La Caisse de dépôt et placement du Québec a investi 13,2 milliards dans le papier commercial, dont «un peu moins d'un milliard» est exposé au secteur américain des hypothèques à risque, a affirmé hier son président, selon lequel la Caisse est malgré tout en «excellente santé financière».
L'impact de la crise pourrait cependant se traduire par une charge comptable en fin d'année, a reconnu Henri-Paul Rousseau lors de sa présentation très attendue en commission parlementaire des finances. Il ne pouvait prédire l'ampleur d'une telle provision.
«L'objectif de rendement à long terme des déposants est de 7 % et le rendement moyen des quatre dernières années a été de 14,15 %. La santé financière de la Caisse et des déposants est donc bonne, même très bonne. Les cotisants et les retraités québécois n'ont pas à s'inquiéter, a dit M. Rousseau. Ce ne sont pas les problèmes actuels dans le marché du papier commercial au Canada qui peuvent changer cela.»
Dans le pire des scénarios, a dit M. Rousseau, le papier commercial exposé au secteur américain des hypothèques à risque (les subprimes) pourrait entraîner une provision de 50 %, soit 500 millions. Pour le reste du papier commercial, soit 12,2 milliards, il n'a pas voulu avancer d'hypothèses mais a dit que cette somme, répartie dans plusieurs investissements distincts, reposait sur des actifs «de très bonne qualité».
Le papier commercial adossé à ces créances (communément appelé PCAA) est un placement à court terme qui génère un faible rendement mais a la réputation d'être peu risqué. Ce rendement est généré, par exemple, par des dettes de cartes de crédit, des revenus de voitures de location, ou même des hypothèques. Les fonds du marché monétaire en détiennent souvent.
Le marché du papier commercial au Canada s'est immobilisé au mois d'août lorsque les investisseurs institutionnels ont craint que la crise hypothécaire américaine ne fasse souffrir le PCAA au nord de la frontière. Plus personne n'en voulait. Le marché canadien au PCAA présentement gelé est d'environ 33 milliards, dont la Caisse détient 13,2 milliards.
Vers la fin du mois d'août, la Caisse, le Mouvement Desjardins, Deutsche Bank et d'autres détenteurs ont convenu d'un moratoire de plusieurs mois, le temps de transformer le PCAA en obligations à taux variable. Cette restructuration sans précédent est coordonnée par l'avocat Purdy Crawford, qui présentera une proposition le 14 décembre. L'objectif est que tous les établissements repartent avec l'intégralité de ce qu'ils détenaient à l'origine.
Débat sur la perte comptable
Lorsqu'un des membres de la commission, Gilles Taillon de l'ADQ, a commencé à faire des calculs pour déterminer la provision qui découlerait des 12,2 milliards, M. Rousseau l'a arrêté. «Je vais vous laisser vos chiffres, O.K.? Je ne les commenterai pas. [...] J'invite tout le monde à être prudent... On a un portefeuille diversifié et, dans la restructuration, on est beaucoup plus près du but qu'on ne l'était il y a un mois et demi.»
Le député péquiste François Legault, qui siège aussi à la commission, a estimé pour sa part que, si la Caisse suivait les mêmes règles de provision que ce qui s'est vu récemment dans le secteur privé, elle pourrait inscrire une provision d'entre 500 millions et 3,3 milliards.
M. Rousseau a fait valoir que, si la Caisse avait beaucoup de papier commercial, c'est parce qu'elle a besoin d'avoir un recours facile aux liquidités et non pas pour obtenir de meilleurs rendements. Il a fait remarquer que l'actif net des déposants est de plus de 140 milliards.
Le président de la Caisse a ventilé les sommes détenues par les déposants. Ainsi, le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP) en détient pour quatre milliards, la Régie des rentes, pour 2,8 milliards, le Fonds d'amortissement des régimes de retraite en possède quant à lui 2,7 milliards, la Commission de la construction du Québec, 854 millions, la CSST, 779 millions, le Régime de retraite du personnel d'encadrement (RRPE), 671 millions et la Société d'assurance automobile du Québec, 634 millions. Le reste des déposants représente 650 millions.
M. Rousseau a défendu le système en vertu duquel la Caisse ne rend des comptes qu'une fois par année. «Je ne comprends pas qu'une institution qui gère 100 % de fonds publics ait moins de comptes à rendre qu'une banque... », a dit M. Legault.
La ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, s'est dite «satisfaite» des réponses de M. Rousseau. «Les Québécois peuvent constater à quel point les exagérations et les déclarations incendiaires des deux groupes d'opposition au cours des derniers mois étaient non fondées et totalement irresponsables», a-t-elle affirmé dans un communiqué. «La situation n'aura donc aucun effet notable à long terme sur les déposants et n'aura pas, non plus, d'effet sur les taux de cotisation des régimes de retraite, les primes d'assurance automobile et autres contributions déposées à la Caisse.»
M. Legault a dit que la commission n'avait obtenu qu'une «partie des réponses». «On sait que la Caisse détient 40 % des 33 milliards du PCAA canadien. Ce qu'on ne sait pas, c'est quelle sera la provision en fin d'année.» M. Taillon a affirmé que M. Rousseau a sûrement «une très bonne idée» de la provision qui devra être faite.
L'Association québécoise des retraités des secteurs public et parapublic a demandé hier au gouvernement de «nommer une personne représentant les personnes retraitées des secteurs public, parapublic et privé au conseil de la Caisse».
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PCAA
La Caisse est en excellente santé
L'institution a investi 13,2 milliards dans le PCAA, dont «un peu moins d'un milliard» est exposé aux subprimes
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