Vive la reprise économique en Espagne ! C’est la fin de la crise, regardez… même en Espagne ça reprend et pourtant, jamais les pauvres n’ont été aussi nombreux et aussi pauvres, MAIS c’est la reprise.
Vive la reprise économique en Allemagne. C’est bien la preuve que c’est la fin de la crise, pensez donc… vont même augmenter les fonctionnaires (enfin, ceux qui restent) et on oublie de vous dire qu’en Allemagne, jamais les pauvres n’ont été aussi nombreux et aussi pauvres, MAIS c’est la reprise !
Vive la reprise économique aux États-Unis… Jamais le nombre de chômeurs n’a été aussi bas… Bon, on oublie de vous dire qu’ils sont 93 millions à être sortis de la population active ou encore 48 millions à devoir être assistés à la soupe populaire… Jamais les pauvres n’ont été aussi nombreux et aussi pauvres, MAIS c’est la reprise !
C’est tous les jours, tous les jours que l’on nous prend pour des ânes en nous expliquant que quelque part, ailleurs, dans le monde, c’est la reprise.
Tant que vous avez un travail tout va très bien !
Et lorsque vous dites que non, que ce n’est pas vrai, vos amis vous regardent, interloqués. Car EUX ne voient pas la crise. Évidemment qu’ils ne voient pas la crise. Ils ont encore un travail, les prix « baissottent » gentiment pour certains d’entre eux, je pense en particulier au prix des voitures qui reste très négociable par exemple. Donc finalement, quand vous avez votre travail, tout va bien. Il n’y a pas de crise. Pas de crise perceptible en tout cas à titre personnel. Or les gens raisonnent en ramenant tout ou presque à leur situation personnelle.
Tant que les pensions seront versées, les retraités trouveront que tout va mieux que bien. Tant que le salarié touche sa paie, tout ira également mieux que bien.
C’est ainsi, il ne sert à rien de le déplorer. Simplement j’attire l’attention de ceux qui touchent leur pension de retraite (et je leur souhaite de tout cœur que ce soit le cas aussi longtemps que possible car évidemment « ils l’ont amplement mérité ») ou de ceux qui touchent un salaire que cela peut prendre fin assez rapidement.
Et le problème c’est qu’actuellement en France, comme dans tous les pays qui doivent affronter cette reprise économique absolument faramineuse, il est très difficile de retrouver du travail. Simplement d’en retrouver un. Résultat ? Lorsque vous regardez les chiffres du chômage en détail, la durée s’accroît… et au bout du bout, c’est la pauvreté.
Un article subversif du Monde…
Je le précise, parce que sinon on me dit « Charles, non, tu ne peux pas dire ça »… mais si Le Monde le dit, ça vaut, et toc !
Et que dit Le Monde ? Que malgré une reprise économique monstrueuse comme chacun le sait, le nombre d’anglais qui ont faim augmente dangereusement.
D’ailleurs, un gentil « confrère » m’expliquait sur un plateau télé récemment à quel point le marché du travail en France était figé et à quel point le chômage était bas en Angleterre…
Ben oui, lui rétorquais-je… au royaume de sa très gracieuse majesté ils ont même inventé le contrat 0 heure de travail… Ne rigolez pas, c’est du vrai et c’est du lourd. Attention, là, on est chez les pros.
Donc un patron anglais peut vous embaucher à 0 heure. En clair, il vous fait signer un contrat de travail et vous n’avez pas le droit d’aller bosser ailleurs… MAIS il n’est pas tenu de vous fournir du travail. Et tant que vous ne travaillez pas, vous n’êtes pas payé… Si le type a besoin de vous 6 heures le mois prochain, vous serez payé 6 heures de boulot le mois prochain… En attendant, vous irez à la soupe populaire.
Donc logiquement, les patrons se sont rués sur ce type de contrat, ont embauché tout plein d’Anglais et le taux de chômage a baissé. Sans blague. Je vous passe les statistiques britanniques sur l’augmentation exponentielle du nombre d’handicapés… (qui eux aussi sortent des stats du chômage).
Le Monde nous raconte donc l’histoire triste de Robert qui « aujourd’hui guéri d’un cancer mais souffrant tellement du dos et du pied qu’il peine à se déplacer, l’homme vit quasiment sans le sou. Il reçoit 40 livres (environ 55 euros) d’allocations par semaine, garde parfois des enfants après l’école pour 15 livres (environ 21 euros) hebdomadaires et se fait surtout aider par ses deux filles qui habitent non loin. « Il y a des erreurs dans le calcul de mes allocations, plaide-t-il. En attendant que les autorités les corrigent, je suis obligé de venir ici. »
Bon, après tout, s’il a eu un cancer c’est sans doute de sa faute… Et puis y’en a marre de payer pour les pauvres… Hein, après mort aux cons… mort aux pauvres !
