Le projet Oléoduc Énergie Est a animé une partie de l'actualité politique récente au Québec et au Canada. Dossier épineux qui confronte des visions différentes sur l'échiquier politique, on aime bien dans ces conditions jouer à qui sera le plus nationaliste d'un point de vue de la défense des intérêts du Québec.
Tout dossier où il est possible d'isoler des méchants anglais qui voudraient imposer leur volonté à celle des Québécois devient immédiatement très chaud. Encore mieux cette fois, les « méchants » voudraient nous enfoncer du pétrole sale dans la gorge. Tous ceux qui ont comme religion la protection de l'environnement ont le potentiel pour invoquer le nationalisme, dans ces circonstances.
Trop facile.
Si vous ajoutez la déclaration du premier ministre de la Saskatchewan consécutive à l'annonce du maire de Montréal qui s'est positionné contre le projet, vous avez tout ce qu'il faut pour déclencher une controverse.
Le projet de pipeline de 4 600 kilomètres qui transporterait « environ 1,1 million de barils de pétrole par jour de l'Alberta et la Saskatchewan vers les raffineries de l’Est du Canada » intéressent d'autres nationalistes, préoccupés par le développement économique, les finances publiques et l'emploi, mais ils ont moins d'espace pour s'affirmer ces jours-ci.
Jusqu'à maintenant, le promoteur du projet (TransCanada) n'a impressionné personne qui a de l'influence au Québec, d'un point de vue médiatique ou politique. La faiblesse apparente des démonstrations a même incité le maire Labeaume hier à parler « d'incompétence » pour décrire le peu de réponses aux questions qui se posent d'un point de vue du « principe de précaution ».
Ça vient de quelqu'un qui croit « que dans un pays normal, les projets d’infrastructures de transport d’énergie devraient être capables de s’installer et de traverser toutes les provinces et les régions du pays ».
Le dossier est explosif, dans tous les sens du terme.
On ne peut pas tellement compter sur Pierre Karl Péladeau qui potentiellement pourrait mettre un peu de poids politique dans le camps des nationalistes « économiques » puisqu'il est empêtré dans ses propres problèmes. Ce n'est sûrement pas par hasard qu'un ex-candidat à la chefferie au PQ sorte dans le Devoir aujourd'hui pour se demander « Où est l’opposition à Québec? ».
Devant certains dans l'Ouest du Canada qui deviennent arrogants tout à coup, quelques-uns ont la plume facile... Je parle de ceux d'entre-nous les plus enclins à croire qu'on « s’essuierait les pieds » sur le tapis du Québec « une province entretenue » par la péréquation.
Je ne blâme pas mon collègue Mathieu Bock-Côté du Journal qui est souvent prompt à réagir dans ce genre de circonstance, mais il jette inutilement de l'huile sur le feu avec sa rengaine souverainiste : « Jouer honnêtement le jeu fédéral, cela consiste à faire passer, sur les questions vitales, l’intérêt du Canada avant celui du Québec ».
Les indépendantistes se nourrissent trop souvent des déclarations malhabiles d'anglophones qu'ils peuvent trouver.
La formule du jeu fédéral qui nous dessert est belle et invitante. Mais il faut en sortir... dans la réalité d'aujourd'hui.
Je conçois qu'il est d'usage de se montrer sceptique devant ceux qui sont aveuglés par les vertus du pipeline sans que les avantages pour les Québécois n'aient été démontrés.
Mais l'intérêt du Québec passe réellement par des redevances qui se comptent en milliards $ tout en ajoutant l'assurance qu'on prend au sérieux les risques environnementaux.
Dans ces circonstances, les déclarations récentes du chef caquistes étaient les bienvenues.
On aurait tort de ne pas voir l'intérêt du Québec dans ce dossier, grand importateur de pétrole pour les prochaines décennies que nous sommes.
Nos intérêts ont été mal défendus jusqu'à maintenant, il faut l'admettre.
Même mon collègue reconnu d'allégeance fédéraliste sur ce blogue Jonathan Trudeau avait des remontrances à faire à notre Premier ministre dans sa gestion du dossier des hydrocarbures.
Quand Denis Coderre et Philippe Couillard sont du même côté que le Bloc Québécois dans un dossier, c'est que ça n'a rien à voir avec le nationalisme québécois !
On aurait intérêt à repenser à notre stratégie de négociation avec TransCanada dans ce dossier plutôt que de réagir avec nos vieux réflexes face à quelques anglais qui veulent se faire du capital politique facile avec leur propre électorat.
L'intérêt du Québec est-il dans le transport du pétrole par bateau, par rail ou par pipeline ?
On pourrait commencer par répondre à cette question et se demander ensuite si la période de transition entre les énergies fossiles vers les énergies propres ne pourrait pas bénéficier des généreuses redevances pouvant être négociées avec ceux qui ont absolument besoin de nous pour faciliter leur projet ?
Le nationalisme trop facile cache souvent une mauvaise défense des intérêts du Québec !
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