Histoire de détourner des regards trop appuyés sur l'affaire Woerth-Bettencourt et sa kyrielle de scandales, Nicolas Sarkozy a déployé ces jours-ci l'artillerie lourde. Les cibles, car il y en a plus d'une, s'appellent les Roms et les délinquants d'origine étrangère. Après avoir appliqué une politique d'expulsion visant les premiers, voilà que le président envisage la dénaturalisation des seconds. Bref, pour la énième fois depuis qu'il est à l'Élysée, Sarkozy agite la carte de la surenchère sécuritaire.
Le dessein de cette intervention qui ne dit pas son nom est clair comme de l'eau de roche: happer le maximum de voix au Front national lors de la présidentielle de 2012. Séduire un électorat sensible aux sirènes de la droite de la droite comme à l'esprit de corps «franco-français». D'où cette idée donc de retirer la citoyenneté de la République française à celui qui aurait attenté à la vie d'un policier, d'un gendarme ou de tout autre individu représentant les forces de l'ordre.
Comme il est à la manoeuvre, l'électorale s'entend, l'UMP a fait savoir par la voix d'un de ses députés qu'une loi serait présentée cet automne qui viserait, elle, les parents de mineurs délinquants. Si les autorités constatent que tel mineur n'a pas respecté les conditions qui lui ont été imposées, alors sa mère comme son père seraient passibles d'une peine de deux ans de prison ferme.
S'il est vrai qu'il y a une hausse des violences, et donc des angoisses que cela induit, il n'en reste pas moins que la posture adoptée par le président est enrobée d'une bonne dose de démagogie et d'effronterie. Pour s'en convaincre, il suffit d'ausculter les chiffres afférents. Et alors? Depuis 2007, depuis que Sarkozy est président, 10 000 postes de policiers et de gendarmes ont été supprimés.
À Grenoble et sa banlieue, où il y a eu des affrontements il y a une dizaine de jours, les forces de l'ordre ont diminué de 20 % en cinq ans. Entre les compressions budgétaires réalisées et celles annoncées pour les deux prochaines années, on assiste à une réduction massive de fonctionnaires qui s'est d'ores et déjà traduite par une désorganisation des administrations concernées. On a constaté, par exemple, que la connaissance du terrain, du milieu de vie, avait fondu comme neige au soleil.
Cela rappelé, Sarkozy s'est avéré le premier président dans l'histoire de la Ve République, soit depuis 1958, à faire le lien entre l'immigrant d'origine et la délinquance. En fait, comme l'ont souligné des historiens comme des politologues, la déchéance de la nationalité rappelle les sombres mesures prises par le régime de Vichy. Dans un entretien accordé au quotidien en ligne Médiapart, l'historien Patrick Weil souligne: «[...] il crée une nationalité éternellement conditionnelle pour des Français qui auraient des ancêtres étrangers. [...] Ce serait du jamais vu depuis la période la plus noire de notre histoire, et à rebours de toute l'évolution de la sécurisation de la nationalité depuis la Seconde Guerre mondiale.»
En agissant de la sorte, Sarkozy prend également à rebours l'article 1 de la Constitution, article fondamental qui stipule que la France «assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion». Il n'y a rien à ajouter.
Les attaques de Sarkozy - La dérive
la posture adoptée par le président est enrobée d’une bonne dose de démagogie et d’effronterie
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