Invariablement l’an dernier, la tonalité des articles publiés sur Boulevard Voltaire a été en totale harmonie avec le désenchantement des Français. Je voudrais aujourd’hui apporter une note plus gaie. Après 2012, année des désillusions, et 2013, année des protestations, 2014 a toutes les chances de devenir celle du sursaut. Je le crois pour trois raisons.
En France, la démocratie – c’est-à-dire dans sa définition canonique « gouvernement du peuple pour le peuple et par le peuple » –, je ne vous l’apprendrai pas, est une véritable mascarade. Or, la fraction de la population qui en a pris conscience – je l’estimais autour de 20 % en 2012, c’est-à-dire peu ou prou l’électorat du RBM, mais davantage aujourd’hui – a très certainement franchi un « tipping point », ou point de bascule. J’emploie le terme anglais à dessein par référence aux travaux de Morton Grodzins (1), qui au début des années 60 avait observé que les opinions et/ou comportements nouveaux d’un échantillon relativement homogène du corps social se répandaient à une vitesse incomparablement plus élevée au-delà d’un certain seuil, et finissaient même par se transformer en un phénomène de masse. En outre – et c’est l’apport principal de ses recherches –, il avait découvert que ce seuil était quasiment une constante mathématique : 20 %!
La deuxième raison qui m’incline à l’optimisme est l’imbécillité – je ne vois pas d’autres mots – de nos adversaires. Lorsque la marmite commence à vibrer, le bon sens nous invite à diminuer la pression. Or, le pouvoir politique et les médias font exactement le contraire, ils attisent le feu ; ce qui peut se résumer en une phrase lapidaire : « Au diable l’opinion du peuple, il faut le rééduquer ou, si besoin, le contraindre par la force. » En témoigne cette intervention navrante de Christophe Barbier dans laquelle il nous explique que la « dé-dieudonnisation » est une « mesure d’hygiène » qu’il faut mener coûte que coûte. Intervention qui vient s’ajouter à celles bien connues d’un Cohn-Bendit ou d’une Eva Joly pour qui la démocratie, c’est le vote perpétuel jusqu’à ce que la minorité obtienne gain de cause. Eh bien rassurez-vous, c’est mission impossible. Naguère, nous serions tombés dans le panneau, hier un simple smartphone a suffi pour nous apprendre, en quelques heures, que c’était bien Méric qui était allé tendre un piège à Esteban et non le contraire. L’Internet, le plus puissant moyen de réinformation jamais inventé, échappe au pouvoir politique, il est dans nos mains.
Enfin, 2014 est une année électorale. Nicolas Sarkozy pronostique une déroute pour l’UMP tant aux municipales qu’aux européennes ; il force probablement le trait mais il voit juste. Le PS, lui, n’y échappera pas, cela va sans dire. Pour Marine Le Pen, l’heure a sonné. Si les Français prennent bien conscience que l’enjeu du vote RBM (et ses alliés) n’est ni l’euro ni même l’immigration mais tout simplement la démocratie, alors ce phénomène de masse que j’évoquais au début, fatalement, se concrétisera dans les urnes et ce ne serait que justice.
(1) Voir aussi l’économiste Thomas Schelling (prix Nobel d’économie 2005) et le philosophe français Jean-Pierre Dupuy ↩
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