L’exécution du Cheick Al-Nimr, chef de file des opposants de la minorité chiite en Arabie Saoudite, noyée dans une série d’exécutions de condamnés sunnites appartenant à Al-Qaïda et d’autres, chiites, appartenant à divers groupes autonomistes, principalement à l’Est du pays, là où se concentre les fabuleux gisements d’énergies fossiles du royaume, a de quoi surprendre un observateur suivant l’évolution des évènements dans la région du Moyen-Orient du Golfe arabo-persique durant ces trente dernière années. Et pour cause. Cette escalade au stade ultime vise à relancer, à un niveau supérieur, une guerre inter-confessionnelle ayant servi les intérêts de l’empire peu après l’invasion US de l’Irak.
Prosaïquement et aussi étonnant que cela puisse paraître venant d’un Etat aussi influent que l’Arabie Saoudite, ce geste particulièrement hostile à l’égard de l’Iran, équivaut à l’image figurée d’un joueur d’échecs perdant subitement patience face à son adversaire interrompant le jeu par un acte de violence ou de vandalisme rendant impossible la poursuite de la partie.
L’Arabie Saoudite est en guerre contre l’Iran et les soubassements de cette hostilité sont loin d’être réduits à l’unique grille de lecture d’une rivalité confessionnelle aussi réelle qu’elle puisse se manifester au niveau régional.
En réalité, cette perte de contrôle souligne que Ryad a fini par perdre patience. La guerre en Syrie dont l’Arabie Saoudite est un des protagonistes majeurs tourne de plus en plus à sa défaveur tandis que la guerre au Yémen est en passe de devenir un véritable cauchemar stratégique. L’immense effort de guerre saoudien en Irak (de 1979 à 1988 en faveur de Saddam Hussein contre l’Iran, puis de 1990 à 2003 contre Saddam Hussein avant de mettre le feu au pays en soutenant des factions tentant de briser l’influence iranienne sur le pays), en Syrie (depuis 1986 et de façon plus active depuis mars 2011) et au Yémen (campagne aérienne parmi les onéreuses de l’histoire militaire contemporaine), pour ne retenir que ces fronts ouverts, a fini par porter atteinte à son économie et donc menacer sa stabilité et sa cohésion internes. Tout ceci dans un contexte économique mondial marqué par un net déclin des prix du baril de pétrole, résultat partiel de manoeuvres saoudiennes au sein de l’OPEP visant à abattre les économies de Moscou, Pékin et par dessus tout, Téhéran pour le compte de Washington.
Mettre le feu aux poudres est aisé. Le mal est fait. Eteindre l’incendie est par contre fort difficile. Les provinces orientales du Royaume où se concentrent la plupart des complexes pétrochimiques abritent une minorité chiite dont les revendications peuvent à tout moment basculer vers le séparatisme ou une certaine forme de vassalité envers Téhéran. Le scénario d’une partition plane depuis des décennies sur le royaume.
En fin de compte, tout dépendra de la réaction ou pour être précis de la capacité de Téhéran et ses alliés à ne pas répondre à une provocation directe et ne pas être amené à une confrontation ouverte avec Ryad, c’est-à-dire Washington…
A peine deux jours après le passage en l’an 2016 et nous assistons à la première tentative de provoquer un glissement direct vers une guerre mondiale généralisée.
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