osé un texte sur un sujet qui, à ma grande surprise, a fait ressortir les œillères des pudibonds. C’est curieux car je croyais que les œillères étaient autrefois réservées aux chevaux pour leur aider à garder le droit chemin.
    Ivan Parent