Lors d'un récent Forum au Bas-Saint-Laurent, qui réunissait des citoyens, des intervenants et des élus de la région, je fus étonné de constater la colère des participants à l'égard de nos partis politiques, qui, de l'avis de tous, faussent totalement chez nous la démocratie et la représentation, au point de nous enlever le goût de participer à des élections. Et à bien y penser, ils n'avaient pas tort.
Même si l'existence de partis politiques qui regroupent les grandes familles d'opinions politiques fait partie de toute démocratie, le rôle que l'on donne aux partis politiques dans nos institutions peut tout gâcher. Or il faut bien admettre que notre système parlementaire britannique, contrairement au système présidentiel, repose entièrement sur la ligne de parti: le parti majoritaire, si faible soit sa majorité, contrôle tout: la désignation du chef de l'État, le fonctionnement du Parlement (pouvoir législatif), la formation du Cabinet (pouvoir exécutif).
De telle sorte que les députés que l'on élit ne décident pas grand-chose: en plus de ne représenter la plupart du temps qu'un faible pourcentage de la population, ils sont entièrement prisonniers de la ligne de leur parti et du parti au pouvoir. Autant dire qu'ils sont bâillonnés: empêchés de voter les lois qu'ils jugent nécessaires pour leurs électeurs, il ne leur reste qu'à jouer auprès d'eux le rôle d'un travailleur social et d'un entremetteur.
La situation s'est encore aggravée du fait que les partis politiques définissent maintenant leur action en fonction des sondages et des médias, de sorte que les campagnes électorales sont devenues des spectacles d'hypocrisie, de stratégie, de propagande, de dénigrement et d'opportunisme, centrées sur les chefs de partis et de plus en plus éloignés de la réalité des citoyens.
Le marketing politique et les slogans vides (l'économie, la santé, le leadership...) ont remplacé le projet politique. C'est pourquoi les citoyens supportent de plus en plus difficilement les campagnes électorales, a fortiori lorsqu'elles ne sont justifiées que par des intérêts partisans, comme c'est le cas en ce moment, et que les partis en présence n'ont strictement rien à proposer comme projet de société.
Pour les gens qui assistaient à ce Forum, ce qu'ils attendent, c'est une réforme de nos institutions démocratiques qui leur redonne une représentation au gouvernement et leur redonne les pouvoirs et les moyens de s'autogouverner dans leur région plutôt que de se voir constamment bloqués dans leurs projets par la dictature des partis politiques et de ministères gouvernementaux qui s'obstinent à tout contrôler. «Si on veut occuper notre territoire, concluait le président de la Conférence Régionale des Élus présent à titre personnel à ce Forum, il faut avoir les pouvoirs pour l'occuper et avoir le financement pour le faire.» Mais, soyez sans crainte, il n'en sera pas question dans cette élection qui est un affront de trop aux citoyens, et si par hasard il en était question, on s'empresserait de l'oublier après l'élection.
Comment peut-on ensuite avoir l'audace de dénoncer le manque d'intérêt et de participation des citoyens à la vie politique? Faut-il se fâcher ou se décourager?
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Roméo Bouchard, Coordonnateur de la Coalition pour un Québec des Régions
Nos partis politiques sont devenus une menace pour la démocratie
IDÉES - la polis
Roméo Bouchard33 articles
Coordonnateur de la Coalition SOS-Pronovost Ex-président-fondateur de l'Union paysanne Auteur de Y a-t-il un avenir pour les régions ?
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