"Ce qui n'est pas toute la vérité, n'est pas la vérité du tout" Didier le Pêcheur.
Quand la mort d'un journaliste devient une occasion pour renforcer une position politique d'un pays, je n'appelle pas ça un hommage. C'est une insulte à sa mémoire.
Le 11 janvier dernier, dans la ville de Homs, le reporter de guerre français Gilles Jacquier est mort en plein exercice de sa fonction.
Le 25 janvier, Envoyé spéciale, l'émission de France2, pour laquelle Jacquier travaillait, a présenté une enquête de 45 minutes. Le reportage intitulé "Ce jour là, à Homs" refait tout le parcours du journaliste et son équipe avant qu'une explosion de mortier ne lui enlève la vie. (voir le reportage)
Cette mort est-elle le résultat d'un accident ou a t-elle été programmée et par qui ? Une question à laquelle le reportage essaye de répondre en penchant nettement vers la thèse d'une mort planifiée. La plupart des commentaires des autres journalistes témoins de l'action violente, laissent peser des grands soupçons sur le régime syrien. Cependant, les images du reportage, telle que présentées, penchent plutôt vers la thèse de l'accident. Du moins, aucune preuve hors de tout doute ne sort de ce reportage pour réconforter la thèse d'un assassinat. Quand les images contredisent les paroles, il y a un malaise.
Entourée de toute l'équipe de l'émission, une des deux animatrices d'Envoyé spéciale conclut avec gravité, l'hommage à Gilles Jacquier, en affirmant que la mort de leur collègue n'empêchera pas d'autres journalistes de poursuivre leur travail à la recherche de la vérité.
C'est à ce moment précis, que mon malaise est devenu indignation. Quelle vérité des journalistes, d'un grand média français, cherchent-ils sur la Syrie ? Si c'est la même qu'ils nous ont servie sur la Libye, j'appelle plutôt ça un mensonge .
Je vous invite vivement à lire le témoignage de Tarek, un opposant du régime syrien vivant en France. Il a été contacté par Envoyé spécial pour participer à son enquête sur la mort de Gilles Jacquier. Comme il écrit lui-même, son témoignage a été "saucissonné". Cliquez:
Dois-je préciser que je ne suis évidement partisan d'aucune dictature ? J'essaye néanmoins de rester lucide face à ceux qui se découvrent soudainement une vocation de libérer les peuples de leurs dictateurs.
Depuis le début des soulèvements populaires dans plusieurs pays arabes, je constate avec consternation de quelle façon les grands médias occidentaux participent à la récupération des révoltes arabes pour leur donner l'orientation qui fait l'affaire des grandes puissances occidentales. On est loin d'un journalisme de vérité. Les mêmes journalistes qui traquaient les terroristes islamistes encore hier, aujourd'hui, ils ferment les yeux sur leurs crimes. Que ce soit en Libye ou en Syrie. Faut-il rappeler que chaque guerre est précédée d'un média-mensonge ?
Heureusement qu'il existe, grâce à Internet, d'autres sources d'information dont le site Investig'Action dont les journalistes sont certainement plus indépendants que ceux d'Envoyé spécial. Cliquez:
Une recherche plus approfondie dans d'autres sources d'information sur Internet révèle une grande complexité de la réalité syrienne. Beaucoup plus complexe que la libyenne. Les opposants du régime syrien ne sont pas fait que de démocrates. Il y a aussi les islamistes sunnites. Les démocrates syriens se trouvent aujourd'hui coincés entre le régime en place et les islamistes armés et financés par des intérêts étrangers dont la Qatar et l'Arabie Saoudite. Ces deux derniers pays qui n'ont rien d'une démocratie ne pardonnent pas à la Syrie d'être trop proche de l'Iran.
Les chrétiens de Syrie, dont des milliers ont fui l'Irak, désirent une plus grande démocratisation de la société syrienne. Mais ils appréhendent l'avènement des islamistes au pouvoir. Cela explique pourquoi la plupart des chrétiens maintiennent leur soutien à Bachar Al-Assad. On le voit bien dans le reportage.
Ajouter à cette complexité la proximité de la Syrie d'Israël et son lien très fort avec l'Iran. C'est avec cette Syrie si complexe que la France essaye de reproduire le scénario libyen. C'est dans ce contexte que les grands médias français essayent de préparer le terrain à une éventuelle agression de l'OTAN. Voilà pourquoi les mensonges des grands médias français sur la Syrie, s'érigent en vérité.
Pour son enquête, Envoyé spécial a fait appel à un expert des armes pour se pencher sur la nature de l'explosion qui a coûté la vie à Gilles Jacquier. Ce dernier a rappelé que l'explosion du mortier a fait aussi huit autres morts et 25 blessés. Ces victimes sont tous de la communauté alaouite, naturellement partisans du régime syrien. Ne pouvant confirmer la thèse d'une mort programmée, l'expert a cru bon ajouter que dès fois les régimes de cet ordre n'ont pas de scrupules à assassiner leur propres partisans pour arriver à leur fin!
Si cette remarque est vraie, je trouve qu'elle s'applique aussi sur cette célèbre émission d'enquête qui n'a eu aucun scrupule à instrumentaliser la mort de l'un de ses illustres journalistes pour renforcer la position politique de la France envers la Syrie.
Instrumentaliser la mort d'une personne c'est la tuer deux fois.
Mohamed Lotfi
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2 commentaires
Oscar Fortin Répondre
29 janvier 2012Bravo pour cet article qui illustre bien que le monde de l'information n'est pas toujours à la hauteur du professionnalisme qui doit le guider. Je me permets une autre référence qui met en évidence les grands mensonges et médias mensonges à l'origine de bien des guerres. Que nos journalistes à Radio-Canada et à TVA en prennent bonne note. Au service de qui et de quoi travaillent-ils?
http://www.centpapiers.com/comment-les-medias-poussent-le-monde-a-la-guerre/93274
Serge Charbonneau Répondre
28 janvier 2012Oui, je partage la totalité de ce qui est dit dans ce texte.
Il est renversant de constater à quel point nos journalistes professionnels (!) se prostituent afin de servir la propagande.
Une propagande élevée à un degré jamais atteint.
On nie carrément la réalité !
Quel est donc ce mystère qui fait agir ainsi nos journalistes, jadis "professionnels"
C'est un mystère profond.
Jamais nous n'avons vécu une désinformation aussi bien organisée !
Comme si les racines de ce virement du jadis 4e pouvoir se rendaient jusque dans la chaleur incroyable qui pendant des mois surgissait du sol sous les décombres des tours du WTC !
Ah ! Le complot ! Diront certains !
Serge Charbonneau
Québec