L'intégrisme islamique n'est pas un choix personnel

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Sauf pour Couillard

Le passé saoudien du premier ministre Philippe Couillard continue de provoquer des remous. Afin de répondre à ses détracteurs qui le talonnent, le chef libéral a déclaré que « l’intégrisme fait partie des choix personnels ». Une formule abjecte utilisée par cet homme politique afin de se laver les mains d’un problème qui le concerne de particulière façon.
À l’évidence, Philippe Couillard est un homme intelligent. Mais tout aussi évident est qu’il a été profondément contaminé par son passage en Arabie saoudite, une horrible dictature islamique où il a vécu plusieurs années. À un point tel que l’immoralité dont il a fait preuve à cette époque en accumulant les pécules alors que les gens souffraient gravement tout autour de lui l’empêche aujourd’hui de condamner l’indéfendable. Il s’y refuse en proférant de véritables sornettes qui feraient rire si elles ne dissimulaient pas beaucoup de souffrance. Comme de laisser entendre que l’intégrisme islamique puisse relever de « choix personnels ».
En 2003, dans une entrevue accordée au magazine L’Actualité, Couillard racontait qu’il avait finalement pris la décision de quitter l’Arabie saoudite car s’il y était demeuré plus longtemps, il aurait été « irrécupérable ». Force est de constater qu’il aurait dû prendre la décision de partir plus tôt. Mieux: il aurait dû refuser de vivre dans ce pays une seule seconde, refuser de profiter comme il l’a fait de l’argent sale de ce pays coupe-gorge.
En soi, l’intégrisme islamique est un courant religieux qui impose la tradition comme arme tournée contre l’influence occidentale. Il s’agit d’une philosophie qui est très politique. Une façon d’ériger l’islamisme comme guide suprême pour toute action politique. Avec les conséquences excessivement néfastes qui s’ensuivent. Dont l’application intégrale de la charia, source de droit qui impose la religion à tous. Et qui bafoue les droits des autres. Et qui torture. Et qui décapite en public.
L’intégrisme islamique concerne le collectif et nullement les choix personnels. Voilà la réalité. Et ce n’est pas la précaution à deux balles de Philippe Couillard consistant à dire que cette pratique ne doit pas enfreindre les droits d’autrui qui y change quoi que ce soit. L’intégrisme est obnubilé par les gestes des autres. Et son but est de bafouer leurs droits au nom de dieu, afin de s’imposer à tous, partout, toujours, et tout le temps.
D’ailleurs, j’aimerais bien voir Philippe Couillard expliquer au blogueur saoudien Raif Badawi que « l’intégrisme fait partie des choix personnels ». Le régime qui applique l’intégrisme à la lettre l’a quand même condamné à recevoir 1000 coups de fouet pour insulte à l’islam, dont 50 lui ont déjà été distribués. Le choix de l’intégrisme, c’est le régime qui l’a fait. Mais c’est quand même à tous les autres qu’il l’impose. Badawi en porte aujourd’hui les cicatrices sur le dos pour le prouver.
Ou le voir expliquer qu’il est correct de soumettre une femme violée au fouet pour cause de relations extra-conjugales? Ou de couper la tête d’une femme en pleine rue, punition caverneuse attribuée sans même qu’un procès digne de ce nom n’ait condamné la personne en question. Voir un vidéo ici (âmes sensibles s’abstenir): http://www.dreuz.info/2015/01/video-voila-comment-on-decapite-une-femme-a-la-mecque-lieu-saint-de-lislam/
J’aimerais aussi le voir expliquer que les fillettes de huit ou dix ans qu’on mariait de force (jusqu’à tout récemment, et qui sont demeurées sous le coup de ce statut malgré la loi de 2013) à des vieux dégueulasses ont fait le choix personnel de l’intégrisme. Alors que le soir venu, c’est l’intégrisme qu’elles n’ont jamais choisi qui pénètre en elles, violant leur vie personnelle de la façon la plus violente qui soit. Comment expliquer à ces enfants qu’un premier ministre du Québec ose prétendre que « l’intégrisme fait partie des choix personnels »?
