Dans le Nouveau Testament, les quatre Cavaliers de l'Apocalypse « sont des personnages célestes et mystérieux à qui le pouvoir fut donné pour faire périr les hommes par l'épée, par la famine, par la mortalité, et par les bêtes sauvages de la terre ».
Dans la nouvelle Assemblée nationale du Québec, les quatre Cavaliers Couillard, Leitao, Coiteux et Legault enfourchent leur monture convaincus de s’être fait donner le pouvoir de faire périr le modèle québécois.
Le Cavalier Philippe Couillard est leur leader. Il chevauche le Cheval blanc, qui symbolise la Conquête dans l’Apocalypse. Il a fait ses classes auprès de cheiks d’Arabie saoudite et du premier ministre Stephen Harper, alors qu’il siégeait au Comité de surveillance du SCRS, dont les membres sont triés sur le volet afin de s’assurer que le gouvernement et les Services secrets les ont bien en laisse, comme le montre le destin de son « ami » le Dr Arthur Porter.
Le Cavalier Carlos Leitao monte le Cheval rouge, synonyme de la Guerre. Il a fui le Portugal lors de la Révolution des Œillets, qui renversait la dictature de Salazar. Économiste chouchou des milieux financiers – le magazine Bloomberg le classait 2e économiste prévisionniste au monde en 2008 – il représente le Cheval de Troie des milieux financiers internationaux au sein du gouvernement.
Le Cavalier Martin Coiteux, en selle sur le Cheval noir qui représente la Famine, a déjà prédit que « si la crise mondiale qui se dessine déploie sa fureur comme prévu, c’est la société québécoise tout entière qui devra faire le deuil de sa dépendance à la ‘‘ gratuité’’ des services publics ». En tant que président du Conseil du Trésor, il est chargé de revoir tous les programmes sociaux québécois. Ça promet !
Le Cavalier François Legault tient les rênes du Cheval vert. Il se tient en réserve au cas où les Libéraux ne seraient pas à la hauteur de leur mission destructrice. Rien d’étonnant, le Cheval vert symbolise la Mort.
Difficile de trouver, dans l’histoire récente du Québec, un groupe de personnes plus inféodé aux marchés financiers, au lobby pétrolier et au gouvernement fédéral.
Couillard a renoncé à sa promesse électorale d’investir 15 milliards sur dix ans dans les infrastructures et a autorisé, sans étude environnementale, la construction de l’oléoduc de la TransCanada Corporation.
Leitao propose d’équilibrer son budget en évitant soigneusement de revendiquer auprès d’Ottawa les huit milliards perdus depuis 2008 et dix autres milliards de manque à gagner au cours de la prochaine décennie à cause, notamment, des changements imposés par le gouvernement Harper au programme Transfert canadien en matière de santé.
Coiteux était directeur de la recherche de l’Idée fédérale, un think tank financé par des dons anonymes, dont le conseil d’administration est présidé par André Pratte, l’éditorialiste de La Presse, et le Conseil des gouverneurs par Jean Charest.
Martin Coiteux a signé une recherche dans laquelle il prônait le renforcement de la zone euro au prix de l’abandon, par les pays européens, d’une partie de leur souveraineté. L’objectif sous-jacent était de démontrer les avantages de la fédération canadienne.
Il vaut la peine d’examiner de plus près cette thèse. Le quotidien Le Monde publiait le 5 juin dernier une entrevue avec Alexis Tsipras, le président du parti grec de gauche radicale Syriza, qui a fait le meilleur score de la gauche aux élections européenne, avec 26,46 % % des voix.
Dans cette entrevue, Alexis Tsipras expliquait les véritables objectifs du régime d’austérité imposé à la Grèce.
« L'objectif de l'austérité n'était pas de sortir la Grèce de la crise – avant la crise, notre dette publique atteignait 120 % du produit intérieur brut. Aujourd'hui, elle atteint 180 % – mais de créer une dévaluation interne censée relancer sa compétitivité. Mme Merkel et M. Schäuble ont un plan stratégique, appelé la germanisation de l'Europe, et la colonisation du sud de l'Europe. Ils veulent créer une zone économique spéciale à la périphérie du continent, sans les contraintes du droit du travail, avec des bas salaires, un chômage structurel élevé. Ils croient que, de cette façon, l'économie européenne sera compétitive.»
