Je ne suis plus capable d'endurer les tergiversations de mon parti Québec Solidaire sur l'indépendance du Québec, l'unité des indépendantistes et la mise sur pied d'une alliance entre partis indépendantistes pour y arriver. D'un côté comme porte parole de QS, notre parti étant membre du OUI ( Organisations Unies pour l'Indépendance ), nouvelle appellation pour l'ancien Conseil de la souveraineté, Françoise David a participé récemment à DestiNation une événement qui a rassemblé des centaines d'indépendantistes toutes allégeances politiques confondues. De l'autre elle a dit en campagne électorale qu'elle n'irait pas s'asseoir à côté de Pierre-Karl Péladeau. Elle ajoute maintenant que le parti s'éloignerait d'une alliance avec le PQ si ce dernier est élu chef du PQ parce qu'il est un patron de droite. Je n'ai jamais non plus trouvé claire et limpide la démarche que le parti propose avec une assemblée constituante qui pourrait mener ou non, on ne sait plus, à l'indépendance, à un fédéralisme renouvelé ou à autre chose. On se rappelle également les paroles d'Amir Kadhir : '«l'indépendance est nécessaire mais pas nécessairement l'indépendance '». Une chatte y perdrait ses petits...

J'en viens également à me demander si le NPD prenait le pouvoir à Ottawa l'an prochain si notre parti serait encore indépendantiste, ou si tout d'un coup il deviendrait fédéraliste parce que la justice sociale serait à l'ordre du jour du nouveau gouvernement canadien.

En même temps si le PQ est trop à droite avec son nouveau chef on ne fait pas d'alliance avec lui pour prendre le pouvoir et faire l'indépendance et on reste dans le Canada. Cette ambiguité qui n'en finit plus découle d'une part de la diversité des points de vue au sein du parti mais surtout du fait que QS a une seule motivation pour faire l'indépendance qui est celle d'avoir plus de justice sociale dans un Québec indépendant. Tout en partageant ce souhait que nous pouvons faire fructifier dans une coalition indépendantiste et éventuellement dans un gouvernement de coalition, l'indépendance du Québec ne peut se réaliser avec une seule motivation.

Québec Solidaire, s'il est vraiment un parti indépendantiste, doit donc intégrer dans son discours d'autres dimensions dont certaines que l'on a entendues lors du débat des chefs à Radio-Canada alors que Françoise David s'est faite la championne de l'indépendance du Québec, d'un rêve et projet de pays mobilisateur devant une Pauline Marois timorée sur la question, discours qui serait peut-être par la suite peut-être mis de côté pour les quatre prochaines années comme on reproche souvent au PQ de le faire. On ne peut se contenter de faire du maraudage politique en campagne électorale puis garder le silence par la suite.

Et il y a aussi des enjeux sur lesquels j'ai déjà interpellé mon parti et que QS ne comprend pas comme l'identité, la culture et la langue et qui sont directement liés à l'indépendance pour beaucoup de Québécois dont je suis. Si on veut faire l'indépendance c'est aussi parce que nous voulons préserver notre identité de francophones d'Amérique et notre langue qui est de plus en plus menacée à Montréal. C'est aussi parce que nous sommes devenus un peuple mature, confiant en lui-même et qui a besoin de prendre enfin son envol. C'est aussi finalement parce que l'on étouffe dans la camisole centralisatrice d'Ottawa ( dont le NPD est un chaud partisan ) alors que de multiples pouvoirs nous échappent ( affaires internationales, environnement, communications, transport, fiscalité, etc. ) et qu'il est temps de les reconquérir, et cet argument est plus pertinent que jamais dans la conjoncture actuelle.

Je pense aussi à la fierté d'amener au monde un nouveau pays enraciné en Amérique et portant des valeurs comme la protection de l'environnement et la paix, mais aussi des choses « banales » comme voir flotter notre drapeau devant les Nations unies à New-York ou d'avoir une équipe du Québec à la coupe du monde de soccer, ce qui ne semble pas émouvoir tous les membres de QS, loin de là.

Je sais que le débat interne n'est pas terminé sur la question mais je trouve qu'à vouloir ménager la chèvre et le choux on devient mêlés et mêlants comme l'est souvent le PQ sur le sujet. Il faudrait avoir le courage de prendre le taureau par les cornes et de mener un débat de fond sur le pourquoi de l'indépendance du Québec au sein de notre parti comme c'est le dans le mouvement indépendantiste en général et aller parler d'indépendance avec la population. Il faut rallier dès maintenant le plus grand nombre de Québécois(ses) à ce beau et grand projet collectif et moderne digne du XXIe siècle. On doit aussi rediscuter d'une coalition des partis indépendantistes, condition incontournable pour la reprise du pouvoir par les indépendantistes en 2018, la tenue d'un référendum et la réussite de l'indépendance du Québec. Une stratégie de faire du maraudage de faire monter les enchères vers la gauche jusqu'à la dernière minute pour éventuellement rallier ou non en bout de ligne une éventuelle coalition indépendantiste à la dernière minute serait également un façon bien traditionnelle de faire de la politique.

On ne peut être à moitié indépendantiste, on l'est ou on ne l'est pas, comme individu ou comme parti. Je ne voudrais pas devant l'absence de ce débat au sein de mon parti avoir à choisir prématurément entre continuer à être membre et militer à QS, retourner au PQ d'où je suis venu il y a plusieurs années et y joindre son aile gauche le SPQ libre; ou encore contribuer de nouveau à grossir les rangs d'Option Nationale ou participer à la fondation d'autres nouveaux partis indépendantistes plus rassembleurs. Mon premier choix est de rester à QS où je retrouve plusieurs de mes valeurs profondes mais dans lequel comme indépendantiste «pur et dur » je me reconnais rarement dans mon parti entre les élections...

Yves Chartrand
Membre de Québec Solidaire dans Hochelaga-Maisonneuve