L'ADQ abandonnerait le critère de la langue

La priorité irait aux immigrants capables de trouver un emploi dès leur arrivée

ADQ - congrès de mars 2008

Québec -- Un gouvernement adéquiste réduirait le nombre de nouveaux arrivants francophones pour accorder la priorité aux immigrants capables de dénicher un emploi dès leur arrivée au Québec. «Aujourd'hui, on importe du chômage», a affirmé le président de la commission politique de l'Action démocratique du Québec, Stéphane Le Bouyonnec. Le gouvernement Charest a trop insisté sur le fait que les immigrants «devaient parler le français avant de rentrer au Québec, au détriment de demander d'abord s'ils allaient avoir une job en arrivant», a-t-il ajouté.

Lors d'une conférence de presse, M. Le Bouyonnec, la députée de Groulx et porte-parole en matière de développement économique, Linda Lapointe, la conseillère du parti, l'économiste Diane Bellemare, ainsi que Mario Charpentier ont présenté le cahier des participants, intitulé Façonner la modernité, en vue du septième congrès de l'ADQ, qui se déroulera en fin de semaine à Laval.
Axé sur le développement économique, ce cahier comprend 29 propositions émanant de la commission politique du parti, dont une ambitieuse politique familiale inspirée des pays d'Europe du Nord ainsi que 18 propositions régionales. En plus d'une fiscalité conservatrice, l'ADQ préconise des politiques qui s'apparentent grandement aux mesures mises en oeuvre dans les pays sociaux-démocrates européens, non seulement sur le plan de la famille mais aussi au regard de l'interventionnisme de l'État dans l'économie. De fait, le document adéquiste appelle à un renouvellement de la social-démocratie beaucoup plus cohérent et plus précis que celui évoqué dans le cahier des propositions qu'auront entre les mains les militants péquistes réunis au même moment à l'occasion de leur conseil national.
L'économiste Diane Bellemare juge que l'immigration doit répondre à des besoins circonstanciels du marché du travail. «On nous dit que 60 % des immigrants qui sont arrivés au pays [le Québec] cette année parlent le français et, en même temps, on reconnaît que ces immigrants ont de plus en plus de difficulté à s'intégrer sur le marché du travail.» L'ADQ note que depuis dix ans, l'écart entre le taux de chômage chez les immigrants et le taux de chômage de la population en général s'est accru plus rapidement au Québec que dans le reste du Canada. Selon Mme Bellemare, les immigrants n'auront qu'à apprendre le français dans leur milieu de travail. On propose d'aider les entreprises à offrir cet apprentissage mais on rejette l'idée de renforcer la Charte de la langue française afin de franciser les entreprises de moins de 50 employés.
L'ADQ estime que l'immigration, dont les seuils devraient être limités au niveau actuel de 45 000 personnes par année, ne réglera pas le problème démographique qui attend le Québec. Le parti propose de s'inspirer des politiques natalistes les plus généreuses de l'Europe pour porter de 1,6 à 2 enfants par femme le taux de natalité, une cible atteinte par la France. Pour ce faire, l'ADQ veut hausser de 2,4 % à 3 % du produit intérieur brut (PIB) les dépenses de l'État destinées à soutenir la famille. Selon Mme Bellemare, cette augmentation représente une charge de 1,8 à 3 milliards de plus pour l'État québécois. À titre de comparaison, la promesse de l'ADQ de verser une allocation de 100 $ par semaine pour chaque enfant qui ne fréquente pas un service de garde subventionné représente une dépense annuelle d'un milliard de dollars pour le gouvernement.
«La femme est au coeur de la relance économique», a lancé M. Le Bouyonnec, soulignant qu'un gouvernement adéquiste encouragerait les femmes à avoir des enfants tout en travaillant. On propose notamment d'offrir des incitatifs financiers aux entreprises qui signeront des «ententes de flexibilité» aux employées qui ont des enfants de moins de 16 ans. Les femmes qui ont des enfants de moins de cinq ans auraient droit à des bourses pour parfaire leur formation.
Parallèlement à cette ambitieuse politique familiale qui ferait pâlir d'envie les militants du SPQ libre, un gouvernement adéquiste réduirait d'un milliard de dollars par année la dette accumulée afin de payer les dépenses courantes de l'État québécois, c'est-à-dire «la dette d'épicerie», selon l'expression employée dans le document. Les représentants de l'ADQ se sont montrés avares de détails sur les moyens que prendrait un gouvernement adéquiste pour boucler un budget dont les charges financières augmenteraient de quatre milliards.
Un volet entier du document porte sur les investissements dans les entreprises, notamment le capital de risque. Le parti de Mario Dumont se montre résolument interventionniste. L'ADQ créerait un bureau de l'investissement et de la prospérité ainsi qu'un «Private Investment Council» à la québécoise, présidé par le premier ministre et réunissant les grands décideurs économiques afin de réaliser de grands projets. M. Le Bouyonnec, qui a déjà travaillé dans l'industrie du capital de risque, s'est montré très critique à l'endroit de la réforme Brunet, qui a selon lui conduit à un échec. Ainsi, depuis quatre ans, on a assisté à une baisse de 40 % du nombre de financements, note-on. Le gouvernement du Québec devrait appuyer davantage le capital de risque. L'ADQ propose aussi le retour d'un régime d'épargne-actions.
La Caisse de dépôt et placement du Québec devrait multiplier par trois ses investissements directs dans les entreprises et les projets d'infrastructures au Québec pour qu'ils atteignent 15 % de son capital. De même, Hydro-Québec devrait reprendre ses activités de capital de risque comme par le passé, avance l'ADQ.


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