La richesse? Est-ce bien économique? Ou sociale? Ou environnementale? Ou culturelle? Peut-on chiffrer la richesse? Toute la richesse? Quelle valeur donner à la paix? Ou à la guerre? Quelle valeur donner à la cohésion sociale ou à la concurrence identitaire? Peut-on mettre un chiffre sur le bon air et le sol non-pollué? L'engagement citoyen, le bénévolat, le militantisme? Est-ce solvable?
Ne sommes-nous pas prisonniers de la pensée dominante qui veut que la richesse soit d'abord matérielle. Non seulement matérielle mais issue d'activités marchandes. Et que dans les activités marchandes, seules celles ayant un caractère capitaliste sont "sérieuses" et à considérer comme appartenant à la véritable économie. Et que pour être sérieuses, ces activités sont nécessairement sous la direction de grands ensembles. Autrement dit, l'économie c'est l'affaire des gros. Des gros qui brassent beaucoup d'affaires et qui font beaucoup d'argent. Et que c'est de ce monde qu'il faut que nous nous préoccupions. Parce qu'ils ne nous coûtent rien et qu'ils rapportent gros!
Ils ne nous coûtent pas rien. Au contraire. C'est la qualité de l'intrant non marchand qui permet à l'économie privée capitaliste de performer selon ses propres critères. Une société scolarisée (système d'éducation), en bonne santé (système de santé), qui se déplace facilement (réseau de transport et transport public), qui garantit un minimum de répartition de la richesse (normes minimales, droits collectifs d'association et de négociation), qui planifie son développement (institutions économiques, énergétiques, de recherche et de développement, etc) et qui soustrait de la sphère marchande des activités de base en les finançant avec une caisse commune injecte dans la sphère marchande privilégiée de l'économie privée des doses massives de richesse non marchande qui permettent à ce secteur de prospérer.
Disons le autrement. On qualifie d'"investissements" les sommes que les individus consacrent au développement d'activités qui produisent de la richesse marchande. On qualifie de "dépenses" les sommes que collectivement nous consacrons au développement d'activités qui produisent de la richesse non-marchande. Et pourtant ce sont ces "dépenses" qui font toute la différence entre les sociétés qui performent le plus et celles qui performent le moins. Ne devrait-on pas qualifier les deux types de contributions comme étant toutes les deux des investissements? Des investissements marchands et des investissements non marchands. Ce faisant, peut-être aurions-nous moins de difficulté à convaincre tout le monde, y compris les entreprises, de contribuer équitablement à la caisse commune.
La richesse est plurielle. Elle est économique, sociale, environnementale, culturelle, etc. Également est pluriel son mode de production. Tantôt ce sont les individus qui prennent des initiatives de produire des biens et des services et de les échanger dans la rencontre d'une offre et d'une demande. C'est l'économie privée, globalement de type capitaliste. Tantôt, c'est collectivement que nous confions à l'État le soin de développer des secteurs d'activités en fonction de l'intérêt général de la société. C'est l'économie publique. Et tantôt ce sont des groupes démocratiquement organisés qui conduisent des activités pour répondre à leurs propres besoins ou pour satisfaire leurs propres aspirations. C'est l'économie sociale et solidaire. Les trois économies existent. Elles sont d'inégales importances. Mais aucune d'elle n'est négligeable. Et les trois produisent de la richesse. Les unes davantage marchandes, les autres davantage non-marchandes. La mixité de cette économie est au coeur du modèle québécois.
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