L'économie du Québec a beau être en pleine croissance, la Belle Province demeure moins prospère que la moyenne au pays, et c'est la raison pour laquelle elle reçoit toujours des paiements de péréquation du gouvernement fédéral.
C'est du moins ce que comptait plaider le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, à l'occasion de la dernière rencontre des grands argentiers du pays qui a eu lieu en décembre dernier à Ottawa, alors que la colère gronde de plus en plus en Alberta au sujet des sommes que touche le Québec en vertu de ce programme fédéral.
Conscient de cette grogne, Bill Morneau avait donc préparé une riposte détaillée à d'éventuelles critiques de son collègue albertain Joe Ceci durant la dernière rencontre des ministres des Finances, démontrent des documents obtenus par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. L'avenir de ce programme était l'un des sujets au menu des discussions.
L'objectif de M. Morneau était de faire éclater les «mythes» qui persistent quant à la nature de ce programme qui permet au Québec de recevoir des milliards de dollars en paiements de péréquation du gouvernement fédéral chaque année, a-t-on indiqué dans les rangs libéraux.
Durant l'exercice financier 2018-2019, qui commence le 1er avril, le Québec obtiendra 11,7 milliards de l'enveloppe de 18,9 milliards que se partageront six provinces en paiements de péréquation.
Ces paiements, en plus de la bonne tenue de l'économie du Québec depuis plusieurs mois, ont permis au gouvernement Couillard d'ouvrir les vannes dans son budget déposé mardi, à quelques mois des élections provinciales.
L'Alberta, dont l'économie est durement frappée par la chute des prix du pétrole, n'obtiendra aucun paiement de péréquation d'Ottawa au cours du même exercice financier, même si la province se remet difficilement d'une récession et que le gouvernement néo-démocrate de Rachel Notley a déposé récemment un budget qui comportait un déficit de 8,8 milliards et qui ne prévoyait pas de retour à l'équilibre budgétaire avant 2023. Outre l'Alberta, les autres provinces qui n'ont pas à droit à des paiements de péréquation sont la Saskatchewan, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve-et-Labrador.
Critiques attendues de l'Alberta
Les notes rédigées sous la forme de questions-réponses par les fonctionnaires du ministère des Finances à l'intention de Bill Morneau démontrent sans équivoque que l'on appréhende de plus en plus un ressac en Alberta, d'autant que les projets de construction d'oléoducs permettant d'exporter le pétrole issu des sables bitumineux de la province vers les marchés étrangers se heurtent à des obstacles en Colombie-Britannique et ailleurs au pays.
«Pourquoi l'Alberta contribue-t-elle à la péréquation du Québec alors que l'Alberta est en récession et que l'économie québécoise est en croissance?», demande-t-on dans les notes.
«La péréquation est un transfert fédéral financé à même les revenus généraux ; les gouvernements provinciaux ne contribuent pas à la péréquation. La péréquation soutient les provinces qui sont moins prospères que la moyenne», peut-on lire dans les réponses soumises au ministre Morneau.
«Bien que les finances de l'Alberta aient été touchées durement par la baisse des cours du pétrole, l'Alberta demeure la province la plus prospère au Canada. Elle n'est donc pas admissible à la péréquation. De même, même si l'économie du Québec est en croissance, cette province demeure moins prospère que la moyenne et reçoit donc des paiements de péréquation», ajoute-t-on.
Dans une autre question, on demande si le Québec reçoit des paiements plus élevés de péréquation parce que la province dépense davantage dans les services de garde que les autres.
«Non. Les choix de politiques des provinces n'ont pas d'incidence sur la péréquation. Les paiements de péréquation sont déterminés par la capacité d'une province à amasser des revenus si elle devait adopter des taux d'imposition nationaux moyens. Le Québec reçoit des paiements de péréquation parce qu'il est moins prospère que la moyenne nationale», indique-t-on dans le document du Ministère.
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La promesse de Jason Kenney
Le chef du Parti conservateur uni de l'Alberta, Jason Kenney, a promis de tenir un référendum dans sa province s'il remporte les élections en mai 2019 afin d'obtenir un mandat de renégocier la formule de la péréquation pour exclure les revenus provenant de l'industrie pétrolière. Cela diminuerait, selon lui, «la contribution de l'Alberta d'environ 10 milliards de dollars».