La bâtonnière suspendue Lu Chan Khuong a indiqué hier qu'elle rendra publiques les bandes vidéo captées par le service de la sécurité de la Maison Simons.
En réponse à une demande d'accès à l'information, le détaillant de vêtements a récemment remis à Me Khuong tous les documents qu'il détenait la concernant. Mme Khuong n'a pas voulu préciser hier si elle dévoilerait le ou les rapports des agents de sécurité, l'ensemble du dossier ou seulement les images. «Je répondrai à ça demain, après-demain», a-t-elle déclaré à La Presse à sa sortie d'une conférence qu'elle donnait hier midi à l'Université de Montréal. Chose certaine: «Je rendrai publiques les bandes vidéo», a-t-elle dit.
C'est aujourd'hui que le conseil d'administration du Barreau du Québec et Lu Chan Khuong dévoileront l'entente qu'ils ont conclue vendredi pour régler le litige qui les opposait au sujet de la suspension de Me Khuong en raison d'un dossier non judiciarisé de vol à l'étalage dans un magasin Simons en avril 2014. Les deux parties en dévoileront les grandes lignes dans un communiqué commun.
Hier, Me Khuong a refusé d'indiquer si elle partait ou si elle regagnait son poste.
«C'est une crise et on n'a pas intérêt à étirer le conflit. C'est pour cela qu'on l'a réglé», a-t-elle cependant précisé lors de la conférence organisée par le Comité femmes et droit de l'Association des étudiants en droit à l'Université de Montréal. «Il faut que le Barreau en ressorte grandi, il faut que l'image de notre ordre soit impeccable. Il faut que les décisions qui sont prises le soient dans l'intérêt supérieur de l'ordre, des membres, et ce, même au détriment de l'individu», a-t-elle ajouté à la toute fin de son discours qui a duré plus d'une heure.
Un «homme blanc» traité différemment?
Le 1er juillet dernier, La Presse a révélé que la bâtonnière du Québec Me Lu Chan Khuong avait fait l'objet d'une plainte à la police pour vol à l'étalage de deux jeans en avril 2014 dans un magasin Simons de Laval. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a choisi de traiter ce dossier en vertu du programme de non-judiciarisation des infractions criminelles. Pour qu'un dossier soit traité par l'entremise de ce programme, le DPCP doit à la fois être «moralement convaincu» qu'une infraction a été commise et être capable de prouver l'infraction hors de tout doute raisonnable.
Lorsque cette affaire a éclaté au grand jour, le conseil d'administration a demandé à la bâtonnière de démissionner et, devant son refus, l'a suspendue.
«Est-ce que la situation actuelle serait la même si j'avais été [un] homme blanc d'un grand bureau de Montréal? Parce que vous savez: je suis [une] minorité, [d'un] petit bureau de Québec et une femme. À cela, j'aime croire que ce serait la même situation, mais j'entends des choses», a-t-elle affirmé lors de sa conférence qui portait sur le thème «Femmes, minorités et pouvoir.»
«Si vous passez par le Barreau, vous allez voir des tableaux, des photos des anciens bâtonniers. Depuis 150 ans, je suis la 6e femme seulement. Il y a un changement de mentalité à faire et aussi un changement de culture. Comme programme, c'est vrai que c'est innovateur. C'est vrai que c'est un gros défi, mais je pense qu'on est rendus là», a-t-elle ajouté du même souffle.
Un «bon» programme
Lors de sa conférence, Mme Khuong a aussi indiqué que le Barreau du Québec et la ministre de la Justice n'ont pas su «protéger» le programme de déjudiciarisation, qu'elle estime être un «bon» programme.
«Le programme de déjudiciarisation permet de passer à d'autre chose et de désengorger le système. On est très limités en termes de salle, de juges, d'huissiers, etc. Je peux vous dire que ça permet aux tribunaux de procéder dans des dossiers qui sont plus complexes... C'est sûr qu'il y a un travail à faire pour redorer, redonner confiance dans le système de déjudiciarisation.»
Lors d'une assemblée générale du Barreau qui s'est tenue à Laval à la fin août, les quelque 1000 membres présents (sur les 24 000 avocats de la province) ont réitéré à 68,5% leur confiance envers Me Khuong. «[Ce fut] un bain de bonheur pour moi et j'en suis sortie crinquée! Donc, je suis correcte jusqu'en 2019!»
Lors de la période des questions, un étudiant a demandé si elle songeait un jour à se lancer en politique. «Peut-être. Je ne ferme pas la porte à ça.»
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