Justin Trudeau ne cesse de prêcher en faveur de la diversité et de l’inclusion, au point d’en faire l’élément distinctif canadien par excellence. Mais si vous êtes un catholique contre l’avortement, par exemple, son gouvernement pourrait vous exclure de certains programmes d’aide à l’emploi.
Des organismes caritatifs et communautaires chrétiens l’ont appris à leurs dépens en remplissant le formulaire 2018 de demande de subvention dans le cadre du programme Emplois d’été Canada pour embaucher des étudiants.
Pour être admissibles, ces organismes doivent désormais attester qu’ils se conforment aux valeurs sous-jacentes à la Charte des droits et libertés. Rien de mal à cela : le gouvernement n’a pas à financer des initiatives contraires aux droits protégés par la Constitution.
Mais le formulaire inclut désormais les droits reproductifs et l’accès à l’avortement qui ne sont pas protégés par la Charte. Même pour des emplois qui n’ont rien à voir avec du militantisme pro-vie : moniteurs, jardiniers, cuisiniers, maîtres-nageurs, etc.
Cochez oui, cochez non
Il va sans dire qu’un organisme chrétien, je pense aux congrégations religieuses qui gèrent des camps de vacances, peut difficilement attester qu’il est pro-avortement sans mentir. Or, s’il refuse de cocher « oui », c’est bye bye emplois d’été et bye bye services à la population qu’il aurait rendus possibles.
Je devine la raison de cette nouvelle politique. Dans le passé, des groupes pro-vie ont utilisé l’argent du programme Emplois d’été Canada pour embaucher des militants pro-vie et faire du prosélytisme.
La députée libérale Iqra Khalid – à qui on doit la motion 103 contre l’islamophobie – avait consenti 56 695 $ l’an dernier à un groupe pro-vie controversé parmi les groupes pro-vie, dont la principale stratégie est de diffuser à grande échelle d’horribles images de fœtus avortés.
Considérant que le premier ministre exige de ses députés qu’ils soient pro-choix en Chambre, la décision de Mme Khalid de subventionner ce groupe n’a pas dû lui plaire. D’où peut-être l’excès de zèle actuel.
Mais exiger de tous les demandeurs de subventions dans le cadre du programme Emplois d’été Canada d’attester qu’ils sont pro-choix à cause de quelques dérapages équivaut à tuer un maringouin avec un missile de croisière.
Pas la place de l’État
Je suis pro-choix, mais la liberté de conscience – en version laïque, la liberté de penser – ne peut être ainsi attaquée par l’État. Ce n’est pas illégal d’être contre l’avortement (je déteste l’expression « pro-vie », nous sommes tous pour la vie) pas plus que ça ne devrait être illégal d’être pour.
L’État ne peut demander de trahir sa conscience pour obtenir une subvention.
Sans lien avec Dieu – à moins de le vouloir –, la conscience, cette petite voix intérieure, cette opinion du cœur qui nous dit ce qui est bien et ce qui est mal pour chacun d’entre nous, n’a pas à être contrôlée par l’État. Ni même examinée.
Trudeau père a dit que l’État n’avait rien à faire dans les chambres à coucher de la nation. J’aimerais entendre Trudeau fils dire que l’État n’a rien à faire dans la conscience des Canadiens.