Et comment l’expliquer à ces milliers de femmes saoudiennes qui sont toujours obligées de marier des hommes imposés par leur famille, qu’elles n’aiment pas du tout? Et qui détruiront forcément leur vie? Sont-ce là encore des questions qui relèvent de « choix personnels » ?
En Arabie saoudite, nul n’est à l’abri de ces pratiques moyenâgeuses. Pas même les princesses ou les reines. Dans une entrevue accordée au New-York Post en 2014, Alanoud Al Fayez, jordanienne de bonne famille, racontait comment elle a été mariée de force au saoudien Abduallah Bin Abdulaziz, qui fut roi de 2005 jusqu’à sa mort qui vient tout juste de survenir. Et dont la mémoire a été saluée par l’ensemble des chefs d’État…
Le mariage forcé, c’était en 1972. Al Fayez n’avait que 15 ans. Le roi, lui, en avait 48.
De son exil londonien, Al Fayez raconte aujourd’hui, librement, sa vie de misère en Arabie saoudite. Elle a été battue par le roi. Par ses gardes. Elle devait être punie car, crime suprême, elle ne donna que quatre filles au roi, lui qui voulait des garçons. Le roi, qui avait de toute façon 30 autres épouses, divorça d’elle quelque part dans les années 1980.
Comme toutes les autres femmes du royaume, Al Fayez était considérée comme une moins que rien. Elle ne pouvait prendre soin de ses filles, conduire, voter, aller à l’école, ou se rendre à une clinique. Sans la permission du mâle.
N’en pouvant plus de subir un tel régime de terreur, Al Fayez prit la décision de s’enfuir. C’était en 2001. Grâce à l’aide d’une militante des droits de la femme, elle s’envola vers Londres. Sans ses filles qu’elle ne pouvait amener dans sa fuite. Se disant qu’elles étaient aussi les enfants du roi en devenir et qu’il en prendrait de ce fait soin. Grave erreur. Celles-ci sont depuis les prisonnières du régime. Ne pouvant quitter leur quartier. Ni parler à quiconque. Droguées et battues afin de demeurer dociles.
Est-ce que ces femmes de la haute société ont sciemment fait le choix de l’intégrisme? Non pas. Elles pas plus que tous les autres. Là-bas comme ailleurs.
Mais Couillard préfère fermer les yeux sur ces problèmes. Il les ferme depuis qu’il vivait comme un pacha bien à l’abri de l’Aramco, compagnie pétrolière du régime saoudien, seule enclave saoudienne fonctionnant à l’abri de l’intégrisme. Couillard, de par son statut d’étranger, a pu faire le « choix personnel » de se prémunir de l’intégrisme, tout en remplissant ses poches de ses deniers tachés de sang. Alors que les quelque 20 millions de Saoudiens qui vivaient à côté de sa forteresse de luxe ne le pouvaient pas. Pour eux, aucun autre choix personnel que de subir l’intégrisme ne s’offrait à eux.
On peut bien comprendre qu’il est inutile de prendre le mors-aux-dents, ici au Québec. Qu’il ne faut pas exagérer la menace qui pèse sur notre société. Et faire très attention à ne pas verser dans l’islamophobie. Faire en sorte que les mesures adoptées pour nous prémunir de ce qu’on ne veut pas ici doivent être réfléchies et bien adaptées à notre contexte. Mais cela ne signifie pas, et ne signifiera jamais, qu’on a le droit de banaliser la souffrance en déblatérant de pures conneries comme le fait Philippe Couillard. Un premier ministre n’a tout simplement pas le droit de dire que « l’intégrisme relève de choix personnels ».
Encore moins dans le cas de ce premier ministre, ce grand ami du royaume coupe-gorge d’Arabie saoudite! À l’écoute du discours de Couillard des derniers jours, le malaise est chez la majorité palpable, énorme. Il donne ni plus ni moins que la nausée.


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