Volodymyr Zelensky est indubitablement courageux, qui, refusant les accords de Minsk, appelle à l’embrasement général et à la guerre mondiale. Bien sûr, l’Europe et les États-Unis n’ont pas envie de mourir pour l’Ukraine et savent jusqu’où se retenir. La sanctuarisation de l’espace aérien ukrainien en est la frontière. Poutine, qui n’était pas un démocrate, est désormais un criminel. Pourtant, en 2001, l’ancien tchékiste, venant après Eltsine l’alcoolique, était ovationné au Bundestag. Et il se solidarisait avec Bush après les attentats du World Trade Center. Clinton et Poutine discutaient alors d’une défense antimissiles commune… Plutôt que l’analyse de son mental par des consultants en psychiatrie radiophonique, il serait aussi judicieux d’interroger l’Histoire des trente dernières années pour comprendre comment nous en sommes arrivés là.
Les analystes de l'OTAN écrivaient, en 1991 : « Moscou ne manquerait pas de considérer comme une provocation intolérable toute tentative de repousser la frontière de l’OTAN jusqu’à la Bug – ce qui aurait pour effet de renforcer la position du camp des réactionnaires en Union soviétique. »
Avec la chute du mur de Berlin, le 9 novembre 1989, et le démantèlement de l’URSS, les deux alliances militaires, pacte de Varsovie et OTAN, devenaient sans objet. Václav Havel, président de la Tchécoslovaquie, appelait à la suppression des deux. Le 25 février 1991, à Budapest, le pacte de Varsovie est dissous. Fin du rideau de fer, tout le monde s’embrasse. Mais tout de même… Soucieux de ménager l’avenir, Genscher, ministre des Affaires étrangères allemand, propose une alliance proprement européenne, découplée des États-Unis. C’est l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), anciennement Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE). Les Américains torpillent l’initiative. Dans un mémorandum en neuf points, ils la décrivent comme une excellente idée, mais en attendant, il ne faut surtout pas se priver de l’OTAN ! Et pour cause ! Bien davantage qu’un pacte militaire, l’OTAN, c’est d’abord un marché. L’OTAN dont les manœuvres sont autant de terrains de tests pour la recherche et le développement militaire américain. Un fantastique débouché pour les marchands d’armes américains.
« L’Union européenne ne doit pas se substituer à l’OTAN » et « ne doit pas fermer ses marchés de défense aux Américains » (Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN).
Mais, bien sûr, promis juré, on ne l’étendra pas ! Promesse réitérée en 1990 à Gorbatchev. En contrepartie de la réunification allemande, pas d’extension de l’OTAN. Douglas Hurd, ministre des Affaires étrangères anglais, affirmait à son homologue soviétique Alexander Bessmertnykh, le 26 mars 1991 : « L’OTAN n’a aucunement l'intention d'inclure la Pologne, la Roumanie, la Hongrie ou la Tchécoslovaquie. » Le Premier ministre britannique John Major assure : « Nous ne renforcerons pas l'OTAN ! » Pourtant, les États-Unis seront les instigateurs de cinq vagues d’expansion de l’OTAN : 1999 (Pologne, Tchéquie, Hongrie) ; 2004 (Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Roumanie, Slovaquie et Slovénie) ; 2009 (Albanie et Croatie) ; 2017 (Monténégro) et, en 2020, la Macédoine du Nord.
La guerre en Ukraine va donc justifier une nouvelle fois cette expansion et constituer une magnifique occasion pour surarmer l’Europe made in USA.
Selon Reuters, l’administration Biden s’apprête à proposer un budget pour la Défense qui pourrait dépasser les 800 milliards de dollars pour l’exercice 2023. Trois fois plus que la Chine et dix fois plus que la Russie. En annonçant, le 14 mars, l’achat de 35 avions Lockheed F-35 pour rénover son aviation, ce ne sont pas les Rafale de Dassault que l’Allemagne a choisis mais le savoir-faire américain décidément irremplaçable en matière d’extermination. Au grand dam de la France et de l’Europe. À l’heure d’aujourd’hui - Ukraine oblige -, pas un seul dirigeant européen n'oserait mettre en doute la nécessité de l’OTAN, mais si vous la voulez efficace, achetez les armes qui vont avec. Sinon, nous refusons la garantie !
Au sortir de la crise ukrainienne, le seul vrai vainqueur sera le bizness USA. Merci, Poutine.