La barricade a finalement été levée sur la voie ferrée du Canadien Pacifique à Kahnawake jeudi midi, après un mois de blocage, mais cette sortie de crise n’est qu’une solution temporaire et il faudra reconstruire les ponts avec les francophones, ont prévenu les Mohawks.
Les manifestants ont déplacé leur campement au pied du pont Mercier, pour qu’il puisse continuer à être visible. Il s’agit d’un geste de « bonne foi », a déclaré un porte-parole. L’autre barricade à Listuguj, en Gaspésie, a également été levée, selon ce qu’ont rapporté plusieurs médias.
Le premier ministre François Legault a dit être « satisfait » de ce dénouement et a fait état des effets négatifs de ces blocus sur l’économie et le transport en commun. « Il faut trouver des solutions pour que ça ne se reproduise plus », a-t-il écrit sur Twitter.
Nous sommes satisfaits que les barricades de Kahnawake & de Listuguj soient enfin levées. Les effets négatifs qu’ont eus ces blocus notamment sur les usagers du transport en commun & sur l’économie sont déplorables. Il faut trouver des solutions pour que ça ne se reproduise plus.
— François Legault (@francoislegault) March 5, 2020
Cependant, il faudra d’autres gestes à long terme pour régler l’enjeu des droits territoriaux et des ressources naturelles, a laissé entendre le Conseil mohawk de Kahnawake, qui se soucie notamment des relations avec les Québécois francophones.
« Tout le monde est content de la levée du blocage, ça a pris du temps, mais les gens doivent réaliser que nos processus ne sont pas aussi rapides que d’autres », a commenté l’attaché politique du Conseil, Joe Delaronde, en entrevue avec La Presse canadienne.
Rappelons que des manifestants avaient bloqué la voie ferrée du Canadien Pacifique sur cette réserve en banlieue de Montréal, en solidarité avec des chefs héréditaires wet’suwet’en qui contestent le passage d’un pipeline sur leur territoire, en Colombie-Britannique.
« La solidarité demeure », a souligné M. Delaronde, qui a ajouté qu’il faut maintenant laisser les Wet’suwet’en prendre leurs décisions.
« On va leur donner du temps pour qu’ils fassent ce qu’ils ont à faire. Nous avons espoir et nous sommes confiants qu’ils feront ce qu’il faut. »
Toutefois, on aurait tort de croire qu’il s’agit d’un règlement définitif du lourd contentieux actuel entre les Autochtones et les gouvernements, a-t-il commenté.
« Rien n’est absolument définitif, mais j’espère que le message était clair: nous devons parler face à face », de nation à nation, le Canada, le Québec et les Autochtones, a-t-il ajouté.
M. Delaronde dit être « réaliste » et être conscient du «ressentiment» qui existe actuellement envers les Autochtones. « On doit reconstruire des ponts qui ont sauté », a-t-il illustré.
Selon lui, le «problème» de la communauté mohawk est la barrière linguistique: elle parle anglais. Il dit avoir perçu dans les médias l’irritation des Québécois parce que les Mohawks ne parlent pas français.
Ce n’est « pas une rébellion » contre le français, a assuré le porte-parole, qui a tenu à apporter des précisions historiques. Il a rappelé que sa communauté parlait français et mohawk jusqu’à la fin du 19e siècle, quand plusieurs membres sont partis travailler dans l’industrie de l’acier aux États-Unis. Ils sont alors revenus avec l’anglais comme deuxième langue.