Chez nos amis américains, le « French bashing » – soit le dénigrement systématique de la France – est depuis longtemps une sorte de sport national, juste derrière le baseball et le lancer de nains ; obèses, il va de soi. Ainsi, l’hebdomadaire Newsweek, sous la plume de la journaliste Janine di Giovanni, vient-il de consacrer un large dossier à « La chute de la France ».
« bashing »
Venant d’un journal ayant dû abandonner sa version papier pour se réfugier sur Internet, l’affaire ne manque pas de sel et encore moins de ketchup. Au cœur de leur critique : « la France socialiste » et la « fuite de ses cerveaux ». La première est une vieille antienne pour des gens prompts à vous traiter de « communiste » dès lors qu’on évoque un brin de justice sociale… Le pape François vient récemment de l’apprendre à ses dépens, lui aussi traité de « communiste » par la presse américaine pour avoir critiqué « l’argent roi ».
L’auteur de ces lignes – qui a eu la chance, ou l’infortune, c’est au choix – de vivre de longs mois outre-Atlantique, au début des années 80 du siècle dernier, se rappelle encore ces questions frappées au sceau d’une naïveté qui en dit beaucoup sur les mentalités locales : « Quatre ministres communistes au gouvernement ? Il y a déjà des goulags en France ? » « Au fait, chez vous, il y a l’eau courante ? Vous connaissez l’électricité ? » Verbatim. Et voilà pour la « France socialiste »…
Quant à la fuite des cerveaux, il est un fait que nous avons laissé échapper au moins deux des plus brillants du cheptel : Dominique Strauss-Kahn et Christine Lagarde. Dommage qu’ils nous aient rendu le premier, en attendant de faire de même de la seconde. Comme quoi, les Américains ne sont pas si fous.
Pour le reste, l’équivalent local du Nouvel Observateur se pose cette question : « Où est le Richard Branson [fondateur de Virgin, NDLR] de la France ? Où est son Bill Gates ? » Déjà, pour leur gouverne, il conviendra de leur rappeler que Richard Branson est de nationalité anglaise. Et qu’avant Bill Gates, il y a eu en France un certain François Gernelle, inventeur du premier « personal computer », le Micral N, que les Américains nous ont un peu piqué, avec les méthodes qui les caractérisent ; lesquelles n’entretiennent que de lointains rapports avec ce fair-play qu’on donne pour anglais et cette courtoisie, à juste titre tenue pour éminemment française.
Au fait, où sont les Bernard Madoff français ? Question que Newsweek ne pose pas. Il a bien tort, sachant que si, en la matière, nous ne manquons pas d’aigrefins, nous ne saurions en aucun cas rivaliser avec les aigles de la catégorie… Dans la série, les mêmes plumitifs s’indignent qu’il n’existe pas de mot français pour « entrepreneur »… Et « entrepreneur », c’est quoi, Dugenou ? Du javanais ?
Toujours dans la série de l’amitié transatlantique, il paraît que chez nous, le litre de lait coûterait près de quatre dollars, soit pas loin de trois euros. Et pour demeurer dans la catégorie bobards, il paraîtrait qu’en France, « couches et crèches seraient gratuites »… T’as qu’à croire, bibiche.
Bon, il y a quand même un « entrepreneur » français à trouver grâce aux yeux de Newsweek : Christophe de Margerie, patron de Total : « Il sait parler anglais et passe son temps à l’étranger. » C’est peut-être bien ce qu’on lui reproche. Sacrés Américains, peuple directement passé de la barbarie à la décadence sans avoir jamais connu la civilisation. Comme le disait Mark Twain, écrivain américain un peu plus finaud : « Ce fut admirable de découvrir l’Amérique, mais il l’eût été plus encore de passer à côté. »
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