Violence policière

La police est l’instigatrice (25 avril 2012)

Tribune libre

J’y étais hier, à la manifestation illégale. Je n’ai pas tout vu, évidemment, il y avait beaucoup de monde. Je n’ai pas tout vu, aussi, parce que je suis parti peu de temps après l’intervention volontairement provocatrice de la police, bras armé d’un gouvernement muet. Donc, je n’ai pas tout vu, mais j’en ai vu assez. J’en ai vu assez pour, de retour chez moi, avec encore le cœur battant, vous décrire mon interprétation de la situation.
Tout d’abord, il serait intéressant de commencer par citer Ian Lafrenière, porte-parole du SPVM : « Ce n'est plus une manifestation qui est pacifique, on doit vraiment rétablir l'ordre. On a affaire à des émeutiers et à des gens qui veulent faire la casse » (citation bien mise en évidence, en gras, sur le site de Radio-Canada).
Si la manifestation a, à un certain moment, cessé d’être pacifique, je n’en vois qu’un seul responsable : l’institution qui détient le monopole de la violence légitime, l’État québécois. Et l’État québécois, par les temps qui courent, comme nous le constatons péniblement jour après jour, est dirigé, administré, contrôlé par le gouvernement Charest.
Si la manifestation a cessé d’être pacifique, c’est uniquement à cause de l’intervention autoritaire de la police. Sans avertissement, sans déclaration à l’effet que la manifestation était devenue illégale, les agents de la paix ont commencé leur tactique de confrontation.
La marche, qui se poursuivait sur Sainte-Catherine, direction est, s’est abruptement arrêtée aux coins de Stanley ou Drummond, je ne sais plus. La foule s’est rapidement entassée, et je n’en comprenais pas la raison. J’ai donc regardé au loin, et j’ai vu, un coin de rue plus loin, un autobus de police avec les gyrophares allumés, avec probablement une rangé de policiers avec casque et bouclier pour, j’imagine, couper en deux les manifestants pacifiques. L’effet était toutefois de nous prendre en étaux, car d’autres policiers blindés marchaient juste derrière nous, cognant leur bouclier à l’unisson, pour nous déstabiliser et nous alarmer. Et derrière cette ligne de militaires en fonction, des polices-montés (6 environ).
La pression montait et un mouvement de foule a commencé. Les gens se sont dispersés vers l’est, vers le nord et vers le sud. J’ai pris direction est, toujours sur Sainte-Catherine. J’étais pas mal à la fin de la foule, accoté sur le mur d’une boutique, regardant les policiers s’approcher de plus en plus, toujours en train de cogner leur bouclier. Toujours en étaux, la foule ne pouvait plus bouger, à moins d’étouffer les plus petits et d’entraîner des victimes. Quand un policier est arrivé à ma hauteur, je lui ai dit : « Désolé, m’sieur, mais je ne peux plus avancer. » Il m’a donc répondu de quitter la foule et de me diriger à l’intersection, n’oubliant pas de me pousser généreusement. Probablement de la camaraderie.
Rendu à l’intersection, je ne pouvais pas aller plus loin, car la foule était compacte et les chevaux bloquait les mouvements. Je me suis donc juché le long d’une colonne du bâtiment du coin, me donnant ainsi une bonne vision des deux différents fronts. À ma gauche, la ligne de policiers blindés, dont l’un d’eux qui a violemment renversé une fille et qui, dès qu’elle se fut relevée, l’a bien gâté d’un puissant jet de poivre. Peut-être a-t-elle dit des mauvais mots. À ma droite, les 6 policiers montés qui bloquaient l’intersection en position demi-cercle. J’ai bien aimé un message scandé par la foule : « Libéraux les chevaux ».
Durant tout ça, j’ai bien vu des personnes crier des insultes aux policiers, j’ai vu la foule essayer de repousser les policiers montés, j’ai vu des manifestants enragés. Mais je les comprends, car ce que j’ai vu, auparavant, ce sont des policiers intervenir pour une seule et unique raison : s’assurer que la manifestation dégénère. Elle n’était probablement pas assez « violente ». Après tout, c’est le mot de l’heure, c’est l’argument invoqué ad nauseam par le gouvernement Charest pour expulser la CLASSE des négociations, c’est ce que les médias recherchent.
J’accuse la police (sincèrement, je devrais dire l’armée, car c’est ce que c’était) d’avoir déclenché le dérapage, d’avoir attisé le feu, d’avoir provoqué la « violence ». Avant, tout se passait bien. Peut-être y a-t-il eu une vitrine brisée, je n’en sais rien, car, comme je vous ai dit, je n’ai pas tout vu. Mais tout se passait bien, jusqu’à ce que la police nous prenne en étaux.
J’accuse le gouvernement Charest, qui est en train de mettre en péril la sécurité publique en évitant, consciemment, de prendre ses responsabilités. J’accuse le gouvernement Charest de réprimer, de plus en plus, l’expression de la jeunesse québécoise. Déjà que cette répression se faisait, insidieusement, par l’absence de volonté véritable de négocier. Maintenant, cette répression est physique et sans équivoque.
Bruno Montambault
Montréal