Incapables de dévaluer leur monnaie pour rendre leur économie concurrentielle, à cause de leur adhésion à la zone euro, la Grèce, tout comme l’Italie, le Portugal et la France, procèdent à la « dévaluation » des salaires et des conditions de travail. Voilà où conduit la solution Coiteux pour l’Europe!
Une situation similaire existe au Canada avec l’appréciation du dollar canadien par suite de l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta, comme l’indiquent les dernières statistiques sur le chômage.
Au mois de mai, le chômage a grimpé à 8 % au Québec, alors que la Saskatchewan et l’Alberta vivent des situations de quasi-plein emploi avec des taux de 3,7 % et 4,6 %. Au cours des dernières années, au Québec, des emplois bien payés à temps plein dans le secteur manufacturier ont été remplacés par des emplois mal payés à temps partiel dans le secteur des services.
Selon le Mouvement Desjardins, il s’est perdu, seulement au cours de la dernière année, 8 200 emplois dans le secteur manufacturier, principalement parce que les produits manufacturés québécois ne sont plus compétitifs à cause de l’appréciation du dollar canadien.
L’augmentation des exportations de pétrole de l’Alberta par suite de la construction de l’oléoduc de la TransCanada Corporation va avoir un effet dopant sur le dollar canadien, mettant encore plus à mal l’économie québécoise.
Cela sans que le gouvernement Couillard ne réclame une quelconque compensation financière, alors que le Québec devra assumer tous les risques environnementaux reliés à l’oléoduc et aux méga-pétroliers qui vont accoster dans le port de Cacouna.
La politique d’austérité du budget Leitao va inévitablement entraîner une hausse du déficit budgétaire. La table sera alors mise pour que le mercenaire Luc Godbout, nommé responsable de la future Commission sur la fiscalité, revienne à la charge avec les propositions du rapport qu’il a concoctées avec son compère Montmarquette soit, entre autres, la hausse de la TVQ, un recours accru à la tarification, et la privatisation d’Hydro-Québec et de la SAQ.
Deux modèles s’affrontent. Le modèle québécois basé l’intervention de l’État, « notre seul outil collectif », comme le disait René Lévesque. Ou bien la recolonisation de l’économie du Québec, dans le cadre de l’albertisation de l’économie canadienne.
Dans une de ses interventions, Carlos Leitao déclarait « ne pas vouloir voir le Québec dans la situation du Portugal ». En fait, sa politique y conduit directement.
Mentionnons quelques-unes des conséquences du plan imposé par la Troïka européenne (la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international) au Portugal : hausse du coût de la vie, des transports, des soins de santé et de la TVQ, avec comme conséquence une baisse du pouvoir d'achat des Portugais de 6 % en 2012.
Baisse de 27 % du traitement des fonctionnaires, non-remplacement d’un départ en retraite sur deux, gel du salaire des fonctionnaires sur 4 ans, suppression des 13e et 14e mois pour les fonctionnaires et les retraités aux revenus supérieurs à 1 000 euros, puis à l'ensemble des retraités, baisse de salaires d’une moyenne de 5 % des 500 000 fonctionnaires percevant un salaire supérieur à 1 550 euros par mois.
Dans le secteur privé, augmentation de l’horaire de travail d’une demi-heure par jour, assouplissement du droit du travail permettant de licencier plus facilement, de limiter l’allocation chômage, de réduire le coût des heures supplémentaires et de diminuer les congés et les jours fériés.
À cela, s’est ajouté évidemment tout un programme de privatisations des entreprises publiques.
En somme, les Cavaliers de l’Apocalypse portugais ont détruit le « modèle portugais » hérité de la Révolution des Œillets qu’a fui, rappelons-le, Carlos Leitao!
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