« La Russie lâche Damas et l’ONU s’agite », titrait le journal Libération le samedi 17 décembre (1). Le quotidien jaune – propriété du milliardaire Édouard de Rothschild – s’agite depuis quelques mois, à l’unisson avec quelques autres torchons français, et réclame une agression ‘humanitaire’ contre la Syrie victime d’infiltration d’escadrons de la mort, de snipers et de mercenaires bénéficiaires de l’aide française, turque, israélienne et américaine (2).
Le journal obéissant à son créancier – officier de l’État-major Sarkozyste – se réjouit vertement du revirement diplomatique russe, qui, jeudi le 15 décembre 2011 présentait à l’ONU un projet de proposition sur la Syrie coincée entre la Caspienne et la Méditerranée.
Le lecteur qui ne lirait que le titre et le chapeau de l’article aurait la fausse impression que le Kremlin capitule complètement et s’apprête à soutenir une résolution à «la libyenne» au Conseil de sécurité de l’ONU. Autant dire que les aviations franco-britannique et israéliennes obtiendraient l’autorisation de bombarder la population civile, massacrant des milliers de syriens sous prétexte d’empêcher leur massacre – un ‘remake’ du tragique drame libyen, du « déjà vu », écriraient les scénaristes hollywoodiens.
La lecture attentive de l’article révèle cependant la véritable nature du projet de résolution que le cynique ambassadeur français à l’ONU a qualifiée de «manœuvre russe» pour duper la ‘communauté internationale’. En effet, dans son projet de proposition le Kremlin suggère de condamner les violences de toutes les parties (y compris des djihads soutenus par l’OTAN et des snipers payés par la CIA) et dénonce l’illégal approvisionnement en armes et munitions des escadrons de la mort implantés en Syrie par quelques puissances étrangères, une allusion évidente à la France, la Turquie, Israël et les États-Unis (3).
La position de la diplomatie russe a très peu changé si ce n’est qu’elle a effectivement pris l’initiative d’une proposition de résolution au Conseil de sécurité afin de permettre aux journalistes à la solde de l’AFP, de Libération, du Monde, du Figaro, de TF1 et TF2 d’accréditer le mensonge d’un soi-disant isolement de Damas sur la scène internationale, ce qui est strictement faux. Un grand nombre de pays soutiennent le gouvernement syrien légitime mais les médias occidentaux ne le rapportent pas.
Chacun est cependant en droit de se demander le pourquoi de ce compromis de la diplomatie russe qui avait jusqu’ici condamné tout rififi en Syrie? Quelques pages plus loin le journal Libération fournit réponse à cette question.
Après dix-huit ans de négociation entre le Kremlin et l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) – les États-Unis ayant récemment levé leur véto – la Russie fait son entrée à l’OMC. Voilà pour les trente deniers (4).
Le plus long marathon de tractation de l’histoire de l’OMC se solde par la capitulation de Washington et la victoire du parangon de l’organisation. Cependant le peuple russe ne doit rien attendre de cette adhésion si ce n’est l’asservissement de leur économie nationale aux diktats de cet organisme de commerce international. L’Europe est depuis longtemps assujettie à cette dictature avec les résultats financiers et commerciaux que l’on sait.
La politique et la diplomatie sans principe des puissants de ce monde donnent souvent lieu à ce type de tractation : La Russie trahit la Syrie pour le bénéfice des États-Unis qui en retour accommodent la Russie auprès de l’OMC – et la roublarde Russie tente de ne pas livrer le supplicié et de finasser sur le libellé du papier à déposer au Conseil de sécurité. Car la Russie maintient une vieille alliance de guerre avec la Syrie et elle entretient une base militaire à Tartous sur la Méditerranée. Les puissances impérialistes jouent ainsi sans état d’âme avec la vie des peuples qui leur sont assujettis.
L’éditorialiste du journal Le Monde, informé de la manigance russe pour obtenir son ticket d’entrée à l’OMC, sans accoucher du libellé de résolution souhaité propose comme alternative de créer un «groupe de contact» sur la Syrie, auquel le premier intéressé, le gouvernement syrien légitime, ne serait pas convié, ni la Chine, ni les nombreux pays qui supportent la Syrie. Seuls y participeraient la Russie stipendiée, la Ligue Arabe de triste renommée, et la ‘communauté internationale’ de Sarkozy et d’Obama, c’est-à-dire les quelques pays qui présentement arment et financent illégalement les djihadistes infiltrés, les bandits en liberté et les snipers payés par leurs affidés et qui sévissent contre la population syrienne dans les rues d’Homs et d’Alep (5).
Un tel «groupe de contact» sur la Syrie comploterait contre le peuple syrien à l’identique du groupe de contact créé il y a des années sur la question de la colonisation et de l’occupation de la Palestine par les criminels de guerre sionistes avec pour seul résultat d’assister avec complaisance au bombardement de Gaza, la ville martyr, et de condamner le Hamas d’avoir résisté à son extermination.
La Russie défend ici ses intérêts impérialistes et joue la vie des syriens pour obtenir quelques avantages pour les siens – la France et les États-Unis défendent leurs intérêts impérialistes – et complotent pour faire tomber le gouvernement de el Assad inféodé au Kremlin afin d’y imposer un nouveau gouvernement inféodé à l’Élysée. Quel intérêt y a-t-il dans tout cela pour le peuple syrien ?