Mais Le Monde va plus loin (attention, là cela devient subversif, il y aurait des pauvres de plus en plus nombreux malgré la reprise…) :
« Dans le quartier de la gare de Waterloo, à quelques kilomètres de là, une autre food bank reçoit des victimes urbaines de la faim. La plupart de ceux qui y viennent travaillent, mais ne gagnent pas assez pour vivre correctement. Patrick, lui, a bénéficié de l’aide prodiguée par la banque alimentaire il y a six mois, et revient donner des coups de main. Ce jeune homme qui travaille dans la grande distribution a signé un « contrat zéro heure », qui impose une flexibilité extrême au salarié : l’entreprise décide du nombre d’heures que doit travailler le salarié, et seules les heures effectuées sont rémunérées. Certains mois, Patrick n’a rien touché. Alors la banque alimentaire est devenue une nécessité… »
Tiens… on parle des contrats 0 heures… 0 heure et 0 money. Devrait-on dire.
Et Le Monde d’avancer ce chiffre ahurissant dans un pays en pleine reprise de la croissance économique fabuleuse… « Au moins 2 millions de Britanniques mal nourris. »
Une politique « punitive » dirigée « contre les pauvres ». Mazette! Et c’est le Monde qui le dit!!
« Mais l’invraisemblable augmentation de la pauvreté outre-Manche depuis quelques mois trouve aussi ses origines dans le « Welfare Reform Act 2012 », la réforme d’ampleur de la protection sociale initiée par le gouvernement conservateur de David Cameron. Le journaliste et économiste Stewart Lansley, co-auteur d’un essai intitulé Breadline Britain: the Rise of Mass Poverty (« La Grande-Bretagne sous le seuil de pauvreté : la montée de la pauvreté de masse ») évoque une politique « punitive » dirigée « contre les pauvres, et non contre la pauvreté » :
« D’abord, le montant de certaines allocations a été considérablement réduit. Ensuite, et surtout, le gouvernement a introduit un régime de sanctions en 2013 : dans les faits, cela signifie que des chômeurs se voient refuser le versement d’allocations si leur jobcentre [équivalent britannique de Pôle emploi] estime qu’ils ne cherchent pas suffisamment de travail. »
L’application de cette réforme a été faite « de façon très injuste », insiste l’auteur, qui cite l’exemple de personnes temporairement radiées du système d’allocations pour ne pas s’être rendues à un rendez-vous du jobcentre pour cause… d’entretien d’embauche. Les effets de ce régime sont considérables : selon les calculs de M. Lansley, un million de personnes ont déjà été victimes d’interruptions du versement de leurs allocations – des sanctions qui durent au minimum quatre semaines et peuvent aller jusqu’à trois ans. »
Oui les pauvres c’est pénible, pénible parce qu’ils sont de plus en plus nombreux, pénible parce qu’en fait, quelle que soit la partie du monde que vous regardez, quel que soit le système social en vigueur, le problème est le même partout, nous faisons face à une absence totale de reprise économique et la croissance économique n’existe plus.
Quand la croissance existe car elle peut parfois être statistiquement réelle, elle ne s’accompagne en aucun cas de création d’emplois pour la simple raison que les entreprises n’ont plus besoin de bras, plus besoin de magasins (demandez aux 1 600 salariés virés des magasins Vivarte). Entre automatisation, migration des ventes vers Internet, mondialisation, robotisation, délocalisation et j’en passe, nous sommes entrés dans l’ère de la raréfaction de l’emploi. Pourtant, pour celles et ceux qui ont travail et revenu pour le moment, je vous le confirme tout va bien.
Mais le risque c’est qu’un jour vous soyez touché, ce jour-là que ferez-vous ? Il y a et il y aura de moins en moins de travail. C’est une tendance lourde, mais le système ne sait pas faire sans la notion de travail pour répartir les richesses. Sans travail vous êtes exclu du partage.
Alors plus le nombre de pauvres augmentera, plus on vous dira quand même que tout va bien et que c’est la reprise. Et le nombre de pauvres augmentera encore et toujours… Il finira par se poser évidemment le problème de ce que l’on peut en faire et la réponse sera politique… ou ne sera pas. Il faut donc que vous sachiez comment vous ferez lorsque vous aussi… vous serez pauvre et que votre nom sera allé allonger la liste !
Il est déjà trop tard, préparez-vous.
Charles SANNAT
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