Réplique à Jimmy Lee Gordon

Les dangers du nationalisme

Quand on a des lettres...

«L’identité nationale est un vestige tribal dont l’être humain semble incapable de se départir.» Ainsi commence un brûlot publié jeudi dans Le Devoir, rédigé par Jimmy Lee Gordon, un Québécois francophone né d’un père américain. Le titre - dont j’ignore s’il est de l’auteur ou du pupitre du journal - est déjà provocateur: [«Les dangers du nationalisme.»->20957]
Comme tous les pamphlets, ce texte à la fois bien écrit et excessif. Et comme beaucoup de pamphlets, il dit quelques vérités mais les dit de façon tellement carrée que la forme nuit probablement davantage au fond qu’elle ne l’aide.
Je suis fédéraliste. Je suis aussi nationaliste. J’aime le Québec. Le territoire, les paysages, les chants, la langue, l’histoire sont dans mes tripes. J’estime que les fédéralistes qui pourfendent le nationalisme québécois font fausse route. Le nationalisme d’ici a été, pour l’essentiel, une force positive.
Toutefois, je ne suis pas naïf. Je sais que la nationalisme peut facilement tomber dans les abus, dans la bêtise, l’intolérance, et même la violence. Aucun nationalisme (le québécois comme le canadien) n’est à l’abri de tels dérapages. Tout dépend des circonstances. Les nationalistes doivent donc être lucides et vigilants.
Quand Jimmy Lee Gordon écrit: «Il serait peut-être temps que les Québécois de langue française saisissent tout le danger et toute la stupidité du chauvinisme», il égale tout nationalisme au chauvinisme, et en cela il se trompe. Le chauvinisme, c’est un nationalisme excessif. Le Québec n’en est pas exempt, loin de là. Mais le nationalisme québécois n’est pas que chauvinisme.
Gordon poursuit: «Mes idées ont traversé tous les courants, du fédéralisme opportuniste au souverainisme extrémiste. Aujourd’hui, en tant qu’adulte instruit en pleine possession de son jugement, je stagne confortablement dans un bourbier de cynisme et d’indifférence.» Ce passage est important, à mes yeux, parce qu’il décrit bien l’opinion de beaucoup de jeunes Québécois sur le débat national.
Cet autre passage du texte de Gordon, qui est étudiant à la maîtrise en lettres à l’Université McGill, vaut aussi la peine d’être retenu: «J’ose affirmer que les lois ne forment pas l’identité nationale, que les lois ne motivent pas les gens à bien parler le français (…) C’est par l’amour sincère de sa langue que l’on bâtit une collectivité forte et unie; c’est par un amour quotidiennement fortifié du plaisir de parler, de chanter et de pleurer en français que l’individu contribue à la conservation de son patrimoine collectif.» Autrement dit, si l’on veut que le français se porte mieux au Québec, ce n’est pas d’une nouvelle loi 101 ou d’une constitution québécoise que (sic) nous avons besoin. Il faut que nous, les Québécois, nous (sic) efforcions de promouvoir l’usage du français, d’abord en le parlant et l’écrivant correctement.
«J’affirme que le peuple francophone de ce continent n’est plus politiquement menacé; j’affirme que ce peuple est fort de ses institutions, de son histoire et de sa production culturelle; j’affirme que l’on vit bien au Québec.» J’en suis. C’est pourquoi, à mon avis, nous n’avons rien à gagner à se lancer dans l’aventure de la séparation, pardon de l’indépendance, pardon de la souveraineté, pardon du pays.
«Il est temps que le Québec sorte de sa névrose identitaire», conclut Jimmy Lee Gordon. C’est une particularité de notre nationalisme: en même temps que nous sommes fiers de ce que nous sommes, nous sommes obsédés par notre prétendue fragilité alors que nous n’avons jamais été aussi solides.
Le texte de Jimmy Lee Gordon devrait être lu par tous ceux qui s’intéressent à la question nationale québécoise. Bien des gens ne seront pas d’accord avec l’ensemble ou avec tel passage. Il reste que cet appel à la prise en main des Québécois, à la responsabilisation, à la véritable autonomie, est des plus pertinents.
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Photo François Roy, La Presse

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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