Inévitable

Par Maurice Cloutier

2005

mercredi 26 janvier 2005
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Les spéculations sont nombreuses depuis quelques jours autour de l'annonce imminente par le premier ministre Jean Charest d'un important remaniement ministériel. Hier soir, plusieurs indications étaient à l'effet que le premier ministre ne passera pas à l'action cette semaine.
Il peut toujours procéder très rapidement, mais il a plusieurs bonnes raisons de vouloir bien prendre son temps. Il doit absolument éviter de glisser sur une peau de banane. Ce n'est vraiment pas le temps. Sans doute aussi qu'il ne veut pas donner l'impression que les médias font tomber les ministres et lui dictent son agenda alors qu'un remaniement est un exercice très sérieux pour lequel il peut choisir le moment le plus approprié. Il est probable que M. Charest attendra au moins à la semaine prochaine, peut-être un peu plus. Par contre, il ne peut plus attendre des semaines.
La situation actuelle est intenable pour le gouvernement alors que plusieurs ministres sont en déséquilibre et carrément en déficit de crédibilité devant les principaux acteurs de leur secteur respectif et leurs proches collaborateurs. Il suffit de penser à Sam Hamad aux Ressources naturelles, Françoise Gauthier à l'Agriculture, Julie Boulet et, surtout, Pierre Reid, à l'Éducation.
Dans le cas de M. Reid, député d'Orford et ancien recteur de l'Université de Sherbrooke, il est très difficile de comprendre pourquoi il accumulé autant de fautes depuis le début de son parcours à l'Éducation. Il a pourtant des connaissances très larges du milieu de l'éducation et une capacité d'analyse indéniable. Il a très mal paru à bien des occasions, notamment dans le dossier des prêts et bourses. Malgré cela, comment a-t-il pu tomber dans le piège du financement à 100 pour cent des écoles privées juives? Aurait-il tout bonnement répondu à une commande de son patron?
Plusieurs analystes sont très durs à son endroit. Même s'il a souvent mis son gouvernement dans l'embarras, Pierre Reid est toujours demeuré très digne et solidaire. Il serait étonnant qu'il soit évincé du conseil des ministres mais ses responsabilités risquent de diminuer radicalement. Il doit être moins exposé pendant les prochains mois.
Devant toutes les critiques formulées au cours des derniers jours et les spéculations sur leur avenir, plusieurs ministres n'ont donc plus l'autorité nécessaire dans leur ministère respectif pour mener à terme des grands débats et des réformes. Un remaniement ministériel à très court terme est inévitable pour calmer le jeu et envoyer un signal clair aux citoyens.
Il faut d'ailleurs des grands changements au conseil des ministres. Depuis des mois, la population est insatisfaite du gouvernement libéral, mais il reste encore suffisamment de temps aux troupes de Jean Charest avant les prochaines élections pour renverser la vapeur, si les bons choix sont faits dès maintenant. Dans le cadre du remaniement, le premier ministre doit également lancer un grand objectif d'amélioration de la gouvernance et du traitement des grands dossiers. La cohésion a trop souvent fait défaut.
Le premier ministre doit également s'entourer de gens d'expérience et écouter leurs conseils pour éviter un cafouillage comme celui concernant les écoles juives.
Plusieurs politologues sont convaincus de la nécessité pour M. Charest de poser des gestes importants pour redonner une plus grande crédibilité à l'équipe ministérielle. "Actuellement, on sait que ça ne marche pas", constate le politologue Jean-Herman Guay, qui enseigne à l'Université de Sherbrooke. Pour cette raison, il croit lui aussi à une action rapide de M. Charest qui se traduira par un bouleversement du conseil des ministres et même des changements chez les proches collaborateurs de son équipe et de celles de plusieurs ministres. M. Guay n'en revient pas des difficultés qu'éprouve le gouvernement à bien présenter et mener à terme ses dossiers.
Le rattrapage n'est toutefois pas impossible. Chose certaine, ça ne va pas du tout dans le moment. Il faut cependant se rappeler que Jean Charest excelle souvent dans les moments critiques et dans les situations qui l'exigent. Ses performances en campagne électorale mais également les résultats qu'il a obtenus lors de l'importante conférence sur la santé, avec l'introduction de la notion du fédéralisme asymétrique, en témoignent.
Le remaniement est une carte majeure qu'il doit maintenant abattre, avec la plus grande finesse.


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