Bien heureux celui qui saurait prédire le résultat de l’élection àcinq mois de la présidentielle française. Cette élection que l’on disait jouée d’avance il y a huit mois à peine (puisqu’elle devait opposer François Hollande à Nicolas Sarkozy, tous deux aujourd’hui hors jeu) est devenue celle de toutes les incertitudes. Et cela ne semble pas devoir s’arrêter là.
« À l’exception de 1969, jamais la gauche n’a abordé un scrutin présidentiel en position aussi faible », écrivait cette semaine le chroniqueur Gérard Courtois dans Le Monde. La divulgation des programmes des candidats socialistes à la primaire de la gauche n’a fait qu’accroître le désarroi. Sans grandes surprises, ces programmes souvent improvisés s’inspirent avec plus ou moins de talent des propositions qui circulent dans le Parti socialiste depuis dix ou quinze ans. En l’absence du candidat d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon et de celui du centre Emmanuel Macron, qui ne participent pas à la primaire, cette primaire ressemble désespérément à un gros congrès socialiste. Elle vise en fait à désigner non pas tant un candidat à la présidentielle que celui qui mettra la main sur le parti afin d’amorcer sa reconstruction. Mais, pour cela, encore faut-il que le candidat socialiste sauve au moins la face à la présidentielle.
Rien n’est moins sûr pour l’instant. Même si l’ancien premier ministre Manuel Valls est en tête chez les sympathisants socialistes (il devance Arnaud Montebourg de 18 points), le plus récent sondage réalisé par Elabe pour le quotidien économique Les Échos ne lui accorde pas plus de 13 % des voix au premier tour de la présidentielle, derrière Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron, Marine Le Pen et François Fillon. Pour le politologue Jean Petaux, interviewé sur le site Atlantico, Manuel Valls est en effet « le seul espoir pour le PS de résister à l’offensive Macron… mais à quel prix pour les socialistes » !
Macron en embuscade
Pour l’instant, l’ancien premier ministre, connu pour ses positions économiques libérales et son volontarisme politique, a dû renier une bonne demi-douzaine de ses déclarations antérieures afin de convaincre ces gauches qu’il jugeait « inconciliables » récemment encore. Cela va de la suppression du 49-3 (une procédure expéditive d’adoption des lois qu’il a utilisée à deux reprises) au retour de la défiscalisation des heures supplémentaires pourtant annulée dès l’élection de François Hollande. On a même entendu cet ancien pourfendeur de l’islamisme et du port du voile affirmer que l’islam était « une part de notre identité » (française).
Malgré cette entrée en campagne catastrophique, le Parti socialiste pourrait tout de même être obligé de se rallier à l’ancien premier ministre, sous peine de se marginaliser complètement. Valls apparaît en effet comme le seul candidat d’expérience véritablement présidentiable. Voilà qui fait cependant dire à plusieurs analystes que la victoire de Manuel Valls à la primaire pourrait être une victoire à la Pyrrhus.
À gauche et au centre, l’homme à abattre aujourd’hui se nomme Emmanuel Macron. Considéré depuis plusieurs mois comme une créature médiatique, l’ancien banquier devenu conseiller de François Hollande commence à inquiéter aussi bien à gauche qu’à droite. Pour la première fois, le sondage des Échos évoquait la possibilité qu’il se classe au second tour derrière François Fillon et devant Marine Le Pen.
Simple feu de paille ou vague de fond ? Il est trop tôt pour le dire. Cette remontée est d’abord due à l’espace politique que lui a ouvert au centre la défaite politique d’Alain Juppé au profit d’un candidat plus marqué à droite, François Fillon. Si la primaire de la gauche ne devait pas susciter d’engouement, nul doute que les ralliements à Emmanuel Macron seraient massifs. Déjà, plusieurs proches de François Hollande ont gagné son organisation. On sait aussi que la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, éprouve de fortes sympathies à son égard. Plusieurs, comme le porte-parole de François Hollande Stéphane Le Foll et le premier ministre Bernard Cazeneuve, réservent leur choix.
Fillon inquiet
Cette semaine, pour la première fois, la progression d’Emmanuel Macron a même inquiété des proches de François Fillon. Celle-ci « est un défi nouveau pour François Fillon », écrit l’éditorialiste du Figaro Guillaume Tabard. Au point où le candidat de la droite s’est lancé derrière lui au salon de l’électronique grand public de Las Vegas. Le vainqueur de la primaire de la droite, qui vient de perdre sept points dans les sondages, souhaite secrètement que les socialistes se ressaisissent et que Manuel Valls emporte véritablement l’adhésion de son camp. Plus les trois candidats de gauche seront à égalité, plus les chances de François Fillon d’affronter Marine Le Pen au second tour seront grandes. Et plus la victoire sera assurée.
Fort des 10 000 personnes qu’il a rassemblées le 12 décembre dernier à la porte de Versailles, Emmanuel Macron est aujourd’hui la personnalité politique préférée des Français. Mais à cinq mois de l’échéance, ce genre de sondage de popularité ne veut pas dire grand-chose. Il en dit pourtant assez pour que la droite ne reste plus insensible et envoie l’ancien ministre du Budget Éric Woerth expliquer à la presse qu’en 2007 Emmanuel Macron était candidat pour entrer… dans son ministère.
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Présidentielle en France: l’élection de toutes les incertitudes
L’électron libre Macron commence à inquiéter ses adversaires
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