SOUVERAINETÉ

Où ça, la mort?

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{{C'est le PQ qui a des problèmes, pas l'indépendance}}

L’assermentation ce mardi des députés du Parti québécois ne peut être dissociée de l’enjeu qu’est devenu l’avenir même de leur formation politique. Pour les contempteurs de la souveraineté, l’analyse doit même aller un cran plus loin et envoyer pour de bon l’option au rancart. Comme si l’arithmétique électorale pouvait se confondre avec la mesure des convictions.
Alors, elle se meurt ou pas, la souveraineté ? Une « idée ne meurt jamais », disait Philippe Couillard appelé à commenter la déconvenue péquiste lors de la première conférence de presse qu’il donnait le 8 avril à titre de premier ministre désigné. Et de fait, si l’on entend par là que « l’idée », ici, aurait pu être remplacée par les mots « rêve » ou « utopie », sa permanence sombre dans une insignifiance telle que même des fédéralistes farouches comme M. Couillard peuvent s’en accommoder.

Ce qui fait peur et déclenche la riposte vive, comme notre histoire en donne moult exemples, ce n’est pas « l’idée » souverainiste, c’est le « projet », mot qui appelle l’avenir. Projeter, dit la définition, c’est « jeter en avant et avec force », savoir ce que l’on veut et prendre les moyens pour y parvenir.

Donc, il est mort ou pas, le projet souverainiste ? Pour le savoir, le critique compte : le pourcentage d’appui du Parti québécois, le plus faible depuis 1973, ajouté aux votes guère augmentés à Québec solidaire, retranché de l’anémie d’Option nationale, multiplié par les sondages qui montrent que la population s’en fout, et les jeunes donc ! Plus l’apathie hivernale, la fatigue atavique, notre historique permanence tranquille, l’individualisme contemporain, le défaitisme des baby-boomers vieillissants, sans oublier ceux qui n’y ont jamais cru, tout cela finit par égaler que notre pays n’a maintenant qu’un seul nom : le Canada. CQFD : le souverainisme vit ses derniers moments. Cela tombe bien, c’est ce que le critique entendait démontrer.

Sauf que. Ces lendemains désenchantés parce que des batailles se perdent, ou ont été mal menées, ou pas menées du tout, n’ont rien d’une première dans notre histoire politique, et ils n’ont jamais sonné la fin de quoi que ce soit.

Retour au XIXe siècle : les suites de la rébellion de 1837-1838 ont été marquées par des tergiversations, des règlements de comptes, un affaissement dans les rangs des patriotes. L’horizon se refermait sur les accusations de « traîtres » d’un côté, « d’agitateurs » de l’autre, comme en témoignent les récits du temps ou ceux signés aujourd’hui par une Micheline Lachance dans ses « romans-vérité », comme elle les appelle, sur la vie des Papineau. Les velléités nationalistes, qui participaient à une idéologie du XIXe siècle, auraient pu s’arrêter là. Elles se sont au contraire ressourcées, refondées, rejouant chaque fois un « À la prochaine fois » qui tient de l’envie tenace et partagée d’avancer (et non pas d’un enchantement dont les Québécois seraient prisonniers, comme le comprend Daniel Jacques).

Et il est bien question d’avancer, pas de recommencer. Le XXe siècle a vu des ruptures dans la façon d’aborder le thème de l’indépendance, mais l’idée de fond, être maître de son destin, n’a pas changé, comme le démontrait il y a deux semaines notre reportage « D’une génération à l’autre » (Le Devoir du12 avril). Aujourd’hui encore, la détermination de ceux qui veulent reprendre le flambeau ne faiblit pas. Ce que les jeunes trouvent dépassé, ce sont les manières de faire du PQ, pas la souveraineté en soi, écrivait samedi dans Le Devoir la toujours percutante Catherine Dorion, d’Option nationale. Elle voit dans l’indépendance un propos « frais » et en parle comme tel, avec un regard neuf, sans se cacher. D’autres jeunes l’imitent, imperméables aux sondages, aux analyses ou aux angoisses péquistes. Convaincus d’arriver à convaincre. Et leur vitalité est un vrai pied de nez à la mort dont on parle tant.


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