La soupe francophone

XIème Sommet de la Francophonie à Bucarest


Pour que le Sommet de la Francophonie de 2008 à Québec soit une réussite, il faut que cet ensemble politique accélère son renouveau. C'est impératif.
À quoi devrait se mesurer le succès des sommets francophones, dont le onzième se déroule jusqu'à ce soir en Roumanie ? Au nombre sans cesse croissant de pays qui y participent ? Absolument pas !
On peut bien dire, comme l'expriment quelques ténors du club, que l'attrait qu'exerce la Francophonie auprès de nombreux États du monde témoigne de sa vitalité. C'est vrai. Mais attention : cet argument est également trompeur.
Ceux qui le propagent tentent de faire oublier que de nombreux pays ont cogné à la porte de l'Organisation internationale francophone simplement parce qu'ils jugeaient utile de s'intégrer à une énième instance mondiale.
Certains États membres n'ont rien de "francophones". Ils se sont insérés dans cet ensemble parce que ses règles d'adhésion ont longtemps été trop permissives. Une erreur dont la planète francophone paye encore le prix.
Le problème, c'est qu'en s'élargissant à des pays comme la Bulgarie, le Laos, la Pologne ou maintenant Chypre, la Francophonie s'est éparpillée. Elle est devenue un objet politique non identifié.
Certes, elle défend la diversité culturelle. C'est d'ailleurs sous ce chapeau de la sauvegarde des différentes identités culturelles et linguistiques que la soixantaine d'États qui la composent peuvent aujourd'hui justifier leurs liens, affirmer pompeusement que c'est cette défense qui les rassemble.
Mais n'oublions pas que c'est le Québec, le Canada et la France qui ont porté ce dossier à bout de bras. La Francophonie a fini par servir de relais. C'est tout.
Le succès de la Francophonie devrait se mesurer à son apport concret, à ce qui n'aurait jamais pu être réalisé sans elle - ou sans les sommets qui réunissent les chefs d'État et de gouvernement tous les deux ans.
Ce n'est pas en apparaissant comme une petite ONU qu'elle retrouvera sa raison d'être. C'est en cessant de se disperser à tout vent. En concentrant ses missions. En se fixant des objectifs clairs et précis avec des échéanciers à la clé.
Il y a trois ans, quand il devenait évident que le 12e Sommet de la Francophonie se tiendrait à Québec, nous rappelions que ces grands-messes ne vont pas sans inconvénients. Pensons à la circulation et à la sécurité. Même si on en rit aujourd'hui, on peut être sûr que ces thèmes alimenteront bien des discussions d'ici les prochains mois.
Nous ajoutions que le cercle de citoyens prêts à supporter un certain niveau de désagréments s'élargirait si tous avaient la conviction que ces rencontres servent vraiment à quelque chose. C'est toujours ce que nous croyons.
Le sommet de Bucarest indique le genre de voies à suivre. Nous ne pensons pas ici aux déclarations à propos du Liban, du Darfour ou d'Haïti. Elles auraient pu être faites n'importe où ailleurs. Tout comme l'allocution du premier ministre Stephen Harper, qui a tant plu au président français Jacques Chirac, même si elle n'est qu'une version réaménagée de celle qu'il livre depuis quelque temps.
Nous pensons plutôt à des éléments tangibles de ce sommet. Les participants se sont en effet penchés sur les "technologies de la communication en éducation", notamment pour favoriser l'enseignement à distance.
Dans un monde où autant d'enfants ne sont pas scolarisés, notamment en Afrique francophone, voilà un apport qui pourrait être appréciable - s'il est suivi d'actions, bien sûr.
C'est en tout cas le genre d'actions que nous attendons de l'espace francophone. C'est là qu'il peut faire une différence.
jmsalvet@lesoleil.com


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