Annoncée par surprise le 17 décembre, la normalisation des relations entre Cuba et les Etats-Unis va franchir un nouveau pas vendredi et samedi, lors du sommet des Amériques, qui réunit tous les pays du continent à Panamá. Dans l’attente d’une poignée de main entre Barack Obama et Raúl Castro, le vice-président américain, John Kerry, et le ministre cubain des Affaires étrangères, Bruno Rodriguez, se sont déjà rencontrés dans la capitale panaméenne jeudi, et ont pris une pose guindée devant les photographes.
Le précédent sommet, en 2012, avait déjà mis en vedette l’île des frères Castro mais pour des raisons différentes : Cuba était absente des débats. Les Etats-Unis et le Canada avaient alors fait valoir que La Havane ne pouvait y participer faute d’avoir renvoyé dans les délais sa fiche d’inscription. Manœuvre impérialiste, avaient tonné les chefs d’Etat de trois pays de sensibilité socialiste : Hugo Chávez pour le Venezuela, Rafael Correa pour l’Equateur et Daniel Ortega pour le Nicaragua avaient annulé leur visite.
«EL IMPERIO»
Depuis décembre, les réunions entre diplomates des deux pays se sont succédé. A l’ordre du jour figure le calendrier du rétablissement des relations diplomatiques, rompues à l’initiative des Etats-Unis en janvier 1961, et l’échange d’ambassadeurs. Mais aussi le thème des droits de l’homme, alors que Cuba continue à emprisonner les opposants à son système politique, et la fin de l’embargo économique, qui interdit aux entreprises américaines la moindre relation commerciale avec l’île. Et, accessoirement, aux citoyens américains de s’y rendre individuellement. Le chemin pourrait être encore long : les deux mesures, l’ouverture des ambassades et la fin du blocus, doivent être votées par le Congrès américain à une date encore indéfinie.
La rencontre entre les deux chefs d’Etat, prévue dans la journée, est surtout symbolique. L’enjeu est plus important pour Barack Obama que pour Raúl Castro. Le président américain a une occasion d’échapper à l’image d’impérialiste collée par la gauche latino-américaine à tous les occupants de la Maison blanche. De La Havane à Caracas, on emploie toujours le terme «El Imperio» pour parler du riche voisin du Nord. Mais pour les deux hommes, cette opération de promotion est aussi un moyen d’imposer le fait accompli à leurs opposants.
MAUVAIS ŒIL
Aux Etats-Unis, le parti républicain et la majorité des forces politiques en Floride, Etat-clé lors de plusieurs élections nationales, voient d’un très mauvais œil cette main tendue à «la tyrannie castriste». A Cuba, où la structure du pouvoir demeure opaque, les forces armées, qui contrôlent la plupart des rouages de l’économie, risquent de perdre d’énormes privilèges en cas d’ouverture du marché interne aux appétits des entreprises étrangères. Et pourraient être tentées de torpiller l’initiative de leur ancien patron, Raúl Castro ayant été ministre des Forces armées révolutionnaires entre 1959 et 2008.
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