Elle s’appelle Chani Aryeh-Bain, candidate conservatrice dans la circonscription de Eglinton-Lawrence, à Toronto, aux prochaines élections fédérales.
Juive orthodoxe, elle a contesté devant la Cour fédérale la décision du Directeur général des élections du Canada (DGE) d’appliquer la loi qui fixe la date de la prochaine élection au 21 octobre.
Motif ? Le 21 octobre tombe en conflit avec la fête juive de Shemini Atzeret durant laquelle les juifs pratiquants ne travaillent pas.
Un DGE discriminatoire ?
La décision rendue par la Cour fédérale, le 23 juillet dernier, semble lui donner raison puisqu’elle ordonne au DGE de reconsidérer ses options.
La candidate conservatrice juge déraisonnable le maintien de la date du 21 octobre et demande son report au 28 octobre, afin de lui permettre de faire campagne, de sortir le vote dans sa circonscription et d’aller voter elle-même, ce jour-là.
En fait, il en va de sa propre élection dans la circonscription de Eglinton-Lawrence qui compte 5000 électeurs juifs orthodoxes. Or, le libéral Marco Mendicino a battu son rival conservateur Joe Oliver, à l’élection de 2015, par à peine 3500 voix.
La religion ne doit pas interférer dans la vie démocratique et le DGE n’a pas de motif raisonnable pour chambarder l’organisation des élections, à trois mois d’avis, à l’échelle de tout le pays.
Ce qui lui est demandé engendre une contrainte excessive, pour l’institution du DGE, pour le gouvernement, pour les partis politiques et surtout pour les contribuables canadiens et québécois qui doivent en assumer les frais.
Quand l’extrême mène
La candidate conservatrice a raconté à Global News, le 16 juillet dernier, qu’elle avait eu son investiture, en avril dernier, et c’est plus tard qu’elle a regardé le calendrier et constaté que le 21 octobre allait tomber en conflit avec sa fête religieuse.
Difficile à croire quand on sait à quel point la vie des juifs orthodoxes est arrimée à leur calendrier hébraïque.
Difficile à croire aussi, car le sujet est en discussion avec le DGE depuis des mois. Le président du Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA), Shimon Koffler Fogel, l’a affirmé. Son organisme est en lien avec le DGE à ce sujet depuis un an.
De plus, plusieurs députés et candidats juifs (libéraux et conservateurs) du Québec et de l’Ontario ont sensibilisé le DGE à cet enjeu.
On le voit. Les communautés juives ne sont pas monolithiques. Il y a ceux qui choisissent la voie du dialogue et ceux qui choisissent la confrontation pour imposer leurs valeurs religieuses à tout un pays.
Le DGE s’est d’ailleurs montré très ouvert aux représentations qui lui ont été faites. Il a pris les moyens pour faciliter l’exercice du vote aux citoyens juifs, notamment en ajoutant du personnel dans les bureaux de vote à forte concentration juive.
Le président du CIJA a eu le courage de reconnaître que « changer la date à ce stade entraîne des implications logistiques et financières considérables » (The Canadian Jewish News, 24 juillet 2019).
En effet. Le mieux vivre commande de ne pas se laisser mener par les éléments extrêmes, sinon nous serons condamnés à vivre sous la tyrannie des minorités.