Financement du MEQ

Jusqu'à 36 millions aux écoles juives

Écoles privées juives

Québec versera jusqu'à 36,4 millions de dollars par année aux 15 écoles privées juives de la province- soit 5200 $ par élève, comme au public- en vertu d'une entente signée en décembre.
Les écoles juives toucheront 100 % de la subvention donnée aux écoles publiques, comparativement à 60 % auparavant, à la condition qu'elles s'associent à une commission scolaire. Déjà, sept écoles juives l'ont fait. Les autres collèges privés, dont les écoles musulmanes, réclament évidemment le même traitement.
C'est officiellement pour « favoriser l'apprentissage interculturel » que le ministre de l'Éducation, Pierre Reid, a donné son aval au projet. Son annonce a été faite de manière discrète, en décembre, lors de la réouverture de la bibliothèque de l'école Talmud Torah Unis, incendiée au printemps dernier.
Élaboré depuis 10 ans par la communauté juive, le projet a débloqué après ce triste événement. À la demande du ministère de l'Éducation, la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB), située dans l'ouest de l'île de Montréal, a signé une entente avec cinq écoles juives, tandis que la commission scolaire anglophone Lester-B.-Pearson s'est liée à deux autres établissements.
« Nous allons faire des échanges interculturels, des sorties communes au musée ou encore des journées pédagogiques communes pour nos professeurs », a expliqué hier à La Presse Jean-Marc Crête, président de la CSMB. En vertu de l'entente, la CSMB touche 10 % de la subvention accordée aux cinq écoles juives, soit approximativement 1,5 million par année.
« C'est un projet merveilleux, qui va permettre de bâtir ensemble un Québec plus tolérant », a commenté Sylvain Abitbol, président de la Fédération juive CJA. Avant cette annonce, son organisme devait verser 2,5 millions par année aux écoles juives pour aider à boucler leur budget. Désormais, l'argent du MEQ et les droits de scolarité exigés des parents pour payer les cours d'hébreu et de religion juive devraient suffire.
Le président du Conseil musulman de Montréal, Salam Elmenyawi, était lui aussi très heureux d'apprendre la nouvelle. « Le gouvernement encourage la tolérance en finançant les écoles des groupes religieux, a-t-il dit. Nous voulons maintenant que cette mesure soit ouverte à la communauté musulmane. Je suis sûr que dans les jours et semaines à venir, nos écoles en feront la demande. »
« Il aurait été souhaitable de voir s'il n'y a pas des priorités autres que celle-là, a pour sa part souligné Auguste Servant, porte-parole de la Fédération des établissements d'enseignement privé. Dix millions (il s'agit du premier montant évoqué par le MEQ), ce n'est pas rien dans la conjoncture actuelle. »
Le MEQ ne semble pas du même avis. « Il n'est pas dans notre intention que toutes les écoles privées bénéficient de 100 % de la subvention, a indiqué Caroline Richard, attachée de presse de M. Reid. Il faudrait voir si d'autre écoles veulent favoriser les échanges culturels. Il faut faire attention, ces ententes ne sont pas faites sur une base religieuse, loin de là. »
Outre les écoles juives, quatre institutions privées sont financées à 100 % en vertu d'ententes datant de plusieurs décennies. Il s'agit notamment des écoles grecques Socrates et Démosthène, que le gouvernement a accepté de subventionner en 1971 en échange de leur francisation.
Depuis, quelques scandales ont éclaboussé ces établissements, sur lesquels le MEQ semble avoir peu de contrôle. En juin, les enseignants de Socrates ont dû faire la grève parce qu'ils n'étaient plus payés. Une enquête rendue publique en décembre a révélé que plus de 100 000 $ ont été dépensés de façon farfelue par l'ex-administration de Socrates, dont 24 000 $ en appels érotiques aux services Live Girls et Pool Party.
Hier, tant l'opposition péquiste que la Commission scolaire de Montréal (CSDM) et les centrales syndicales ont dénoncé les nouvelles ententes. « C'est scandaleux que le ministre Reid contribue à la montée des écoles ethno-religieuses et de leurs ghettos, a dit Réjean Parent, président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ). Il ne faut pas reconfessionnaliser les écoles par la porte d'à côté, mais mieux financer le système public. »


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