Élections Canada en fait trop et alimente une controverse inutile en permettant que des femmes puissent voter le visage couvert. S’il faut révéler ses traits faciaux pour obtenir un permis de conduire, une carte d’assurance-maladie ou un passeport, il est tout à fait raisonnable d’exiger la même chose pour exercer son droit de vote. Et n’allons pas vers un compromis en acceptant que le voile tombe uniquement en présence d’une autre femme au bureau de scrutin.
Les Canadiennes qui porteraient le niqab n’auraient rien réclamé à Élections Canada. Aucune action portant sur ce point n’est non plus devant les tribunaux pour discrimination ou non-respect de la liberté religieuse, en vue de trouver un accommodement raisonnable. La nouvelle loi électorale fédérale, modifiée en juin ironiquement pour resserrer le mécanisme d’identification des électeurs, ne contient pas non plus de disposition stipulant que les femmes peuvent voter le visage couvert. Bref, il n’y avait pas de problème, mais Élections Canada en a créé un.
Un problème bien théorique, faut-il admettre, si on tient compte du nombre infinitésimal (une dizaine) de personnes visées par la décision d’Élections Canada. Un problème bien réel toutefois puisqu’il s’agit de principes et de valeurs qui sont le fondement de notre démocratie. La nécessité de bien identifier un électeur est incontournable pour préserver la confiance du public dans le processus électoral et démocratique. Ce n’est pas un détail.
La question est d’autant plus délicate qu’au Québec, le dossier des accommodements religieux a suscité ces derniers mois de vives réactions dans l’opinion publique. Élections Canada aurait dû en tenir compte avant d’agir.
Il fallait voir hier la déception d’une porte-parole québécoise du Congrès islamique canadien, bien consciente du tort que la décision d’Élections Canada causerait dans les relations entre musulmans et les autres membres de la société québécoise. La veille, le président du Congrès avait rappelé pour sa part que dans plusieurs pays musulmans, les gens doivent être identifiés à visage découvert à l’occasion d’élections.
Si le Congrès islamique estime que le système électoral devrait exiger que les femmes voilées montrent leur visage, il suggère par ailleurs qu’elles puissent le faire devant une autre femme et à l’abri du regard des hommes. Le Canada et le Québec ne doivent pas acquiescer à une telle demande.
L’égalité entre les hommes et les femmes prévaut au pays. C’est une valeur fondamentale qui n’est pas négociable. Si on permet aux femmes de voter à l’abri du regard des hommes, va-t-on accepter qu’elles soient éduquées, qu’elles travaillent et qu’elles accouchent dans nos établissements publics toujours à l’abri du regard des hommes ?
Certes, les femmes ont acquis avec peine le droit de vote. Accepter que certaines puissent l’exercer seulement à certaines conditions n’est cependant
pas possible. Ce serait nous engager sur une piste beaucoup trop glissante.
Voter est un droit, mais non un droit absolu. Des conditions s’appliquent. Voter est une action fort importante, mais très ponctuelle. Il n’est donc pas déraisonnable d’exiger d’une personne qu’elle renonce momentanément au port d’un niqab ou d’une burqa, le temps d’exprimer un choix politique sur un bulletin de vote le jour du scrutin. Le Canada ne contreviendrait sûrement pas à sa Charte des droits et libertés en posant cette exigence. Élections Canada se montre trop prudent et conciliant.
Comme l’avait fait au printemps son homologue québécois Marcel Blanchet, le directeur général des élections fédérales devrait modifier son approche. Les gouvernements de Québec et d’Ottawa devraient quant à eux préciser leur loi électorale pour qu’il n’y ait plus d’ambiguïté.
Trop accommodant
Élections Canada en fait trop et alimente une controverse inutile en permettant que des femmes puissent voter le visage couvert.
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