La population de langue anglaise a beau diminuer au Québec, les établissements d'enseignement en anglais, tous niveaux confondus, sont de plus en plus fréquentés, nous révèlent les statistiques dévoilées en vrac cette semaine par l'Office de la langue française du Québec.
Le réseau de l'éducation de langue anglaise a le vent dans les voiles depuis les années 1990. La croissance du nombre d'élèves dans les écoles primaires et secondaires ainsi que dans les cégeps anglais s'explique par la plus grande fréquentation des francophones et, dans une moindre mesure, des allophones.
Voilà un des constats qu'on peut tirer de l'analyse des données publiées dans le fameux Rapport sur l'évolution de la situation linguistique au Québec, rendu public mercredi par l'Office de la langue française.
Alors que le secteur français est frappé de plein fouet par la décroissance démographique, le secteur anglais connaît une augmentation de clientèle. Au primaire et au secondaire, les effectifs des écoles françaises ont chuté de 4,8 % entre 1992 et 2002 tandis que ceux des écoles anglaises ont augmenté de 10,6 %. La tendance s'observe aussi au collégial, où les cégeps français ont vu leur clientèle fondre de 18,1 % entre 1995 et 2004 tandis que celle des collèges anglais augmentait de 1,7 % (4 % de plus depuis 2000).
Ces données se répercutent également sur le poids relatif des secteurs français et anglais. Au primaire et au secondaire, la proportion d'élèves dans le réseau français a diminué de 1,4 point de pourcentage entre 1992 et 2002, au profit du réseau anglais. Ainsi, 89 % des élèves fréquentaient une école française en 2002 et 11 % une école anglaise.
Au collégial, la proportion d'étudiants inscrits au secteur français est passée de 83,3 % en 1995 à 82,2 % en 2004 tandis que celle des collégiens inscrits au secteur anglais passait de 14,6 % à 16,6 % (les autres collégiens fréquentaient des programmes où l'enseignement était mixte).
À cause des francophones
Professeur de sciences de l'éducation à l'Université du Montréal, Jean-Pierre Proulx constate que la croissance des réseaux anglais est principalement attribuable à la hausse de fréquentation de la part des francophones. «Il y a plus de monde à l'école anglaise qu'il y en avait. Cela avait déjà été remarqué par le président de la Société Saint-Jean-Baptiste il y a quelque temps. Il pensait que c'étaient des immigrants qui contournaient la loi 101. Mais en réalité, on voit maintenant l'explication: ce sont les francophones qui vont plus à l'école anglaise que jadis. C'est quand même étonnant», affirme M. Proulx.
Le nombre d'élèves de langue maternelle française fréquentant l'école anglaise a presque doublé entre 1992 et 2002, passant de 10 822 à 20 413, tandis que la clientèle anglophone diminuait de 2,4 % et que la clientèle allophone augmentait de 20 %. Plusieurs hypothèses peuvent être élaborées pour expliquer cette tendance alors que la loi 101 réserve la fréquentation des écoles anglaises à la minorité anglophone. Il peut par exemple s'agir d'élèves issus de mariages mixtes, dont un des parents a fréquenté l'école anglaise, ou encore d'élèves originaires du Canada anglais où un parent a étudié en anglais.
Quoi qu'il en soit, on note entre 1992 et 2005 une augmentation de 10 % du nombre d'enfants admissibles à l'enseignement en anglais en vertu de la loi 101, pour un total de 127 574 élèves. Là encore, le nombre d'élèves de langue maternelle anglaise est en décroissance tandis que celui de langue maternelle française ou tierce est en hausse. On constate cependant qu'un plus grand nombre d'enfants ayant le droit de fréquenter l'école anglaise sont dans les faits inscrits dans le réseau français (en hausse de 28 %).
Au collégial, on constate aussi une augmentation de deux points de pourcentage du nombre de diplômés du réseau français (peu importe leur langue maternelle) ayant opté pour le cégep en anglais entre 1995 et 2005 (de 5,8 % à 7,9 %).
On observe cependant depuis 2001 que les allophones diplômés du secondaire français ont de moins en moins tendance à s'inscrire au cégep en anglais. C'était le choix de 39,5 % d'entre eux, comparativement à 45,8 % en 2001.
Universités
Les universités anglaises ne sont pas en reste. Si toutes les universités québécoises ont connu une croissance de leurs effectifs de 9,4 % entre 1995 et 2003, l'augmentation a été encore plus marquée dans les universités anglaises, soit 12,1 %.
On observe par ailleurs que les étudiants de langue maternelle française sont sous-représentés dans les universités par rapport au poids relatif de la population québécoise de langue française.
On constate également une très légère hausse du nombre de francophones dans les universités anglaises, soit de 5,9 % en 1995 à 6,2 % en 2003. Le phénomène inverse s'observe chez les anglophones, moins nombreux à opter pour le français à l'université. Les allophones sont quant à eux plus nombreux à poursuivre leurs études universitaires en français (la proportion passe de 47 % à 50,7 %).
Les francophones nourrissent la croissance du réseau anglais
Le réseau français, lui, est frappé de plein fouet par la crise démographique
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