C'est au tour du Parti québécois d'être éclaboussé à la commission Charbonneau, avec rien de moins qu'une ministre du gouvernement Marois, Élaine Zakaïb, qui s'est retrouvée sur une des conversations téléphoniques enregistrées par les forces policières.
Comme le simple fait d'être cité, évoqué, nommé à la Commission devient une forme de crime par association, les libéraux, trop heureux de voir que, pour une fois, c'est au tour du PQ d'être sur la sellette, ont aussitôt réclamé la démission de Mme Zakaïb. Les caquistes, avec plus de retenue, ont plutôt demandé sa suspension.
J'ai entendu, lu et relu la transcription de l'enregistrement. C'était en mars 2009, quand elle était PDG des Fonds régionaux du Fonds de solidarité. Elle révèle au président de la FTQ, Michel Arsenault, que la FTQ-Construction bloquait des projets d'entreprises concurrentes de celles de Tony Accurso dans la région montréalaise, une pratique indéfendable. Mais le sens de la conversation indique qu'elle ne participait pas à cette pratique, qu'elle en était plutôt victime et qu'elle ne semblait nullement l'approuver.
À la rigueur, on peut reprocher à Mme Zakaïb d'avoir été complice de ces pratiques par son silence, et aussi d'avoir un peu aidé M. Arsenault à camoufler cette dérive dont les médias commençaient à parler. Mais en fait, il semble que, comme bien des professionnels du Fonds de solidarité, elle tentait de composer comme elle le pouvait avec la culture et les pressions de la FTQ. Il n'y a pas là matière à démission, même si cela affecte la crédibilité de Mme Zakaïb.
Mais cet incident, ainsi que d'autres révélations à la commission Charbonneau - M. Arsenault qui va parler à «Pauline», qui se vante de son «deal» avec le mari de Mme Marois, Claude Blanchet - jettent un autre éclairage sur le vaste dossier de l'éthique gouvernementale. Ils rappellent que les réseaux d'amitié et le favoritisme peuvent prendre plusieurs formes.
Il y a la façon classique, les contributions politiques, parfois illégales, ainsi que les rapports de proximité avec le pouvoir politique de ceux qui font affaire avec l'État, avec ses formes extrêmes, la corruption, les enveloppes brunes, la collusion. On peut supposer que de telles pratiques, dont on a toujours peu de preuves au niveau provincial, risquent d'être plus fréquentes chez les libéraux que les péquistes - comme le suggérait la réticence de Jean Charest à déclencher cette commission - ne serait-ce que par les liens naturels du PLQ avec le monde des affaires.
Mais il y a d'autres formes de favoritisme et de retours d'ascenseurs, que l'on voit dans les rapports entre la FTQ et le PQ. Pas de contributions au parti avec des prête-noms, pas d'enveloppes, mais plein de travailleurs d'élections et un appui électoral. Ça se monnaye d'une façon qui peut coûter aussi cher à la collectivité que des contrats gonflés.
Pensons aux centaines de millions engloutis dans la Gaspésia, ou encore de règlementations complaisantes, comme celles qui ont donné le contrôle de l'installation de la machinerie dans les usines aux gros bras de la FTQ-Construction. Et le fait que la FTQ dispose de canaux de communications au plus haut niveau du gouvernement péquiste.
Cela mène à des rapports de proximité, dont la plus belle manifestation est la régularité avec laquelle le nom du mari de Mme Marois, Claude Blanchet, refait surface dans les audiences de la Commission: repas de M. Arsenault avec M. Blanchet et Mme Marois, un projet d'investissement atypique de M. Blanchet avec de Fonds, et pour boucler la boucle, le fait que Mme Zakaïb, qui est passée du Fonds de solidarité au gouvernement, est décrite comme une protégée de M. Blanchet. Un petit monde tissé bien serré.
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