Deux ans avant de passer devant la commission Bastarache sur la nomination des juges, l’ex-directrice du financement du Parti libéral du Québec, Violette Trépanier, a reçu une candidature pour une nomination à un poste de juge en chef.
Notre Bureau d’enquête a découvert qu’en mars 2008, Mme Trépanier a reçu le CV d’Anne Leydet, qui souhaitait devenir juge en chef du Tribunal administratif du Québec (TAQ). Elle a aussi reçu la lettre de motivation de Me Leydet, adressée au ministre de la Justice d’alors, Jacques Dupuis.
Ce n’est pas Me Leydet qui a envoyé son CV à Mme Trépanier, mais plutôt Claude Provencher, de la firme montréalaise d’architectes Provencher & Roy. Ce dernier est un contributeur à la caisse libérale, et sa firme obtient des contrats gouvernementaux.
Jusqu’ici, Violette Trépanier avait seulement admis avoir reçu quelques demandes de la part de donateurs libéraux pour des nominations aux conseils d’administration d’organismes publics.
«Par gentillesse»
M. Provencher nous a fait savoir, par sa responsable des communications, qu’il avait transmis «par gentillesse» la candidature parce qu’un de ses voisins «lui a demandé de faire parvenir le CV de sa compagne (Anne Leydet) à Mme Trépanier, un nom connu de toute la province».
De son côté, Anne Leydet nous a expliqué que c’est M. Provencher qui lui a suggéré de l’aider, lorsqu’elle lui a fait part de son intérêt pour le poste lors d’un souper entre amis, en 2008. Elle assure toutefois qu’elle n’a jamais su que sa candidature avait été acheminée à Violette Trépanier puisqu’elle n’a jamais eu de retour.
Quelques semaines plus tard, elle a appris que c’est finalement Hélène De Kovachich qui a été nommée pour le poste.
Lors de la commission Bastarache sur le processus de nomination des juges, en 2010, madame Trépanier avait été confrontée à ce sujet.
«Est-ce que vous avez été mise au fait, en 2003 ou 2004, d’influence, de recommandation ou d’interactions de solliciteurs de fonds en ce qui concerne la nomination de juges?», lui a-t-on demandé.
«Non, jamais», a-t-elle répondu.
Madame Trépanier avait raison, puisqu’il était question des années 2003 et 2004. Mais elle n’a pas mentionné le CV reçu en 2008.
Bellemare pas surpris
Ministre de la Justice durant la première année de l’ère Charest, Marc Bellemare est celui qui a fait déclencher la commission Bastarache lorsqu’il a allégué que la nomination de juges avait fait l’objet de trafic d’influence. En entrevue, il a indiqué qu’«il n’[avait] jamais cru madame Trépanier» et qu’il y avait des «jeux d’influence», à son sens.
«L’histoire se répète. C’est ce qu’on voit aujourd’hui. C’est la preuve que les pratiques n’ont pas vraiment changé. Ce que j’ai raconté en 2003-2004 (...) Il ne semble pas y avoir eu de changements dans les pratiques et l’influence sacro-sainte de l’argent au sein de ce parti», a-t-il expliqué.
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