Tous ces puissants espèrent que par la suite la route de Téhéran sera ouverte pour les hordes barbares européennes et les légions étrangères du Nord. Tous ces malfrats oublient que Bagdad sous domination iranienne bloque toujours la route vers les puits iraniens et que le Détroit d’Ormuz est toujours aussi vulnérable aux armes de Téhéran (6).
Triste «Printemps arabe» où des révoltés souffrent et meurent Place Tahrir, à Tunis, au Bahreïn ou à Sanaa pensant contribuer à libérer leurs pays ravagés par la peste impérialiste d’une alliance comme d’une autre, d’un camp comme d’un autre, chassant un tyran avant qu’un autre s’installe sur le trône des «Rois nègres arabes» pour imposer les mêmes soumissions, les mêmes trahisons, les mêmes collaborations avec les puissances qui ont manigancé pour les imposer. Toute cette mascarade porte le nom de démocratie bourgeoise en néo-colonie ; c’est de cette parodie de démocratie impopulaire que les peuples arabes doivent se défaire. Le pouvoir des peuples arabes est dans la rue, juste au bout du fusil (7).
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(1) «La Russie lâche Damas à demi-mot, l’ONU s’agite» Libération. Samedi-dimanche 17.12.2011. Page 10.
(2) «L’ambassadeur américain à Damas recrute des insurgés». Silvia Cattori. 27.11.2011. http://www.silviacattori.net/article2426.html
(3) http://www.dailymotion.com/video/xmjfm2_1-2-webster-tarpley-intervient-depuis-la-syrie-s-t_news?start=0#from=embediframe
(4) «La Russie intègre finalement l’OMC». Libération. Samedi-dimanche 17.12.2011. Page 19.
(5) «Il faut créer un groupe de contact sur la Syrie». Le Monde. Lundi 19.12.2011. Page 1.
(6) http://www.france-irak-actualite.com/article-150-000-collaborateurs-irakiens-abandonnes-par-les-troupes-americaines-94155578.html
«Menacer l’Iran et préparer l’invasion de la Syrie». Robert Bibeau. 17.11.2011. http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=27724
(7) «Le plan américain de Grand Moyen-Orient bat de l’aile.». Robert Bibeau. 19.10.2011. http://www.centpapiers.com/le-plan-americain-de-%C2%ABgrand-moyen-orient%C2%BB-bat-de-l%E2%80%99aile/84557
La Russie lâcherait-elle la Syrie?
Comment naviguer entre deux mers?
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2 commentaires
Robert Bibeau Répondre
11 mai 2012Vous n'êtes pas boudhiste mais vous pratiquez le Zen le Tao et vous confondez le Yin et le Yang.
Vous faites l'histoire comme certains écrivent un roman - avec des relents d'historicités hors contexte - dématérialisé.
Vous abondez à propos des slaves - La Syrie n'est pas slave il me semble.
Une classe dominante s'appui toujours sur une économie - des forces productives et des rapports de production - Celles en vigueur dans la Russie tsariste semi-féodale - ne sont pas celles en force aujourd'hui d'ou la politique Russe diffère aujourd'hui. La Syrie a établit des rapports avec l'Union Soviétique à l'époque ou les pays sociauz-fasciste (pseudos socialistes) ont pris pied au Moyen-Orient et la Syrie gravite dans l'orbe Russe depuis ce temps. Les liens sont très concrets et n'ont rien a voir avec le boudhisme (ni l'islamisme puisque vous tenez à introduire la religion dans ce propos)
La Russie vend des armes à la Syrie et ele lui fournit des techniciens - elle achète certains de ses produits et elle paie pour avoir une base militaire sur le sol syrien.
Archives de Vigile Répondre
10 mai 2012Monsieur Bibeau,
La politique extérieure russo/soviétique n'a jamais changé à travers les âges.
Ni les tsars, ni les bolcheviks, ni Staline, ni le reste, et ni le Poutine actuel ne font exception.
La politique soviétique en était une de panslavisme où Moscou domine, tout comme était celle des tsars. Avec Poutine, c'est la même chose. La Russie ne domine plus le monde slave, mais elle recherche toujours sa sécurité par le concept des États "tampons".
C'est très russe cette façon de faire de la politique. Limiter au possible ce qui peut s'ingérer dans la nation, tout en s'autorisant soi-même de dicter aux marges la marche à suivre.
La Russie est un monde mal compris. Impérialiste, oui, mais elle le fait pour donner cohésion à son univers historique, pas pour conquérir le monde. La Russie est fondamentalement nationaliste au niveau de l'État, ce qui n'est pas le lot des nationalités qui composent la Russie.
Être russe est en soi compliqué. Vivre avec des centaines d'années de tsarisme derrière, combiné avec la plus belle révolution ratée que nous ayons connue, pour aboutir à un régime poutinien qui ramème la nation - éclatée de par ses nationalités multiples - à ce que Kerenski souhaitait faire à l'aube du 20e siècle, mais avec en prime la corruption étatisée actuelle, tout cela ne peut mener qu'à une crise permanente.
Je ne suis pas boudhiste, mais la Russie vit un karma perpétuel. Ils sont ainsi, et on n'y peut rien. Eux-mêmes ne peuvent rien y faire. Il y a la planète Terre, et il y a la planète Russie, la mère.
Le destin de la Russie demeure incertain et il le restera toujours. L'âme russe est ainsi faite.