CHUM - un enjeu électoral véritable

Un éléphant blanc aux accents d’apartheid

Tribune libre 2008

De mémoire d’électeur, nous n’avons jamais assisté à une campagne
électorale aussi terne. C’est le pari qu’a fait le Parti libéral de Jean
Charest en tentant de noyer ses adversaires dans la grisaille automnale. La
recette semble porter fruit. Mario Dumont continue de s’enliser dans son
habituel discours soporifique; Pauline Marois, quant à elle, table sur la
gérance provinciale. Donc pari tenu pour Jean Charest qui mène rondement
cette campagne faute d’adversaires plus éblouissants pouvant compromettre
ses engagements. Pendant ce temps, le bon peuple se désillusionne de ses
politiciens qui, telles des fleurs de Bengale, se font sans odeurs et sans
épines. Le ton « beige » est donné et le reste est à l’avenant.

Dans un tel vacuum idéologique, la presse peine à faire la nouvelle. Il
faut creuser et creuser encore pour déterrer ce qui fera la manchette.
Pourtant les enjeux sont là. Ils n’ont tout simplement pas été adéquatement
identifiés par nos élites. La population demande de meilleurs soins de
santé, une meilleure gestion, une meilleure protection de la langue et
l’affirmation de l’identité québécoise. Aucun dossier ne symbolise mieux
ces enjeux que le McGill University Health Centre (MUHC).
Un éléphant blanc aux accents d’apartheid
Le MUHC est un projet d’environ 2,5 milliards de dollars réparti sur deux
campus dont l’un s’étend sur plus de 17 hectares dans l’ancienne cour de
triage Glen. Un site idéal, multifonctionnel, intermodal, à proximité de
l’autoroute, d’une gare de train de banlieue, d’une station de métro et
près de la richissime et très british Westmount. Pourtant les services
offerts par le MUHC ne concernent que 7.7 % de la population du Québec,
soit un investissement de près de 4360 $ par anglo-québécois. Un ajout déjà
considérable en regard du 33 % de lits déjà disponibles à la minorité
anglophone de la région métropolitaine.
Du côté francophone, il y a le projet du nouveau CHUM où l’emplacement, au
1000 St-Denis, reste encore fort contestable avec son carré de sable de 3,5
hectares. Avec ce nouveau CHUM, le milieu médical francophone aura la tâche
herculéenne de desservir la majorité de 92.3 % de la population francophone
et ce, pour le même coût de 2,5 milliards. Un investissement de 364 $ par
québécois francophone ou allophone.

Le CHUM sera donc onze fois moins financé que le MUHC ! Nul besoin d’être
économiste pour se rendre compte que la population non anglophone de
Montréal sera ici nettement désavantagée. Au nouveau CHUM, le scénario est
écrit d’avance : sous-financé, on y criera encore une fois aux urgences
engorgées, aux listes d’attente outrageusement longues, aux lits dans les
couloirs, aux infirmières épuisées, aux médecins impuissants et aux salles
d’opération manquantes … Alors qu’au MUHC, nos compatriotes anglophones
recevront des services de santé efficaces, rapides, luxueux, plus
qu’adéquats « in english please ».
Afin d’accéder à de tels soins, les francophones et les allophones
devront, une fois de plus, faire contre mauvaise fortune bon cœur devant la
minorité. Il faudra montrer patte blanche et au final s’assimiler. Sans
compter qu’avec ces deux CHUs, basés dans la métropole -- dont l’un aux
allures pharaoniques -- plus aucun projet de soin de santé d’envergure ne
se réalisera en région pour les prochains quinze ou vingt ans.
Paradoxe ironique pour des partis politiques se gargarisant à l’identité
québécoise, à la défense de la langue et aux soins de santé plus décents.
Retrouver l’enjeu
La population doit donc reconnecter ses politiciens sur ses véritables
besoins et cesser d’attendre l’inverse. Il est temps, car le 9 décembre nos
politiciens deviendront sourds aux bruits de la rue. Nos médias, assoiffés
de grands débats de société, ne demandent qu’à tenir le flambeau de la
campagne. À nous de le leur tendre bien haut ! En ces temps creux, une
poignée de militants peuvent mobiliser les médias une fin de semaine
durant. Imaginons ce que pourrait produire, sur cette campagne, un
mouvement populaire beaucoup plus organisé.

Plus que jamais, il est temps que le peuple québécois ait l’audace de
s’imposer.

Frédéric Picard et Danièle Fortin

unseulchufr@hotmail.com
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

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Membre de l'Union démocratique pour l'indépendance du Québec (UDIQ)





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