À deux mois et demi des prochaines élections, peut-être les plus importantes des 20 dernières années, les enjeux semblent plus clairs que jamais.
Les Québécois, globalement, savent pour quelles raisons ils se présenteront aux urnes et que nous entrons dans une nouvelle époque politique.
Stratégies
Le 1er octobre, il ne s’agira plus de choisir entre souverainistes et fédéralistes, dans la perspective d’un référendum sur l’indépendance. Pendant près de 50 ans, les Québécois étaient en attente d’une refondation de leur cadre politique. Plus maintenant, hélas.
Si la question nationale intéresse encore notre société, elle ne la structure plus officiellement, et la majorité ne veut plus lui accorder la première place.
Le grand enjeu de la prochaine élection, c’est le remplacement des libéraux au pouvoir depuis 15 ans. On a l’habitude de citer la fameuse formule de Lord Acton qui disait que le pouvoir corrompt et que le pouvoir absolu corrompt absolument. On ne sait trop si elle est vraie en soi, mais elle s’applique parfaitement à nos libéraux.
Pour se maintenir au pouvoir, les libéraux misent à la fois sur une stratégie identitaire et une stratégie sociale.
Sous Philippe Couillard, le PLQ s’est rallié à une vision très radicale du multiculturalisme à la canadienne, et ne cesse de mettre en garde les communautés issues de l’immigration contre la supposée tentation ethnique de la majorité francophone. Il se veut le gardien des droits des minorités contre un peuple ne rêvant que de les persécuter. C’est sa manière de poursuivre sa lutte contre le nationalisme québécois, qu’il réduit à une pulsion xénophobe.
Les Québécois francophones ne tolèrent plus cette diabolisation de leur identité.
Mais le PLQ veut aussi brandir la carte du progressisme, en se présentant comme le défenseur des valeurs sociales contre une CAQ dirigée par un François Legault caricaturé en maniaque à la tronçonneuse rêvant de détruire les programmes sociaux. En gros, le PLQ se présente comme le parti de la redistribution intelligente de la richesse, contre la pingrerie de la droite néo-adéquiste.
La CAQ, on le sait, est la mieux placée dans les sondages pour gagner les prochaines élections. Elle bénéficie non seulement de ceux qui se reconnaissent dans son programme, mais aussi d’une bonne part de l’électorat francophone qui cherche un moyen de se débarrasser des libéraux.
Nationalisme
La CAQ est aussi au diapason d’un électorat qui aborde le nationalisme sous le signe de l’identité plutôt que de la souveraineté, même si elle demeure timide en la matière.
En gros, les francophones surmontent leur tendance à la division pour changer de gouvernement. Ils investissent la CAQ pour faire valoir leurs intérêts collectifs.
Que peut espérer le PQ, dans cette course où il part perdant ? Essentiellement, éviter la disparition. Il se présente comme le gardien de la social-démocratie et comme le seul porteur crédible de l’indépendance, pour que cette idée dispose encore d’un relais le 2 octobre.
Concrètement, il n’y a pas vraiment de créneau gagnant pour lui dans les circonstances. Jean-François Lisée devra faire des miracles.