À tort ou à raison, délibérément ou non, les ténors du Parti québécois viennent de choisir, en proposant leur Charte des valeurs, la voix de la confrontation, de la division, pour ne pas dire du clientélisme, à l'instar de Stephen Harper.
On peut s'en offusquer, mais, comme ils sont au pouvoir jusqu'à nouvel ordre, tous les cris de vierges offensées que nous pourrions pousser n'y changeront sans doute rien. Car il ne faut pas oublier une chose : une échéance électorale approche à grands pas. De là à penser que nous avons ici affaire à une manœuvre électoraliste, il y a un pas que je me permets de franchir allègrement ! Voici pourquoi.
Sommes-nous les témoins privilégiés d'un virage idéologique majeur ? Tout porte en effet à croire que le PQ vient de renoncer définitivement à essayer de séduire les minorités qui vivent au Québec. Le gouvernement Marois balaie ainsi d'un trait les diverses tentatives en ce sens qui ont été faites en vain depuis la fondation de ce parti. Le voile des illusions se déchire. Il y a Nous et il y a Eux, point à la ligne, et ce depuis toujours. Jacques Parizeau a commis la maladresse de nous le rappeler le soir du référendum de 1995.
Sa franchise aura-t-elle mis près de vingt ans avant de pénétrer les esprits ? Sommes-nous en train d'assister à une « lepénisation » du Parti québécois ? Ce parti chercherait à créer un “front national” contre les immigrants qu'il ne s'y prendrait pas autrement ! Au vu des prochaines élections qui ne sauraient tarder, les membres du gouvernement semblent avoir trouvé une « tactique » imparable visant à séparer « le bon grain » (les Québécois de souche) de « l'ivraie » (les « envahisseurs » auxquels fait référence André Pratte – http://www.vigile.net/Les-envahisseurs).
La levée de boucliers que provoque d'ores et déjà – tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Québec – ce projet controversé aura pour seul résultat de démontrer aux indépendantistes, souverainistes, fédéralistes mous et autres nationalistes québécois qu'il y a péril en la demeure, que ses valeurs fondamentales sont réellement menacées. Le PQ aura alors beau jeu de se présenter devant la population comme le seul « rempart » possible contre cette « menace », contre ce déferlement prévisible de haine – voire de violence – qui ne fait que commencer de s'abattre sur notre peuple et ne sera au fond que l'aboutissement de plus de 250 ans de mépris à notre endroit. La vérité, toute nue, va enfin éclater !
Par ailleurs, n'allez pas croire qu'il y a contradiction entre l'idée de faire la promotion de la laïcité et l'entêtement à vouloir conserver le crucifix à l'assemblée nationale. Au contraire, c'est parfaitement logique ! En évitant de choquer et de s'aliéner la frange la plus conservatrice de l'électorat francophone, les dirigeants du PQ font simplement un pari à saveur électoraliste.
Or, bientôt, chacun devra choisir son camp ! Les libéraux, qui représentent la formation politique la plus corrompue de toute l'histoire du Québec, deviendront à leur tour le rempart derrière lequel cherchera à s'abriter tout ce que le Québec compte d'anglophones, d'autochtones, d'allophones et d'immigrants. La Coalition Avenir Québec, Québec solidaire, Option nationale et les autres partis et groupuscules qui grouillent et grenouillent dans le paysage politique ne feront tout simplement pas le poids à côté de ces deux géants bien aguerris : le PQ leur aura coupé l'herbe sous les pieds en s'emparant à son propre profit de la question identitaire.
Le choc des titans ne devrait donc pas tarder. La démocratie s'en portera-t-elle mieux ? Le projet de pays progressera-t-il ? Qu'importe ! Faute de stratégie à long terme, les péquistes, tels des apprentis-sorciers, ont décidé de mettre le feu aux poudres. Ils risquent gros en ce faisant, mais ils n'ont de toute évidence plus rien à perdre. Sauve qui peut !