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2012

    Votre propos est confirmé ce matin 27 avril, dans Le Devoir, par une lettre à l'éditeur de l'étudiante en science politique Léa Clermont-Dion. Il vient préciser ce que l'excellente couverture de RDI, coordonnée de main de maître par Geneviève Asselin, nous avait déjà appris en direct ce mercredi soir honteux. L'évènement aura été pacifique, jusqu'à ce que la police du maire Tremblay perdent apparemment les pédales (?). Et c'est coïncidence que Charest et ses ministres aient tapper sur le clou de la «violence» estudiantine le lendemain, Dutil s'en prenant personnellement à Gabriel Nadeau-Dubois? Il y a quelque chose de pourri au royaume du Québec!

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2012

    C'est ce que je pense depuis le début.J'ai vu à la télévision l'aspergeage au poivre de cayenne les manifestants qui voulaient se déplacer.Les policiers
    voulaient les mâter.C'est tout simplement inacceptable.
    Le minus charest continu son oeuvre de destruction
    dela démocratie et du gros bon sens.

  • Lise Pelletier Répondre

    27 avril 2012

    M.Montambault,
    J'étais aussi présente à cette manifestation tout près de la bannière.
    Contrairement à vous, j'ai vu les policiers-robocop à la tête intervenir afin de diviser les casseurs-infiltrateurs des manifestants pacifiques.
    Naivement j'ai cru qu'ils allaient protéger ces derniers, mais non ils ont foncé en plein sur eux, donnant ainsi tout le temps aux casseurs de s'enfuir.
    Police politique qui ne protège pas le Peuple mais le pouvoir en place.
    Vivement des élections pour se débarasser de Charest et ses 40 voleurs.
    Lise Pelletier

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2012

    Je fus aussi témoin, mais sur Sherbrooke. Sur le chemin du retour, les policiers ont sans raison bloqué la rue Sherbrooke. Comme les gens s'en retournaient au point de départ, il n'y avait absolument aucune raison pour bloquer la rue. Ils ne sont sont pas contenté de bloquer la rue, ils ont utilisé les bombes assourdissantes et les gaz lacrymogènes, de la véritable provocation inutile. Les gens ont descendu dans le centre-ville par obligation, ce qui a perturbé davantage la circulation.
    On sépare la foule pour en prendre une partie en sandwich, voilà pourquoi on ne dévoile pas l'itinéraire. Je ne serais pas surpris que des gens soient payés par le Parti libéral pour faire de la casse. Trop d'étudiants sont matraqués inutilement, exigeons des élections. Il n'y aura pas d'abstention des étudiants aux élections. Les prises de positions de la CLASSE ne jusifient pas le trop grand nombre d'abus policiers. Ils ne peuvent être ignorés, oubliés. C'est la fin du gouvernement Charest. Une nouvelle révolution tranquille se fait présentement, on doit la soutenir et l'encourager.