Voici la motion présentée à la Chambre des communes hier par le Bloc québécois et le texte du discours prononcé par son chef à cette occasion.
La motion: que cette Chambre reconnaisse que les Québécois forment une nation.
La question que le Bloc québécois soumet à cette Chambre aujourd'hui est en fait une motion qui permettra aux parlementaires de reconnaître que les Québécois forment une nation. Il s'agit de la reconnaissance de ce simple état de fait.
Nous avons formulé cette motion de façon à ce qu'elle soit acceptable pour tous. Ainsi, nous n'avons pas lié la reconnaissance de la nation québécoise à d'autres considérations. Aucune condition n'est liée à cette reconnaissance. De même, nous n'avons pas formulé notre motion de telle façon qu'elle puisse être interprétée comme la reconnaissance d'un pays souverain, ce que le Québec n'est pas; du moins, pas encore. Nous déposerons donc une motion respectueuse de chacun, sans assujettir la reconnaissance de la nation québécoise à des conditions partisanes.
Hier, le premier ministre a fait exactement le contraire. Il a déposé une motion qui reconnaît la nation québécoise en imposant une condition, une condition partisane. C'est absurde. On voit bien que le premier ministre n'essaie que de sauver la face. La seule attitude respectueuse envers les Québécois est de les reconnaître pour ce qu'ils sont: une nation qui ne cesse pas de l'être si elle ne fait plus partie du Canada, à l'évidence même, une nation sans condition.
Ce n'est pas au premier ministre de décider quelle option les Québécois choisiront. Ce n'est pas à un parti plus qu'à un autre de décider ce que les Québécois choisiront comme option. L'avenir du Québec n'appartient qu'aux Québécois, point à la ligne. Ce sont les Québécois, en vertu des règles de l'Assemblée nationale, qui décideront de leur propre avenir.
Je le répète: les Québécois forment une nation, pas à condition de rester dans un Canada supposément uni. Ils forment une nation, pas à condition de devenir un pays. Ce sont là des options politiques, toutes deux respectables parce que démocratiques toutes les deux. Dans un cas comme dans l'autre, jamais on ne doit soumettre l'existence de la nation québécoise à l'action que l'on privilégie, à l'option que l'on défend.
Nous sommes une nation parce que nous sommes ce que nous sommes, peu importe l'avenir que la nation québécoise choisira. La reconnaissance de la nation québécoise par la Chambre des communes est plus qu'une question symbolique et certainement plus qu'une question partisane. Il s'agit en fait de la question la plus fondamentale qui soit pour le Québec. Il s'agit aussi d'une question fondamentale pour le Canada.
C'est l'évidence même, on n'a qu'à voir le débat que cela soulève ici et que cela soulève dans l'ensemble de la population, tant au Québec qu'au Canada et dans les médias.
Cette question accapare beaucoup d'énergie. Depuis des années, les élus du Canada veulent éviter cette question dérangeante et la glisser sous le tapis. Or, depuis quelque temps, cette question a resurgi. Elle a resurgi à la suite de l'adoption, par l'aile québécoise du Parti libéral du Canada, d'une résolution allant en ce sens. Elle a également resurgi à la suite de l'adoption, par le NPD, lors de son congrès tenu en septembre dernier à Québec, et encore plus à la suite de la motion du Bloc et à celle du premier ministre, hier. On ne peut pas ignorer cette question quand il y a autant de gens qui en parlent; c'est normal.
Beaucoup de commentateurs et d'élus du Canada se sont braqués contre la reconnaissance de cette évidence, soit que les Québécois forment une nation. Plusieurs sondages indiquent qu'une grande majorité de Canadiens rejetaient l'idée de reconnaître officiellement la réalité, à savoir que les Québécois forment une nation, pas meilleure ni inférieure à la nation canadienne mais certainement différente. Ce refus de reconnaître le Québec pour ce qu'il est fait en sorte que le Québec n'est pas signataire de la Constitution. C'est aussi ce refus de reconnaître la nation québécoise qui explique que le Québec soit considéré comme une province exactement comme les autres et non pas comme le lieu où vit une nation.
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Gilles Duceppe
Député de Laurier-Sainte-Marie et chef du Bloc québécois
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